URSSAF : l'insupportable légèreté de l'être
La promesse du gouvernement ? Améliorer la condition des artistes-auteurs ! Pourtant, nous vivons un enfer sur tous les fronts. L’un de nos nombreux problèmes actuels est notre régime de sécurité sociale. D’une part en raison des graves dysfonctionnements imputés à l’Agessa ces 40 dernières années, d’autre part dans un souci de simplification administrative, début 2020, le recouvrement des cotisations sociales des artistes-auteurs a basculé vers l’Urssaf Limousin. À cause de cette transition mal gérée, notre situation déjà difficile est devenue cauchemardesque.
Le 05/10/2020 à 11:02 par Auteur invité
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05/10/2020 à 11:02
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Il a d’abord fallu, à l’aide du code d’activation reçu par courrier, créer un espace personnel sur leur site internet. Problème : les trois quarts des artistes-auteurs que je connais et suis sur les réseaux sociaux n’avaient pas reçu ce code, ou avaient reçu un code qui ne fonctionnait pas, ou avaient reçu le code de quelqu’un d’autre (par exemple, une personne portant un nom vaguement similaire au leur). Le mien avait été envoyé au nom d’un ex-mari dont je suis divorcée depuis 23 ans : en toute logique, il n’a donc jamais trouvé le chemin de ma boîte à lettres.
Veuillez ne pas raccrocher...
En appelant l’Urssaf Limousin par téléphone pour réclamer que l’erreur soit rectifiée et qu’on m’adresse un nouveau code, j’ai également découvert que j’étais considérée comme déclarant toujours mes revenus artistiques en BNC, alors que je suis passée en Traitements et salaires depuis plusieurs années. J’ai eu de la chance à cette première étape : j’ai fini par réussir à créer mon espace personnel au printemps. Nous sommes aujourd’hui début octobre ; le dépôt des déclarations de revenus 2019 est clôturé depuis le 1er septembre, et un nombre non négligeable de mes collègues n’ont toujours pas reçu le fameux code d’activation ni réussi à rectifier les erreurs de leur dossier.
Le dépôt des déclarations de revenus fut justement l’occasion d’un nouveau coup de stress. Théoriquement ouvert le 1er juillet, il comportait un si grand nombre de bugs informatiques que la plupart des artistes-auteurs ont préféré attendre le dernier moment dans l’espoir qu’ils soient réparés entre-temps.
Espoir vain : fin août, les trois quarts d’entre nous ne parvenaient toujours pas à entrer les revenus qui n’avaient pas déjà été déclarés par leurs diffuseurs, à rectifier les montants si nécessaire, à télécharger le cas échéant les certificats de précompte qu’on leur réclamait, et surtout à valider leur déclaration une fois arrivés au bout du processus. Quand par miracle la validation réussissait, souvent, le PDF de récapitulation émis ne correspondait pas aux informations qui venaient d’être fournies.
Pour ma part, j’ai tout essayé : vider mon cache, changer de navigateur et même me connecter au milieu de la nuit pour éviter tout problème d’encombrement de la ligne. Rien à faire. À bout de nerfs, j’ai fini par joindre l’Urssaf Limousin au téléphone et envoyer une déclaration papier comme cela m’était suggéré. Je me suis alors crue tirée d’affaire jusqu’à l’année prochaine.
Naïve que j’étais.
Erreur de la banque en votre défaveur
Vendredi 2 octobre, je me connecte au site de l’Urssaf qui vient d’émettre les échéanciers avec les montants à régler pour les artistes-auteurs déclarant leurs revenus en BNC. Les autres, ceux qui comme moi les déclarent en Traitements et salaires, ont déjà été précomptés de leurs cotisations sociales par leurs diffuseurs ; en toute logique, ils ne doivent donc rien à l’Urssaf. Pourtant, mon échéancier affiche un montant coquet de 1755 € à régler avant le 15.
Panique.
Après deux heures de vaines tentatives, j’arrive à joindre l’Urssaf Limousin par téléphone pour demander une explication. Là, un monsieur très poli m’informe que l’un de mes diffuseurs a certes précompté mes cotisations sociales (comme je leur en ai apporté la preuve avec le fameux certificat si difficile à obtenir des diffuseurs puis à télécharger sur leur site), mais qu’il ne les leur a pas reversées.
Et que c’est à moi qu’il revient, soit d’apporter la preuve que le diffuseur les a bien payées et qu’ils ont commis une erreur comptable, soit de leur régler ces 1755 € et de me débrouiller ensuite pour les récupérer auprès du diffuseur.
