Il est étrange que la littérature croise le chemin du communisme qui fut l’ennemi déterminé de toute libre expression artistique là où le malheur des temps le conduisit à s’imposer à un pays.
Le 22/03/2015 à 09:21 par Les ensablés
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22/03/2015 à 09:21
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Loys Masson ( 1915-1969) succomba en son temps au « charme universel d’Octobre » pour citer François Furet. Il est vrai que ce fut à un moment où cela exposait ( 1942 ) et qu’il s’en écarta en 1948 lorsqu’Aragon, qui n’avait alors guère d’états d’âme, le contraignit à quitter Les Lettres Françaises sans doute pour manque de discipline de parti. Et puis Masson était resté chrétien et les contradictions n’ont parfois qu’un temps. Dès lors, Masson se consacra à la littérature et on ne peut que s’en réjouir. Masson était mauricien, d’une famille d’origine française, qui se tourna vers la France où se déroula l'essentiel de sa vie.
Par Henri-Jean Coudy
"Le Notaire des Noirs" (prix des Deux Magots), paru en 1961, est un titre qui indique d’entrée une tragédie. Être le notaire des noirs à l'île Maurice, dans une société où les distinctions de classe recoupent les distinctions ethniques c’est avoir rompu les liens avec ses origines et se consacrer à ceux que méprise l’entourage du narrateur. Mais des Noirs, il ne sera question que comme toile de fond sur lequel se déroule un huis-clos dont l’enjeu est la survie d’un jeune garçon. Le narrateur, devenu notaire avec le temps par l’héritage de son oncle, se souvient. Il y a d’abord son oncle, Emile Galantie, notable francophone, notaire donc, qui, dans cette société post-coloniale tient à son rang ; et il y a Marthe, son épouse, de longue date avec laquelle il n’échange plus que phrases acrimonieuses lorsqu’ils se parlent encore. Emile et Marthe n’ont pas eu d’enfants malgré leur désir, et cette absence les a rongés jusqu’à ce qu’une haine commune leur permette de continuer leur existence conjugale. Il y a leur neveu, celui qui parle, qui travaille avec son oncle et qui est désigné pour sa succession puisque l’étude doit continuer dans la ligne de la famille ; il est célibataire et sans enfant. Mais il y a André, qui a sept ans, confié par un père, autre neveu du notaire et cousin de piètre réputation, contraint à l’exil pour Madagascar par des malversations et des dettes. Le narrateur tient André pour son fils ; seulement voilà, André est sûr que son père reviendra, et pas dans n’importe quelle circonstance ; ce père ne lui a-t-il pas confié : « Nous ferons la révolution ensemble, ce sera merveilleux…Tu viendras partout avec moi. Je dirai aux noirs : c’est mon grand fils… ».
Dès lors, le jeune garçon ne rêve plus que du jour où un bateau venu de Madagascar le lui ramenera , dans la tempête révolutionnaire. Il y a aussi le capitaine Bruckner, capitaine de vague caboteur mais qui se fait passer pour un marin de grande expérience auprès du jeune garçon et qui s’attribue la connaissance de son père qu’il n’a sans doute jamais rencontré ; André voit Bruckner avec les yeux du merveilleux ce qui exaspère le narrateur qui pourrait, pourra facilement démasquer l’imposteur ; d’autant plus qu’il est l’amant de l’appétissante jeune femme de Bruckner, Aline. Beaucoup plus loin dans la vie, il aura du mal à comprendre qu’il ait pu la désirer tant le temps aura détruit sa beauté. En l’attente, « Elle aime par sursauts ; je me dis que c’est à la manière des bêtes et cela ajoute à mon besoin d’elle ». C’est dans l’espace confiné de la maison Garandie, où il n’existe plus beaucoup de raisons de vivre, sinon de tenir son rang symbolique et matériel, que se joue l’existence de cet enfant. Difficilement. Le vieux notaire ne veut pas exposer les frais nécessaires à la mise à l’école catholique d’André qui aurait le mérite de lui donner un cadre adapté à son âge ; les histoires du capitaine Bruckner prennent un coup le jour où le narrateur, jaloux, l’oblige à avouer à André que la corne de narval qu’il a chez lui n’est pas une dent de baleine arrachée à la mer mais un objet acheté en boutique ; comme le reprochera Bruckner, très amer, au narrateur : « Il aurait fallu … que la « Dent de Baleine » restât la preuve qu’il y avait un fabuleux et fraternel océan où avait vogué un fabuleux capitaine Bruckner. On n’accepte pas facilement de mourir quand on a un trésor devant soi".
