J’ignore d’ailleurs comment vous avez fait, mais l’un des livres de chez Grasset qui nous ont le plus marqués a été justement écrit par Chateaureynaud, L'autre rive, que vous citez en remerciement
Le 22/09/2008 à 11:00 par Clément Solym
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22/09/2008 à 11:00
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Hum… Lolita Pille. C’est en arpentant le net que je vous ai connue. Et si vous me permettez de vous appeler par votre prénom, d’ailleurs, le cas échéant, c’est tant pis, je vous dirai que la toile vous rend manifestement et globalement l’hommage que vous méritez.. Pas à dire, Lolita, vous êtes fichument douée…
Voilà : Syd Paradin – quel mot russe semble s’être tapi sous ce nom ? – est enquêteur pour une obscure brigade de prévention des suicides. Ainsi, sa fonction est d’assurer que le moral de la population, contrôlée par Clair-Monde et son univers de fantasme, de superficialité, de manipulation à ultra vaste échelle de l’univers et des hommes… Le tout au sein de l’hyperdémocratie, une structure politique superpuissante, maîtresse de la destinée des hommes et de leurs passions. Car tout se réduit au contrôle de l’information, sa censure ou son déploiement excessif : la lettre de Poe, tout simplement. Quand l’évidence nous crève les yeux, on en devient aveugle si facilement.
Les obscures forces SPI gèrent les afflux d’informations, les Traceurs pilotent les vies, les multinationales en structurent l’essence. Votre univers, Lolita, cette projection est non seulement juste, mais repose sur trop de marques contemporaines pour empêcher que ne se dessine une trame tragique : notre propre avenir, perdu. La déréliction du crime. De l’ignorance souhaitée par la foule, ardemment désirée. Lolita, vous êtes talentueuse. Brillante et talentueuse. Car vous le saviez, Balzac vous l’a, semble-t-il, soufflé à l’oreille : pas de grande fortune sans grand crime. Alors une question : quel est le vôtre ?
Dans cet univers factice, on peut se loger à moindres frais. À condition de supporter des vagues de publicités permanentes dans son appartement, permettant de payer moins cher de loyer ; un monde dans lequel la rédemption passe par une confession obligatoire, 11 minutes minimum par jour ; une société qui a honte de ses suicidés, si mauvais pour le moral collectif, en dépit des drogues qui annihilent leur volonté, qu’on souhaite les empêcher.
Mais quel monde as-tu créé, Lolita, que celui dans lequel on prive l’homme de sa plus essentielle liberté : celle de choisir l’heure de sa mort ?
En vous lisant, c’est à Dantec que l’on pense en premier. Les paradoxes mystiques et les abîmées philosophico-religieuses en moins. Votre écriture est précise, efficace. Diablement efficace. Si votre Syd est un rebut, il nous attache à sa perdition. Si votre monde nous semble invivable, c’est qu’il est trop proche du nôtre, trop ressemblant, trop possible… Dantec, certes, mais uniquement pour donner une indication au lecteur. Pour le reste, ce monde est celui de l’oppression big brotheresque omnipotente. Il pourrait ressembler à tout autre.
Pourtant, ses particularités, ses indications, tenant à la fois de la science-fiction et de l’anticipation, votre de la simple projection sociologique angoissée – ou lucide ? – tout nous porte dans votre monde. Détestable. Mais incontestable de réalité. Et Blue, cette cruelle lueur d’espoir… C’est pour mortifier le lecteur qu’elle vous est apparue soudainement ? Pour nous porter vers l’idiote idée qu’il peut y avoir une alternative à la manipulation, au détournement, à la bêtise innommable du lavage de cerveau à grande échelle. En même temps, quoi de mieux qu’une femme pour donner des ailes à un homme perdu ?
Lolita, je souhaiterais personnellement vous remercier. Votre livre, outre qu’il m’a permis de ne pas voir passer un aller-retour en train (oui, je lis vite et surtout, je n’ai sauté que quelques pages), m’a vraiment perturbé. Je crois bien que demain, j’irai me procurer vos autres livres. J’ai envie d’en savoir un peu plus sur vous. Et, je vous en conjure, continuez d’écrire…
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Par Clément Solym
Contact : clements@actualitte.com
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