À l'occasion de la journée internationale des droits des femmes, l'Observatoire de l'égalité entre femmes et hommes dans la culture et la communication a publié son quatrième rapport annuel sur le sujet, pour l'année 2015. Si quelques progrès sont à souligner, il ne fait toujours pas bon être une femme dans le domaine de la culture et du livre, que ce soit au niveau des récompenses ou de la présence dans les manifestations.
photo d'illustration (Tom Magliery, CC BY-NC-SA 2.0)
Le rapport d'une cinquantaine de pages, assez détaillé, passe en revue la présence et la rémunération des femmes au sein de l'administration et des organismes sous tutelle du ministère de la Culture et de la Communication, ainsi que dans les différents secteurs culturels et artistiques. Cette synthèse est coordonnée et réalisée par le Département des études, de la prospective et des statistiques (DEPs) du ministère de la Culture. « Au 1er janvier 2016, les inégalités entre les femmes et les hommes sont encore, hélas, bien présentes », note d'emblée le rapport.
En tant qu'organismes publics, les services du ministère de la Culture et de la Communication se doivent d'être exemplaires dans la place qu'ils accordent aux femmes : on s'en rapproche doucement, avec 45 % pour les postes de directeur.rice.s d’administration centrale et chef.fe de l’inspection générale (en augmentation), et 42 % pour les Directions régionales des affaires culturelles (DRAC). Ce chiffre est en baisse, mais le rapport l'attribue à la réforme territoriale et aux suppressions de poste liées. En revanche, les postes d’encadrement d’administration centrale (hors postes de directeur.rice.s) confiés à des femmes sont en baisse, à 41 % contre 52 % en 2014.
La part des femmes aux postes de direction des services à compétence nationale connaît une légère hausse, de 28 à 32 %. Même constat pour les établissements publics, aussi bien pour leur direction que pour leur masse salariale : les femmes sont un peu plus présentes. Dans le détail, cependant, les postes au sein de la direction des établissements publics connaissent un recul dans la place qu'ils font aux femmes.
Si la place des femmes devient globalement plus importante, on note malgré tout que la parité est encore loin dans les instances de direction. À l'inverse, le rapport de l'Observatoire se félicite d'une parité atteinte dans les conseils d'administration de ces établissements publics (51 % de femmes contre 38 % en 2014).
Les données de 2014 et de 2015 n'étant pas disponibles, le rapport renvoie aux chiffres 2013 pour les commissions et instances consultatives placées directement auprès du ministère de la Culture et de la Communication en 2013 : la parité était alors loin d'être atteinte, puisqu'on comptait 29 % de femmes, au total.
Les théâtres nationaux (Odéon, Strasbourg, Chaillot, La Colline, mais aussi la Comédie Française sont tous dirigés par des hommes.
L'exception, au niveau des commissions des établissements publics, provient du Centre National du Livre, dont le président est Vincent Monadé : « la part des femmes y a nettement progressé par rapport à 2013, passant de 41 % à 51 % », se félicite le rapport. Bien sûr, toutes les commissions ne proposent pas une parfaite parité, mais le mouvement d'ensemble est là.
Sur le plan de la fonction publique, l'Observatoire relève « une inégalité entre les primes des femmes et des hommes pour les catégories A et C, ainsi qu’une parité salariale pour les catégories B. L’analyse par corps permet d’affiner ce constat : à l’exception des professeures dans les écoles nationales supérieures d’art et d’architecture, des chargées d’études documentaires et des assistantes-ingénieures, les femmes des catégories A reçoivent moins de primes que les hommes à niveau indiciaire comparable. » Attention, ce constat est valable pour l'année 2013 uniquement.
Au sein du secteur culturel et artistique, l'édition se distingue en offrant le plus de perspective pour les femmes à la direction des 100 plus grandes entreprises culturelles de l'industrie. Néanmoins, ce chiffre plafonne à... 9 %. Selon les données de l'Observatoire, on compterait 4 femmes à des postes de direction, contre 39 hommes, pour les 43 sociétés examinées dans le domaine du livre, de l'édition et de la presse.
Si le Centre National du Livre peut se targuer d'une parité atteinte au niveau des commissions, la répartition des aides, elle, semble plus problématique : « les femmes représentent 43 % des demandeurs et 43 % des bénéficiaires d’aide » aux auteurs et traducteurs, note le rapport, et les montants des aides accordées sont inférieurs de 19 % à ceux des aides accordées aux hommes.
Par ailleurs, un examen effectué en 2012 des femmes présentes sur les 12 salons les plus subventionnés par le CNL montre un fort déséquilibre entre femmes et hommes : il serait bon d'actualiser les données pour constater les évolutions depuis cette année, d'autant plus que ce sont lors de ces événements que le grand public est en contact avec les auteurs.
Un sort est également fait aux prix littéraires : la période prise en compte s'étend de 2010 à 2015, ce qui empêche toute comparaison d'année en année, mais un certain progrès se détache. Il faut dire que cet aspect est particulièrement surveillé, notamment par le collectif La Barbe qui, chaque année, rappelle que les femmes sont sous-représentées, aussi bien dans les jurys que dans les résultats des prix littéraires.
Enfin, le rapport se tourne vers l'emploi, la formation et la rémunération dans les professions culturelles. La part des femmes dans les formations, puis dans les professions littéraires, auteurs, traducteurs et cadres de l'édition est globalement satisfaisante, et fait état d'une présence souvent majoritaire. Néanmoins, la situation se corse évidemment lorsque l'on évoque les salaires au sein des entreprises culturelles.
Les écarts de salaires sont ainsi toujours présents, et, pire, ils augmentent avec l'âge des salariés : ainsi, la différence entre le salaire d'un employé de 50 ans et celui d'une employée de 50 ans est de... 25 %. Ces statistiques datent de 2013 également, et recouvrent toutes les entreprises culturelles.
Les droits d'auteur sont évoqués en fin de rapport, mais celui-ci ne cite pas le secteur du livre et de l'édition. Pour se faire une idée des inégalités à ce niveau, on pourra se référer à notre article sur le sujet.
Rapport 2016 de l'Observatoire de l'Égalité entre les femmes et les hommes dans la culture et la...
Par Antoine Oury
Contact : ao@actualitte.com
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