Loys Masson
La vague de l’explosion sociale arrive pourtant avec la destruction de la récolte de canne à sucre par les aléas du climat ; la famine est là qui menace, en premier lieu, la population des ouvriers agricoles, les noirs ; des manifestations, la police qui tire, des morts, est-ce la révolution, est-ce le retour du père d’André ? Et s’il ne revient pas, par où passera le destin d’André dont la santé vacille, par l’adoption par son grand-oncle et sa grande-tante, soudain devenus parents ? Par les victoires dans les combats d’un coq déniché par Bruckner et offert à l’enfant ? « Je revois le coq, très haut sur pattes, avec des ergots courts mais épais, son jabot nu et comme granuleux, qu’on frotte avec du rhum tous les deux jours pour le rendre plus résistant. » Mais les combats de coq sont bien incertains… Et n’y a-t-il pas la menace du cousin Louis, autre neveu du notaire, dont il guigne l’héritage et qui pourrait bien révéler la vraie nature du père d’André ? Le narrateur réussira-t-il à protéger celui qu’il regarde comme son enfant ? La langue de Masson ressemble à de vieux meubles créoles, polis par le temps et la cire : « Vieilles , vieilles eaux. Que gagne-t-on à les remuer ? L’oiseau-de-la-vierge niche dans le jacaranda et ramène la jeunesse au monde. Mais non pas la mienne. Elle fut trop brève pour jamais ressusciter. Elle se consuma en un éclair ; je vécus de laves froides » ; ainsi soliloque le narrateur, devenu notaire, mais ayant perdu ses clients blancs, pour s’être rapproché d’un mouvement local aux orientations qui troublent les riches propriétaires de l’île, notaire des noirs donc.
Le Notaire des Noirs a été réédité aux éditions André Dimanche en 2000 ; nous devons à Eric Dussert de l’avoir découvert qui lui consacra une chronique dans Le Matricule des Anges et lui attribue à juste titre « un talent singulièrement puissant ». Nous avons hâte de lire « Les Tortues » qui le fit connaître en 1956.
Par Les ensablés
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Lorsque la critique d’un livre est aussi intéressante, voire plus, que le livre dont elle parle, lorsqu’on se régale de son style, de son ironie, de sa drôlerie, et si transparaît à travers ses mots l’originalité de l’homme lui-même, alors on peut se dire qu’elle est elle-même œuvre littéraire, et que son auteur est un sacré bonhomme. Voilà la réflexion que je me suis faite après la lecture de ce recueil d’articles de Frédéric Berthet, récemment paru chez La Table Ronde sous le titre L’Impassible. Par Hervé BEL
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Happe-Chair, un titre qui a tout de suite attiré mon attention. Je me trouvais alors dans une des dernières librairies anciennes de la rue Saint-Sulpice (pour combien de temps encore sera-t-elle là ?), dans la bonne odeur des vieux livres, lorsque je suis tombé sur la réédition de 1908 de ce roman de Camille Lemonnier publié une première fois en 1886 chez Kiestmaeckers… par Hervé Bel.
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À l’occasion du centenaire de sa mort, la collection Bouquins consacre un volume à Jacques Rivière, critique et essayiste, véritable cheville ouvrière de la Nouvelle revue française dont il assura la direction durant plus de 10 ans. Mort prématurément en 1925 à l’âge de 39 ans, celui qui fut à la fois le grand ami et le beau-frère d’Alain Fournier, l’auteur du Grand Meaulnes, révèle par la quantité d’articles qu’il donna à la revue une perspicacité critique étonnante. Sensuelle et inspirée. Par Denis Gombert
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Le monde des livres sous l’Occupation a déjà été étudié par l’historien Jacques Cantier qui s’était intéressé à la trajectoire de l’une des figures maudites des lettres françaises avec sa biographie de Pierre Drieu La Rochelle (Perrin, 2011). Cette fois, avec Lire sous l’Occupation, publié en 2019 et en poche en 2024 aux Éditions CNRS, il nous présente un panorama global de la lecture entre 1939 et 1945. , par Nicolas Acker.