À ce stade, précise-t-il, même si le diffuseur est de bonne foi et propose de rectifier directement son oubli auprès de l’Urssaf, ça ne sera plus possible. Je suis donc seule responsable du paiement à l’Urssaf d’une somme qui — je leur en ai apporté la preuve — se trouve en possession de mon diffuseur, et qu’ils refusent de lui demander eux-mêmes. Et si le problème vient d’un cafouillage comptable ? Hé bien, c’est également à moi de le prouver. À la traduction littéraire qui est mon métier de base, me voilà donc sommée d’ajouter les fonctions d’expert-comptable et d’huissier de justice.
Et vite, car si je n’ai pas résolu le problème d’ici le 15, les 1755 € indiqués à tort au débit de mon compte passeront en contentieux.
Vertigineux sommets de stress
La mission de l’Urssaf consiste à recouvrer les cotisations sociales. Apparemment, elle ne consiste pas à les recouvrer auprès des gens qui les lui doivent — en l’occurrence, les diffuseurs, qui ont pourtant eux aussi un compte à l’Urssaf, et vers lesquels il leur serait facile de se tourner. Non : elle consiste à imposer des demandes injustes et irréalistes à ceux qui ont le moins de possibilités d’y répondre.
Ceux qui sont déjà écrasés par des dysfonctionnements administratifs ou techniques qui ne font qu’empirer au fil du temps. Les pouvoirs publics laissent les artistes-auteurs se noyer dans la plus parfaite indifférence malgré toutes les belles déclarations d’amour à notre égard dans la presse. Depuis le début de l’année, le niveau de stress d’une profession dont 41 % des membres vivent avec moins que le SMIC atteint des sommets.
À titre personnel, bien qu’ayant la chance de gagner correctement ma vie, je souffre d’hypertension et d’un trouble anxieux généralisé : les conséquences de tous ces problèmes sur ma santé physique et mentale sont désastreuses. Qu’attendent les pouvoirs publics pour nous accorder le minimum de considération que nous méritons ? Que nous allions tous en masse manifester devant l’Urssaf-Limousin ? Que nous arrêtions nos métiers les uns après les autres ? Que plusieurs d’entre nous, au pied du mur, mettent fin à leurs jours ?
Depuis plusieurs années, nos organisations professionnelles, tenues à bout de bras par des artistes-auteurs bénévoles, avaient tiré la sonnette d’alarme sur une transition qui s’annonçait mal préparée et chaotique. Personne ne les a écoutées. Voilà le résultat.
illustration : andreas160578 CC 0
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42 Commentaires
Abg
06/10/2020 à 20:59
Pour ma part je viens de me lancer dans l'aventure cette année et c'est déjà la catastrophe...
Puisqu'on ne peut pas le faire manuellement, j'ai demandé à moduler mes cotisations en envoyant poliment un mail par mois pendant 3-4 mois...
Le mois dernier j'ai enfin reçu un coup de fil ("inconnu", sans numéro) et ai indiqué à la personne au bout du fil la somme "estimée" pour calculer mes cotisations.
Je pensais enfin être tranquille, sauf que deux jours plus tard je découvre que le nouveau calcul n'a pas pris ne compte le régime micro-bnc sous lequel je suis.
Donc rebelote, et jusqu'ici pas de nouvelle.
D'ailleurs même si je voulais payer, je ne pourrais pas. La case avec l'échéance T4 est toujours bleue et m'affiche "calcul en cours"
Reste à voir si les choses se débloqueront d'ici le 15.
Skall
07/10/2020 à 08:05
Le plus étonnant dans ce témoignage éloquent est de constater que le médiocre responsable des dérives de l’agessa est maintenant à la direction de l’agessa et de la maison des artistes, et qu’il est l’artisan de cet accouplement Indécent avec l’URSSAF...
Preuve que les médiocres au sein de l’État ont toujours eut une survivance supérieure à ceux qui veulent le bien du peuple.
Actuellement, nul ne sait à quoi sert aujourd’hui la Maison des Artistes, et à quoi sont payés les personnes y travaillant...
Faut-il encore souligner Le statut de l’artiste en France qui est anticonstitutionnel, qui dès qu’il est soulevé auprès des politiques, ceux-ci jouent à l’autruche et n’apportent aucune réponse: Nous avons le droit constitutionnel de choisir une occupation professionnelle non rémunératrice, mais devons justifier un certain niveau de revenu pour être reconnu dans cette profession... Les syndicat se déculottent à cette contradiction, plus préoccupés de recevoir leurs subventions...
Hélène J.
07/10/2020 à 10:40
Je fais partie des "moins à plaindre", mais j'ai moi aussi des soucis, évidemment, qui n'en a pas avec l'URSSAF Limousin cette année ?
