Le 20/04/2019 à 18:57 par Les ensablés
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20/04/2019 à 18:57
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L’écrivain et académicien Georges Duhamel (prix Goncourt 1918 pour son roman Civilisation) entamait en 1920 avec Confession de minuit un cycle romanesque Vie et aventures de Salavin tout entier consacré à un personnage de parfait anti-héros : Louis Salavin. Les éditions de la Belle Etoile ont la bonne idée de ressusciter en format poche ce texte oublié et pourtant majeur par bien des aspects. Ce titre, La confession de minuit, a été classé par Le figaro littéraire comme un des douze meilleurs romans de la première partie du XX ème siècle.
Inconnu, levez-vous !
On est désarçonné en entamant la lecture de cette Confession de minuit. Cette voix, cette patine, ce regard sur les choses, à la fois intériorisé, désenchanté et vertigineux, il nous semble le connaître et l’avoir déjà éprouvé.
Mais où ?
Chez Calet dans Monsieur Paul ? Chez Camus dans L’Etranger? Chez Sartre dans La Nausée ?
Il suffit pourtant de s’assurer de la date de publication de cette Confession de minuit (1920 donc) pour se rendre compte à quel point l’entreprise de Duhamel est puissamment novatrice.
Pour rappel, à la même époque, Colette écrit Chéri, Proust Le côté de Guermantes, Romain Rolland Clérambault. Et même si Mac Orlan fait entrer une nouvelle voix en résonnance dans la littérature - la gouaille populaire - personne n’a encore eu l’audace d’exprimer ce sentiment de grand vide existentiel, de dépossession de soi et de folie menaçante qu’incarne celle de Louis Salavin. Pour pénétrer ce qu’il y a de novateur et de dérangeant dans le livre de Duhamel, il conviendrait plutôt d’aller voir du côté de Kafka. Il n’y aurait guère que chez l’auteur du Procès qu’on retrouverait avec cette Confession de minuit une vraie similitude. Mais les œuvres de l’écrivain austro-hongrois de langue allemande sont encore très loin d’être traduites en français à cette date…
La trame du roman est très simple. Presque inexistante. Louis Salavin est un petit employé, un gratte papier qui sitôt son travail accompli rentre chez sa mère où il habite rue du Pot-au-fer sur la colline de la Contrescarpe. Louis avoisine les 30 ans. Il n’a pas de fiancée. Il n’a pas d’ambition. Il n’a qu’un seul ami, Octave Lanoue, qui vient de se marier avec Marthe et d’avoir un enfant dont Louis est le parrain. Mais quand ils se voient, les amis n’ont pas grand-chose à se dire. Pour Octave, la banalité des jours est toute naturelle. Pour Louis elle est une sourde angoisse.
Un jour, alors que rien ne prédisposait à ce geste, Louis Salavin, sans aucune retenue, se met à vouloir embrasser l’oreille de M. Sureau, son directeur. « Pour mille raisons que j’entrevoyais confusément, il me devenait nécessaire de toucher l’oreille de M. Sureau, de me prouver à moi-même que cette oreille n’était pas une chose interdite, inexistante, imaginaire »
Pour absurde qu’il soit (le mot est lâché), ce geste irrépressible et décalé va avoir de graves conséquences pour Louis. Il perd sur le champ son emploi. Durant des mois, Louis paresse sur son canapé en consumant ses après-midis, au mieux il parcourt Paris en tous sens à la recherche d’un hypothétique travail auquel il ne croit plus.
Syndrome d’Oblomov ? Portrait d’un Anti-héros ?
Fondamentalement Louis est un anti-héros. Mais sa spécificité dépasse ce cadre. En effet, bon nombre d’anti-héros existent en littérature. On les reconnaît car les raisons de leur inaction est identifiable. C’est parce que Charles Bovary est au fond un brave type mal dégrossi qu’il ne voit pas les écarts d’Emma ; c’est parce que Fabrice del Dongo est resté un enfant rêveur et naïf qu’il ne comprend rien à la bataille de Waterloo qui se joue sous ses yeux. Pour Louis Salavin, les choses sont très différentes. Cet anti-héros-là ne semble dupe de rien. Hyperconscient de son rapport problématique, voire déviant au monde, sa souffrance n’en est que plus vive.
En vérité, Salavin est assez intelligent pour savoir que c’est son intégrité psychique qui est en jeu. Il s’en ouvre un soir dans un bar à un inconnu à qui il livre sa confession. C’est du reste cette confession que nous lisons. Le mal de Louis est sans cause objective. Sans cause objective comment pourrait-elle être soignée ? Tournent dans sa tête des désirs pulsionnels : mort de sa mère, viol de la femme d’Octave, rêves scabreux. Montent parfois en lui de grands soubresauts de générosité. Soudain, il voudrait aimer tout le monde. Louis est incontrôlable. Sa vie est un enfer. Son mal est incurable.