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En mars 2023, Gallimard publiait dans sa collection L’imaginaire un grand succès de son catalogue paru en 1929, réédité à huit reprises puis repris en 1934 dans sa collection de poche : La femme qui boit », première oeuvre d’une jeune femme de 29 ans, Pauline Toutey. Par Marie Coat
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Jean Meckert (alias Jean Amila, 1910-1995) est mort il y a trente ans… Pas tout à fait mort, car ses romans ont continué d’être réédités et nous n’avons pas manqué d'en parler dans nos colonnes (1). Cette fois, c’est la courageuse Ronces éditions (2) qui republie Le boucher des hurlus paru chez Gallimard en 1982 et signé du nom Jean Amila qu’il avait adopté pour ses romans publiés dans la Série Noire. Par Hervé BEL
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Fille de José Marie de Heredia, épouse du poète Henri de Régnier, Marie de Régnier n’eût peut-être d’autre choix que de devenir une femme de lettres. Mais en adoptant un nom d’homme tout de même, société corsetée oblige ! C’est ainsi que Marie de Régnier entama très tôt une carrière littéraire au confluent de deux siècles, à la période de la Belle Epoque, sous le nom de de Gérard d’Houville, puis de Gérardine (la renommée de Caroline Rémy, dite Séverine, étant peut-être passée par là). Par Denis Gombert.
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On ne pouvait pas laisser s’achever cette année 2024 sans célébrer les cent ans d’un des chefs-d’œuvre romanesques du XXe siècle. Des chefs-d’œuvre, la littérature française en a produit son lot, et les centenaires à venir ne manqueront pas : en 2026, ce sera Les Faux-monnayeurs, en 2032, Voyage au bout de la nuit, en 2038, La Nausée, etc. Mais les auteurs ensablés aussi ont leurs grands et petits chefs-d’œuvre, dont certains ont été chroniqués ici même : L’Enfant à la balustrade, Les Javanais, par exemple. Et maintenant Mes Amis d’Emmanuel Bove : avis à ceux qui ne l’auraient pas encore lu. Par François Ouellet.
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La vie de Paul Gadenne (1907-1956) a été marquée par l'épreuve de la maladie qui le contraint à abandonner une prometteuse carrière de professeur de lettres classiques et à séjourner périodiquement au sanatorium de Praz-Coutant, en Savoie (cadre de son premier roman « Siloé », objet d'un précédent article). Paul Gadenne termina ses jours à Cambo-Les-Bains, station thermale du pays basque reconvertie dans les années 30 en centre de cure pour les tuberculeux. Par Isabelle Luciat.
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On ne lit plus Octave Feuillet (1821-1890), auteur à très grand succès du Second Empire et favori de lˊImpératrice Eugénie ; seul son nom sur la plaque bleue dˊune rue tranquille et banale du XVIème arrondissement, où habitaient de bons amis, m’a un jour rendu curieux de le connaître.
Les titres de ses romans ont l’odeur des armoires à linge bourgeoises, encaustique et lavande : « La Petite Comtesse » (1856), « Histoire de Sybille » (1862), « Julia de Trécoeur » (1872), voire réminiscents de la Comtesse de Ségur « Le Roman dˊun jeune homme pauvre » (1858)… Par Herbert Dune.
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Après la réédition du chef-d’œuvre Campagne (prix Femina 1937) dont même Le Monde s’est fait largement l’écho en 2023, les éditions Le Passeur republient aujourd’hui Élisabeth, troisième roman de Raymonde Vincent. Comme Marguerite Audoux (voir notre article sur Marie-Claire), elle fut un phénomène littéraire, s’avérant capable d’écrire un grand livre aussitôt remarqué et publié, alors qu’elle avait été illettrée pendant toute son enfance. Par Hervé BEL.
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13/11/2025, 08:00
François Iᵉʳ appartient à ce petit panthéon de figures qui structurent l'Histoire traditionnelle de la France - aux côtés des Jeanne d’Arc, Louis XIV et autres Napoléon. Quelques mots suffisent à convoquer le roman national : Marignan, Pavie, Blois, Chambord, Fontainebleau… et, bien sûr, Léonard de Vinci serré dans les bras du roi mécène.
12/11/2025, 18:29
Le nouvel opus de Criminal, intitulé Les Acharnés, s’ouvre sur Jacob Kurtz, ancien dessinateur de bande dessinée, qui quitte sa ville natale pour Hollywood. Son œuvre culte, Frank Kafka, le privé, va être adaptée en série télévisée : rêve de reconnaissance ou descente aux enfers ? Dès son arrivée, le vernis des plateaux craque : entre producteurs cyniques et compromis artistiques, Jacob découvre un univers d’illusion où tout se monnaie — les droits d’adaptation comme les âmes.