Déjà, recevoir mon code... il a fallu attendre plusieurs mois, e-mails et courriers de demandes et de réclamations envoyés pour ce faire (car ça ne venait pas tout seul). Mais j'ai fini par le recevoir au printemps. Les échéances ne cessaient d'être repoussées et je tenais à les payer dans les temps, donc j'ai envoyé un premier chèque en avril. Que l'URSSAF a reçu, mais leur site marchant tellement mal, rien n'a été affiché avant... fin septembre (si, si). Puis il y a eu l'échéance à payer avant le 1er septembre. Impossible de payer en ligne, rien ne fonctionnait cet été, donc j'ai retenté le coup avec un chèque... qui n'est jamais arrivé (ou qui s'est perdu ?) puisqu'il n'a toujours pas été débité. Et toujours impossible de payer en ligne... donc forcément, en date du 1er septembre, échéance de paiement, j'avais payé (par chèque) depuis juillet, mais puisque l'URSSAF n'avait rien reçu, pour eux j'étais en retard de paiement, et les voilà qui m'annoncent une majoration à venir ! Je n'ai pu payer mon échéance T3 qu'en date du 15 septembre, date où enfin, je pouvais payer en ligne. Ne parlons pas de T4, qui pourrait être payable depuis le 1er octobre, mais je ne sais pas pour vous, moi je ne peux toujours pas payer en ligne !
Quant aux messages restés lettre morte, faut-il vraiment en parler ? Je n'essaie même plus de les appeler, car je ne tombe JAMAIS sur personne. Mes e-mails ont un taux de réponse de 5 % environ (et ce, 5 mois après envoi) et mes courriers sont apparemment lus mais je n'ai pas de réponse non plus. Je suis littéralement dépitée et sidérée par ce qui a été mis en place, si on peut encore oser dire qu'un dispositif a été mis en place ?
Bon courage à tous !
Jean
07/10/2020 à 11:42
Je ne comprends pas que nous ne puissions pas entamer une action en justice commune. On est dans l'extorsion, l'intimidation, le harcèlement, le déni de démocratie. Il y a sûrement quelque chose à faire tous ensemble via le biais de la Ligue et d'autres associations? Le simple fait de demander à un précompté de repayer si le diffuseur n'a pas payé mais a bien retenu l'argent doit être illégal. Le fait de ne pas pouvoir moduler ses cotisations aussi.
Sylvie Bérard
07/10/2020 à 22:28
Je ne sais pas si mon cas fait rire ou ... pleurer...
Je n’ai jamais reçu mon code d’activation car.. mon numéro de siret indique une cessation d’activité il y a 4 ans!!!!! Alors que mon activité ( sculpteur, mosaïste) n’a jamais cessé depuis 1990 !!!
Au début j’ai appelé... on me demande de donner une date de cessation d’activité ... et de créer une nouvelle date dans la foulée de nouvelle activité ! Il est hors de question que je fasse cela: 2 déclarations complètement fausses.
Je n’ai aucun retour de la part de l’Urssaf me permettant de pouvoir conserver normalement mon statut.. mes 3 lettres recommandées m’ont permis de recevoir: 3 accusés de réception... mais 0 solutions.
Je suis désespérée, cette situation me stresse complètement. Je n’ai rien pu déclarer et rien pu régler bien évidemment... A l’aide .
Quelqu’un est-il dans la même situation que moi? Et a-t-il trouvé une issue...???!!
Aleph
09/10/2020 à 11:33
Bonjour, je suis agent de la fonction publique et je peux vous assurer que pour le personnel aussi et sa situation administrative professionnelle pourtant balisée, c'est le délire total. Une collègue a eu une fiche de paie à zéro euros. Les délais légaux ne sont pas respectés. Pas moyen d'avoir des informations sur des congés. Les personnes mourant de cancer sont harcelées pour des paperasses remplies dix fois déjà, et promenées d'un service à l'autre, des carrières sont détruites, des fraudeurs récompensés, etc. Nous sommes tous victimes d'une réglementation délirante, d'un abandon de la notion de règle, d'une incurie et d'une irresponsabilité généralisée qui favorise l'émergence et l'épanouissement impuni de monstres abusifs.
GRANJOUX
12/10/2020 à 14:29
Bonjour,
Nous sommes lundi 12 octobre et je viens de recevoir un échéancier de 2019 de l'urssaf. Je dois payer 4254 euros avant le 15 octobre alors que je suis déjà prélevée par l'éditeur. Que faire avec si peu de temps ?
Je ne payerai pas une deuxième fois !
