L'étude très sérieusement menée par la Booth School of Business de l'université de Chicago démontrera au moins que les étudiants ne peuvent pas simplement faire reposer tous leurs espoirs sur un prix littéraire. En effet, les lecteurs auraient tendance à juger plus sévèrement un ouvrage primé, durant leur lecture, qu'ils ne l'auraient critiqué avant la récompense.
Le 19/02/2014 à 18:40 par Nicolas Gary
Publié le :
19/02/2014 à 18:40
Mieux vaut le métro que le prix Goncourt ?
Dans The Paradox of Publicity: How Awards Can Negatively Affect the Evaluation of Quality (Le paradoxe de la publicité : comment les récompenses peuvent nuire à l'évaluation de la qualité) l'auteure Amanda Sharkey, ainsi que Balázs Kovács, chercheur à l'université de Lugano, ont pris en compte la notation des livres, accordée par des lecteurs. Le principe était simple : 32 paires de livres, dont l'un des deux était simplement nominé pour un prix, alors que l'autre l'avait remporté.
« Nous avons découvert que, dans le monde littéraire, remporter un prix prestigieux semble aller de pair avec une baisse significative des notes de qualité perçue », explique Amanda Sharkey. Et selon les chercheurs, tout devient évident quand on prend en compte le fait qu'un prix littéraire augmente notablement le nombre de lecteurs d'un ouvrage. Et donc la pluralité des humeurs, des goûts… et des attentes, pourrait-on ajouter.
Un échantillon plus large de lecteurs s'intéresse à l'ouvrage récompensé, non par intérêt pour le livre en lui-même, mais pour le simple fait qu'un prix lui a été décerné, assurent les chercheurs. Et pour éprouver leur hypothèse, les chercheurs ont mis en place un système de notes prédictives. En se basant sur les notes précédemment attribuées par les lecteurs pour le même genre d'ouvrage, ils ont présupposé la notation de l'ouvrage soumis au jugement des lecteurs, dans le cadre de leur expérience.
Dans le cas du livre nominé, mais non récompensé, les notes prédictives sont équivalentes. En revanche, dès que le titre est récompensé, les lauréats obtiennent des notes bien plus basses. « C'est la preuve directe que les livres récompensés tendent à attirer de nouveaux lecteurs, qui n'auraient pas, sinon, lu et aimé ce type particulier d'ouvrage », estime Amanda Sharkey.
C'est également en comparant des milliers de commentaires d'internautes déposés sur le site Goodreads, au travers de 64 ouvrages publiés entre 2007 et 2011 et récompensés pour moitié, durant cette même période que les chercheurs ont découvert le pot-au-roses. « Nous constatons que les livres primés ont tendance à attirer plus de lecteur suite à l'annonce de la récompense et que les notes des lecteurs pour les livres primés note tendance à diminuer plus abruptement suite à l'annonce de cette décision ». Et ce, en regard donc des titres nominés, mais non lauréats.
Dans un second point, l'étude détaille que l'augmentation de la popularité d'un livre provoque un certain effet rebutant, pour certains lecteurs, chose qui entraînerait des conséquences plus négatives dans les évaluations.
D'après les chercheurs, ces résultats sont probablement applicables à d'autres médias tels que le cinéma, par exemple. « Les types de films qui remportent des Oscars peuvent être très différents de ceux que nous regardons et aimons pendant les neuf mois de l'année au cours desquels les prix ne sont pas décernés », conclut Amanda Sharkey.
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
Commenter cet article