12/11/2025, 12:25
Naguère, à sa demande à elle, il l’avait guidée au sommet de cette montagne des Alpes. Ensemble, ils avaient cheminé et depuis le haut, ils avaient scruté les paysages, ceux qui s’ouvraient et ceux qui, tapis au-delà des horizons, aiguisaient leur conscience du monde. Et puis elle était repartie dans son pays. Le voici de retour sur ces pentes, seul cette fois.
12/11/2025, 08:00
Sigisbée : chevalier servant d’une dame, choisi par son mari, qui s’engage à l’assister et à l’accompagner en toutes circonstances, palliant ainsi les absences, ou parfois l’indifférence, de celui-ci. La pratique est courante dans l’Italie du XVIIIe siècle.
12/11/2025, 07:00
Dès son arrivée à Parme, un écrivain français qui tente de trouver l’inspiration en Italie, s’installe à la terrasse du mythique Gran Caffè Cavour. Là, un homme à la silhouette étrangement familière lui sourit. Il jurerait que c’est cet écrivain américain flamboyant et sulfureux dont il révère l’œuvre. Le souci, c’est que l’écrivain en question, Nick Tosches, est mort depuis deux ans ! Déstabilisé, le Français cherche à comprendre.
11/11/2025, 09:00
Les Hauts de Hurle-Vent est le chef-d’œuvre unique d’Emily Brontë, romancière et poétesse anglaise née en 1818 et morte en 1848 dans le Yorkshire. Elle y a grandi entourée de paysages sauvages, qui ont profondément marqué son imaginaire et imprégné toute son œuvre. Publié pour la première fois en 1847, ce roman s’impose comme un monument de la littérature romantique et gothique.
11/11/2025, 08:00
C’est la fin de l’année scolaire au lycée Tanmiya de Laâyoune, au cœur de la colonie marocaine du Sahara occidental. En cette fin de juin, Daha et ses camarades de classe, sahraouis comme lui, assistent au dernier cours de l’année. C’est le moment que choisit leur professeur d’histoire, contempteur des revendications d’indépendance sahraouies, pour une ultime humiliation. Pour Maalouma, jeune militante déterminée, cette injure impose un acte de protestation.
11/11/2025, 07:00
Au sujet de Schopenhauer, Nietzsche parlait d’un « discours droit, rude et bienveillant ». Le visage du philosophe ronchon est bien connu, parfois son Art d'avoir toujours raison, ou quelques anecdotes sur son caractère de cochon, mais qui est arrivé au bout de son pavelard, Le Monde comme volonté et comme représentation ?
10/11/2025, 18:12
Positano est un village de pêcheur en Italie où débarque une jeune archéologue nautique qui doit effectuer des recherches sur des épaves de bateaux mystérieusement échoués. Il existe une légende qui raconte que des sorcières de la mer protégeaient le village des attaques de pirates par des incantations qui modifiaient les eaux en créant des tempêtes.
10/11/2025, 11:52
Si vous êtes curieux, ce livre est fait pour vous et comme vous lisez régulièrement nos articles, c’est que vous l’êtes donc, au risque de me répéter, ce livre est fait pour vous. Il est donc primordial de vous l’offrir, ou de vous le faire offrir voire de l’offrir, la période qui arrive est justement propice à cela et ça tombe très bien. Les éditions Armand Colin viennent de publier L’Esprit d’aventure. Explorations et curiosités de l’histoire du monde du géohistorien Christian Grataloup et superbement illustré par Lionel Portier.
10/11/2025, 10:53
Cette semaine, le classement des meilleures ventes d’Edistat (du 27 octobre au 2 novembre) ressemble à une radiographie politique et culturelle du pays. On y retrouve la France qui rit, la France qui s’inquiète, la France qui fulmine - et la France qui se replie. En attendant les conséquences des grands prix de l'automne, en commençant par le Goncourt.
07/11/2025, 11:44
Quatrième épisode en compagnie du fameux trio d'enquêteurs piémontais imaginé par Davide Longo, la dernière star du polar italien. Cette lecture est une véritable gourmandise à savourer avec un verre de grappa : Règlement de comptes, traduction de l'italien par Marianne Faurobert (JC Lattès).
07/11/2025, 08:45
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