Il fallait s'y attendre : après l'impair modianesque de la ministre de la Culture, les potaches plaisanteries se sont succédé. Et la librairie Delvaux, située à Provins en Seine et Marne a tenu à prendre part aux réjouissances avec un cadeau assez singulier. Voyez plutôt :
Le 28/10/2014 à 16:03 par Nicolas Gary
Publié le :
28/10/2014 à 16:03
Avec l'ouvrage des éditions Pour les Nuls, est jointe une lettre de motivation, qui accompagne une « petite compilation [qui] permettra de pallier un tant soit peu la manifeste incompétence de certains de vos conseillers ». Et d'ajouter :
Si pour des raisons évidentes d'efficacité vous souhaitiez en changer, je me tiens à votre entière disposition : j'ai déjà une petite expérience du conseil, pouvant m'enorgueillir la proposition de loi « tendance à ne pas intégrer la prestation de la livraison à domicile dans le prix unique du livre », qui a engendré la loi « anti-Amazon » et une plus grande pour ce qui touche à la chaîne du livre.
Avec le sourire, le libraire revendique : « On verra si notre Ministre a de l'humour. »
Pas de gouvernement-bashing
Cependant, derrière la plaisanterie de circonstance, voire le bon mot internautique, « il ne s'agit pas de s'en prendre à la ministre de la Culture », et certainement pas de déplorer « que la ministre n'ait pas lu Modiano », nous précise-t-il. Ce que le libraire regrette en revanche, c'est « que personne dans son entourage n'ait été en mesure de lui faire une fiche sur le prix Nobel français de littérature, au risque de l'exposer à l'éventualité d'un discrédit », qui en l'état n'a pas manqué.
« En cette période de perte de légitimité du pouvoir, une pareille mésaventure, c'est catastrophique. Tout ministre a besoin de conseillers efficaces qui leur évitent de perdre la face. N'avoir pas lu Modiano n'est pas un drame, mais, laisser humilier le ministre de la Culture aux heures de grande écoute dans un contexte de perte de légitimité du pouvoir, c'en est un. »
Avant de conclure : « Le but n'est pas de faire du gouvernement-bashing ; juste de rappeler que nous avons cruellement besoin d'être fiers de nos représentants. »
À l'occasion d'un passage sur Canal +, la ministre avait déclaré « sans aucun problème » que les livres n'avaient pas leur place dans son emploi du temps chargé, et ce depuis deux ans. Mais surtout, et c'est là que la polémique avait décollé, elle n'avait pas su donner le nom d'un seul titre de Modiano, couronné du Nobel de littérature, après un tweet où elle exprimait sa « profonde admiration ».
Bernard Pivot afichait une certaine tolérance, interrogé par l'AFP : « J'aurais préféré qu'elle soit incollable sur Modiano mais ce n'est probablement pas quelqu'un qui lit des romans, c'est probablement une femme qui lit des essais, des livres techniques. Sa curiosité ne se porte pas sur les romans, qu'est-ce que vous voulez qu'on y fasse, c'est comme ça. »
Le prix Goncourt, Tahar Ben Jelloun, était pour sa part bien plus atterré : « C'est triste. J'ai de la peine pour elle, parce que... un ministre des Affaires étrangères n'a pas le temps de lire un roman, il lit des dépêches, mais une ministre de la Culture doit se plonger dans la littérature, ne serait-ce que par devoir politique. C'est pas possible... c'est pas possible qu'on ne puisse pas citer un seul livre de Modiano. C'est pas possible, c'est honteux. Je trouve ça lamentable. »
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