Bonne journée
Celine
12/10/2020 à 15:51
Pas grand chose à "faire". Ne pas payer (ce que vous avez reçu est un échéancier, pas un appel à cotisation). Contacter vos diffuseurs pour vérifier qu'ils ont bien reversé vos precomptes à l'urssaf et leur demander de contacter l'urssaf pour rectifier l'erreur... En espérant que l'urssaf leur réponde. Envoyer (ou renvoyer pour la énième fois) son certificat de precompte à l'urssaf via la messagerie de votre compte urssaf ou à l'adresse artiste-auteur.limousin@urssaf.fr.
C'est ce que j'ai fait, et temps que je ne reçois pas de réel appel à cotisation (que je refuserais de prendre en compte puisque je suis precomptée aussi), je ne vois pas quoi faire d'autre.
Olivier Mannoni
12/10/2020 à 15:24
Vous n'êtes pas la seule. Contactez l'une des associations professionnelles (ATLF, Ligue des Auteurs, SGDL...) qui vous donnera la marche à suivre. L'Urssaf s'enfonce dans le n'importe quoi, et ses responsables dans le déni.
Beaufreton Jean-Patrick
13/10/2020 à 16:06
Bonjour,
comme je ne tire aucun revenu de mes écrits (mon éditeur est une association et je lui ai abandonné mes droits), je n'ai pas donné suite à la demande de déclaration.
Ce midi, je reçois un "échéancier définitif 2019" qui totalise 1 100 € qui constituent "le revenu correspondant à la somme des assiettes plafonnées appliquées par chaque diffuseur". :exclaim:
Naguère, quand j'étais salarié avec plusieurs employeurs, je pouvais pointer ce que chacun avait déclaré... là ? silence radio !
Dès lors, je suis redevable de 191 € au titre des diverses cotisations.
L'origine, la base, l'assiette ? Trois grandes inconnues.
Il est précisé : "Pour le paiement de ces cotisations, vous recevrez chaque trimestre un avis d'appel". Dois-je y être sourd... car mes revenus ne m'ont pas permis d'acheter un appareil d'audition ;-P
Lia
11/02/2021 à 10:24
Je confirme le désastre de cette transition. J'ai reçu mon code d'activation avec un retard de 6 mois. Pour à la réception découvrir qu'il avait fait deux erreurs de chiffre dans mon numéro de sécurité sociale. Ni les mails, ni les coups de téléphone auprès de l'Urssaf Limousin n'ont pu et encore à cette date résoudre le problème. Nous sommes en Février 2021.
Alec Drama
31/12/2021 à 17:18
Rien de nouveau sous ce beau ciel covidé. En plus du stress généré par les déprogrammations massives et une perte de revenu qui s'installe durablement, l'URSSAF en rajoute avec des bugs de plateforme et des demandes de cotisations erronées mais qui te donne direct un ulcère. Tout doit être fait par courrier à nos frais pour pallier leurs soucis et tout le monde s'en moque. FORMIDABLE !
Bouvet Serge
05/02/2022 à 10:08
Même enfer ! Je possède déjà un numéro SIREN. Je fais la demande d'un document pour valider une facturation d'entreprise. L'URSAFF crée par erreur un nouveau numéro SIREN. Les impôts me réclame de régulariser ma situation. Panique ! A suivre dois-je faire mes réclamation pour corriger la bévue de L'URSAFF. L'histoire s'est réglée au bout d'un mois ! Des dizaines de courriels et d'appels à l'INSEE, URSAFF et trésorie.
Résultats : j'ai consacré des heures ! Et j'ai perdu trop de temps. Et je n'ai toujours pas ce petit document nécessaire que j'avais demandé initialement.... J'ai un peu peur de les relancer : la machine infernale pourrait encore s'emballer.
Kirikou
04/03/2022 à 19:25
Alors pour ma part je suis un peu dans le même cas que tout le monde.
Je déclare en traitement et salaire et en BNC. Tous mes revenus sont déjà précomptés. Je reçois les fameux courrier ou on me réclame des sommes que mes diffuseurs ont déjà payé et les fameux appel à cotisations. Chaque fois que j’appel pour expliquer ma situation je tombe sur quelqu’un de complètement différent qui l’interprète selon sa sensibilité et qui me dit de faire plus ou moins n’importe quoi.
Ma stratégie est simple je ne paye absolument rien, ils peuvent majorer ce qu’ils veulent, 10 ou 20 % de zéro égal zéro !!! À un moment donné ils vont bien se rendre compte de leurs erreurs. J’ai tous les documents qui prouve que je ne leur dois rien, certificat de précompte etc…