C’est devant la racine d’un arbre (exactement comme le Roquentin de Sartre dans La Nausée !) que Salavin prenant conscience péniblement de son état peut enfin le décrire : « Moi, je ne sais pas me choisir. Trouver pensée qui voyage retrouve asile en mon âme. Toute graine qui tombe sur mon être y peut germer. Où suis-je là-dedans ? Qui suis-je dans cette foule ? Peut-il y a avoir du bonheur pour moi entre ces mille démons ennemis ? ».
Et plus loin : « ce n’est pas ma faute, je ne suis pas le maitre ». Voici une phrase très étonnante. Ne fait-elle pas écho à celle de Freud qui deviendra célèbre : « Le moi n’est pas maître dans sa propre maison » (dans Introduction à la psychanalyse - 1921). Le médecin viennois qui vient de donner le coup d’envoi de l’aventure psychanalytique dévoile que la conscience n’est qu’une infîme partie du psychisme. L’homme est à lui-même son propre mystère. En termes littéraires, les surréalistes et dadaïstes auront fait leur miel de cette révélation en recouvrant le monde de la représentation de tout un décorum de l’imaginaire que l’on retrouve chez Nadja ou dans le Paysan de Paris. Rien de tout cela chez Duhamel. Son héros Louis Salavin garde les pieds sur terre. Il n’est pas un poète. C’est un homme du commun. Mais sa faille, toute commune soit-elle, n’en est que plus ample dans sa béance. Il nous fait accéder à un désarroi universel qui va marquer la littérature de l’après-guerre avec le sentiment de l’absurde. Ce sentiment d’inutilité de l’homme à trouver un sens à son existence et sa confrontation à un monde qui lui échappe, Louis Salavin en est certainement un des pionniers littéraires. Il veut escalader une montagne qui se dérobe sous lui. Voici chez ce petit homme si banal d’aspect et presque terne et au cœur d’une œuvre méconnue, toute l’histoire du XX ème siècle qui est préfiguré.
Denis Gombert
nota.bene - La photo de la couverture est de Willy Ronis
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En 1905, Camille Mauclair (1872-1945), sentit qu’avec le fauvisme et le début du cubisme en 1905, apparaissait un nouveau paradigme, auquel il était incapable en tant que critique de donner une réponse. Et cette incapacité signa la rupture de Mauclair avec l’art moderne. En 1931, il écrira un ouvrage critique sur le Greco, dont l’originalité le confrontera à nouveau au problème de la rupture de la tradition dans l’art pictural. Cet article paraît en deux parties. La seconde est programmée pour la semaine prochaine. Par Antoine Cardinale
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Les vacances sont là, et pour ceux qui aiment ou ne connaissent pas Antoine Blondin (il aurait cent ans cette année...), l'occasion rêvée de (re) découvrir ses chroniques publiées entre 1943 et le début des années 80. Les éditions de La Table Ronde ont eu la bonne idée de les rééditer dans sa collection "La petite Vermillon. Pour un prix modique (11,2 euros), un plaisir assuré, à goûter sous les tilleuls en buvant un petit blanc sec, bien glacé, à la santé de ce cher Blondin pour qui la littérature était exigence mais aussi amitié. Hervé BEL
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Dans ces temps de résurgence de nationalismes, chauvinismes et prurits identitaires, la littérature nous offre heureusement quelques pépites à leur encontre… Figure en bonne place parmi ces romans salutaires une œuvre qui obtint un franc succès juste avant le deuxième guerre mondiale : refusé par Gallimard, publié par Denoël, le roman «Les Javanais» fut couronné du prix Renaudot en 1939 et traduit en plusieurs langues. Par Marie Coat
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Sur la plaine de la bataille de Waterloo, une aigle impériale trône au sommet de la butte monumentale. Le 18 juin 1815, c’est Napoléon qui a remporté cette victoire décisive. Plus d’un siècle après les faits, le descendant d’un capitaine anglais est résolu à corriger l’erreur de son ancêtre, qui avait donné de mauvaises informations à Wellington et précipité la défaite des Alliés. L’invention d’une machine à remonter le temps lui permet de tenter une modification avec ses amis, mais à quel prix et pour quelles conséquences historiques et humaines ? Par Louis Morès
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Spécialiste du Portugal où elle a vécu une bonne partie de sa vie, Suzanne Chantal (1908-1994) a notamment publié une Histoire du Portugal (Hachette, 1965), que précédait La vie quotidienne au Portugal après le tremblement de terre de Lisbonne de 1755 (Hachette, 1962). Vers la fin de sa vie, elle publiera un roman historique (Ervamoïra, éd. Olivier Orban, 1982), qui raconte, autour de l’évolution d’une famille sur six générations, l’histoire du vin de Porto, avec ses luttes, ses négociants, ses propriétaires, etc. Par François Ouellet
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C’était il y a peu dans le 6ème arrondissement, un samedi, jour béni entre tous puisque le dimanche nous protège encore du lundi. En passant devant la librairie « Le dilettante », maison d’édition dont les Ensablés affectionnent les publications, je tombe sur des bacs remplis de livres d’occasion. L’un d’eux attire mon attention : « Les enfants aveugles » d’un certain Bruno Gay-Lussac, avec une introduction de François Mauriac. Mauriac? Il fallait que ce roman oublié ait quelque qualité... Alors je l’ai acheté. Par Hervé Bel
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BONNES FEUILLES - Récit au jour le jour de la contestation de 2020 au Bélarus par ceux qui l’ont faite. Alors que le Bélarus est comme figé depuis vingt-cinq ans sous l’emprise d’un régime autoritaire dirigé d’une main de fer par Alexandre Loukachenko, naît un espoir de changement à l’approche de l’élection présidentielle de 2020.
