ReadMyBook est une toute nouvelle maison d’édition numérique fondée par deux amis et officiellement lancée au mois de janvier. Face à la difficulté des auteurs à publier leurs textes par le biais des éditeurs papier, ReadMyBook a pour objectif de redonner une chance à ces écrivains dont les manuscrits se font refouler sans ménagement. Elle veut ainsi offrir aux lecteurs la chance de lire des textes de qualité à des prix qui défient toute concurrence. Le premier roman disponible sur la plateforme, Match, a été écrit par Suzanne Galéa et publié le mois dernier. ActuaLitté s’est entretenu avec Audrey Cornu, la présidente et cofondatrice de la maison qui tient à préserver une petite structure.
Le 18/07/2016 à 17:53 par Joséphine Leroy
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18/07/2016 à 17:53
Cela fait plus d’un an que l’idée de fonder une maison d’édition germe dans l’esprit des deux cofondateurs de ReadMyBook, Audrey et Christophe. Tout est parti d’un sentiment de gâchis : « Nous trouvions cela dommage de voir qu’il était si difficile de se voir éditer par des éditeurs papier. Parfois, un manuscrit peut être refusé pour de mauvaises raisons. Si l’on ne reçoit pas que de bons manuscrits, les critères de refus ne sont pas toujours objectifs. Cela peut être dû au fait que deux romans se ressemblent et que l’on en élimine, ou alors une question de période. » L’un dans l’autre, un bon livre peut être d’emblée condamné par ce refus : « Beaucoup d’auteurs de talent cachent leurs manuscrits dans un tiroir, alors que les textes sont intéressants. »
Les deux cofondateurs ont un parcours assez similaire : « J’ai travaillé trois ans dans un cabinet d’audit, après avoir étudié dans une école de commerce. J’ai vite arrêté parce que ce n’était pas le genre de vie que je voulais. Je suis partie au Louvre et là, j’étais dans un secteur qui me plaisait, la culture. J’ai rencontré beaucoup de personnes intéressantes. Ensuite, en parallèle, j’ai commencé à faire du théâtre, d’abord en amateur puis j’ai suivi une formation professionnelle sur quatre ans. Je travaille actuellement sur un projet de pièce. Le cofondateur a un peu le même profil que moi.
Nous nous connaissons depuis plusieurs années. Il a fait une école de commerce, de l’audit aussi et travaille à l’Autorité des Marchés Financiers. Sur son temps libre, c’est aussi un passionné de lecture et d’écriture. » Dans l’un et l’autre cas, la passion pour la lecture a toujours été constante. « Nous n’avons pas des profils qui cadrent et la diversité des lecteurs correspond assez à cet esprit. »
L’équipe de ReadMyBook est réduite, mais cohérente : « C’est une toute petite structure. Mais nous n’avons pas envie de publier à la chaîne. On veut garder cette identité de petite structure. Je ne pense pas qu’en publiant vingt livres par an on pourra vraiment être attentif au texte et à son auteur. » L’équipe comprend donc les deux cocréateurs, les quatre membres du comité de lecture et une graphiste, Léna Piroux, qui réalise les pictogrammes, s’occupe de l’identité visuelle de la maison et crée les couvertures.