23/03/2023, 09:00
BONNES FEUILLES - « À la lie de la vie / de perfidie en trahison / à la première personne / des vanités pipées / le regard menteur / du sourire ravageur / espoir de feuille morte. » Dans le courant des vers libres, sans ponctuation ni majuscule, des poèmes se succèdent.
23/03/2023, 08:00
BONNES FEUILLES - « Si tu veux savoir une certaine chose et que tu ne puisses y parvenir par la méditation, je te conseille, mon cher et judicieux ami, d'en parler avec le premier homme de ta connaissance que tu rencontreras. Il n'est pas nécessaire que ce soit un esprit subtil ; il ne s'agit pas non plus de l'interroger sur ce qui t'occupe : non ! C'est toi qui dois plutôt commencer par lui conter ton affaire. »
22/03/2023, 19:12
Les chants des ferrailleurs de Gabriel Boksztejn (publié aux éditions unicité) se présente comme une position tenue face au monde doublée d’une tentative (tentation ?) de le respiritualiser. Voire de le « ré-angéliser » à travers ce qui n’est rien moins qu’une mini-épopée sociale. Par Pierre Cormary.
22/03/2023, 09:46
BONNES FEUILLES - « Ils sont peu nombreux, ceux qui ont le courage de transgresser l’interdit et de se comporter comme l’un des patriarches de ma discipline, Leo Spitzer, qui, un jour, comme un ami le trouvait assis à son bureau et le saluait de ces mots : 'Tu travailles ?', eut cette réponse digne d’être méditée : 'Moi, je travaille ? Mais non, je jouis !' »
22/03/2023, 09:00
BONNES FEUILLES - Naïri Nahapétian a vu sa vie basculer à l’âge de 9 ans, au moment de la révolution islamique en Iran. Elle quitte Téhéran pour Paris avec sa mère, pensant revenir quelques semaines plus tard. Mais l’exil dure. Et son père ne les rejoint pas.
22/03/2023, 08:00
BONNES FEUILLES - Le seul « cold case » d'Agatha Christie n'est pas dans son œuvre, mais dans sa vie. Tout semble avoir été écrit sur ces 11 jours mystérieux. Pourtant, Nan O'Dea, l'autre femme, a sa propre version de l'histoire. - Un roman d'amour, de meurtres et de mensonges.
21/03/2023, 09:00
BONNES FEUILLES - Charif Majdalani est passionné par les mélanges culturels et les identités plurielles, dans toute leur richesse, drôlerie et complexité. Il nous fait part de ses réflexions sur ces sujets alors qu'il revient d'un voyage lointain et qu'il survole de nombreux lieux qui le font rêver, avant d'atterrir à Beyrouth, sa ville, son lieu de vie, si emblématique de ces carrefours de populations.
21/03/2023, 08:00
BONNES FEUILLES - Une vaste fresque romanesque qui fait revivre les rivalités, les engagements, les innovations d'un mouvement artistique révolutionnaire, l'expressionisme abstrait, emmené par la personnalité fascinante de Jackson Pollock.
20/03/2023, 19:37
BONNES FEUILLES - D'Astérix à Louise de Vilmorin, ce dictionnaire rassemble les personnalités françaises qui ont fait du panache une ligne de vie. Une balade buissonnière dans l'histoire de France, menée avec un style unique.
20/03/2023, 19:31
Kiwa peine à trouver un emploi, au grand désespoir de sa petite amie. Mais il possède une carte maîtresse – quand il souhaite sincèrement quelque chose, il est toujours exaucé. Sauf qu’à chaque fois, il y a une contrepartie à payer… Kiwa osera-t-il jouer le tout pour le tout ? Les conséquences risquent bien de le dépasser.
20/03/2023, 14:47
BONNES FEUILLES - À quoi sert la science-fiction dans un monde en mutations permanentes ? À traiter, sans aucun doute, des sujets contemporains en changeant le paradigme de la réalité et, par le truchement de nouvelles règles, nous apporter un regard nouveau sur un sujet donné.
18/03/2023, 08:30
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