Un critère essentiel, même pour le livre numérique : « Ce n’est pas parce que nous sommes dans le numérique qu’il faut ignorer l’aspect visuel du livre. Le choix, pour des lecteurs comme moi, peut d’abord être influencé par la couverture, numérique ou non. »
« Nous voulions bousculer le monde de l’édition »
Le numérique peut-il offrir la même qualité que les éditions papier traditionnelles ? « Notre modèle ne repose que sur le numérique pour le moment, mais notre volonté, c’est de ne pas appliquer les prix numériques, qui sont complètement délirants, tout en proposant de la qualité. Aujourd’hui, un livre papier est vendu 20 € et un livre numérique 15 €. De notre côté, nous ne voulons pas dépasser 5 €. Nous voulions bousculer le monde de l’édition en replaçant l’auteur au centre. Le système se comprend, mais il a besoin de changement. Nous disons cela modestement, bien entendu, mais nous voulons, à notre échelle, faire évoluer des choses. »
La maison d’édition vient de publier un premier roman : « Depuis le lancement du site Internet, nous avons publié notre première auteure, Suzanne Galéa [son roman Match a été publié le 10 juin 2016]. » Car la ligne éditoriale reste ouverte à tout type d’œuvres fictionnelles. Il n’y a aucun genre de prédilection : « Nous n’avons pas de ligne éditoriale particulière. L’important, c’est de voir si le texte en lui-même nous plaît. Peu importe que ce soit un polar, un roman jeunesse ou une nouvelle. »
Résolument engagée auprès des auteurs, la maison ReadMyBook offre gratuitement les services auteurs, avec une rémunération à 70 % du prix de vente (HT) des livres proposés sur le site, au lieu des 10 % traditionnels : « Nous tablons sur le volume puisque nous ne voulons pas publier à la chaîne. Nous avons envie de publier des textes qui sont des coups de cœur, que nous avons envie de défendre. Nous publierons cinq à six romans par an, pas plus. Il faut vendre et tout cela va passer par la promotion de l’ouvrage. »
« Le tout payant dans l’offre éventuelle de nos concurrents les différencie de nous. Le métier d’auteur est aussi devenu le rêve de beaucoup de monde. Certaines personnes font payer pour une couverture, pour les corrections, pour la constitution d’un dossier de presse. Tout cela va revenir à un total de 500 à 1200 € pour 30 lecteurs qui vont acheter le livre. Nous voulons fonctionner autrement », analyse Audrey Cornu.
La préoccupation de ReadMyBook est de privilégier la qualité à la quantité, donc, ce qui n’est pas sans risque : « Le grand problème d’aujourd’hui, c’est que 20 best-sellers sont lus par tout le monde et que les autres ne sont lus par personne. L’offre numérique est compliquée quand on se place du côté du lecteur parce qu’il y a énormément d’offres. Lorsque l’on va sur Amazon ou d’autres plateformes, des milliers de livres numériques sont en permanence mis en concurrence. Il y a des livres de très bonne qualité, mais il y en a d’autres qui sont jetés en pâture. »
Néanmoins, avec l’apparition de l’autopublication, l’éditeur numérique peut-il encore s’imposer ? « L'autopublication est une bonne chose, mais je ne pense pas que l’auteur puisse faire l’économie d’un éditeur. C’est vraiment un métier. Un auteur qui se corrige lui-même, qui fait sa propre couverture, devient chef d’entreprise. Il n’est plus auteur. Quand on écrit, on est souvent seul. On a besoin d’un regard objectif sur le texte. Nous nous plaçons dans le rôle de l’éditeur, un rôle essentiel à nos yeux. »
« Globalement, 40 à 50 % de nos auteurs ont tenté de s’autopublier. Les autres auteurs se sont manifestés auprès de maisons d’édition papier parce que le rêve d’un auteur, c’est d’avoir son livre papier. Nous tendons à cela aussi. On aimerait servir de passerelle à ces auteurs. Notre objectif, c’est qu’ils soient lus. Si la communauté de lecteurs qui se crée est assez importante, les auteurs pourront proposer un argument plus conséquent aux éditeurs papier », ajoute Audrey Cornu.
Quels sont les projets sur lesquels travaille la maison ? D’abord, un partenariat avec les blogueurs : « Nous allons progressivement mettre en place des partenariats avec des blogueurs. Nous en dirons plus le moment venu. » Pour lire le prochain roman, il faudra attendre le mois de septembre : « Le prochain roman sera publié d’ici septembre. Un autre est prévu pour octobre-novembre. Ce sera un roman jeunesse. »
Extrait de Match de Suzanne Galéa :
Match, l'application la plus vendue de tous les temps, vous attend !
Revendiquez votre droit au bonheur…
La solitude est un mal du siècle passé, une maladie à laquelle nous avons trouvé le remède.
Entrez dans l'ère de l'amour pour tous.
Cupidon, l'algorithme le plus puissant au monde, vous trouve l'âme sœur.
Bientôt les vingt ans du Match…
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La publicité s'acheva sur l'image d'un couple grisonnant. À leur cou, un pendentif, de la taille d'une grosse noix, brillait d'un vert éclatant. Matérialisation visuelle de la pertinence de leur amour mathématique.
Par Joséphine Leroy
Contact : josephine.lry@gmail.com
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