L’Education nationale a publié ce samedi 12 juillet les résultats définitifs du baccalauréat 2015, après avoir présenté les chiffres du premier groupe le 9 juillet (voir notre article). Il en ressort de façon globale un taux d’admis de 87,8 %. C’est donc la stabilité qui est de mise par rapport à 2014, avec un recul de 0,1 % seulement.
Le 11/07/2015 à 23:43 par Victor De Sepausy
Publié le :
11/07/2015 à 23:43
Des chiffres presque aussi bons qu'en 2014
Rappelons que pour la session de juin 2015, 703 500 candidats se sont présentés aux épreuves du baccalauréat, 49% dans les séries générales, 20% dans les séries technologiques, 31% dans la voie professionnelle. Au bout du compte, 617 900 candidats ressortent bacheliers de cette session.
Dans un communiqué, le ministère de l’Education nationale précise que « le taux de réussite dans les séries générales s'élève à 91,5%. Il se situe entre celui de 2014 (90,9%) et celui de 2013 (91,9%). Le nombre de bacheliers généraux est proche de 317 000, 11 400 de plus qu'en 2014. »
Des résultats qui vont de 80 à plus de 90 % de taux de réussite selon les filières
Ensuite, les taux de réussite des différentes séries générales sont de 91,2% (+1,5 point) pour le bac ES, 90,6% (+0,6 point) pour le bac L et 91,8% (-0,1 point) pour le bac S.
« Le taux de réussite dans les séries technologiques s'établit à 90,6%, identique à celui de 2014. Celui de la série STI2D (91,7%) diminue légèrement mais reste supérieur au taux de 2013. La progression la plus remarquable concerne la séries ST2S dont le taux de réussite continue à progresser et atteint 91,7%, soit 10 points de plus qu'en 2012 », précise le ministère qui analyse cette session dans une note d'information. Quant à la série STMG, elle voit son taux de réussite se stabiliser à 89,5%.
Le taux de réussite du baccalauréat professionnel s'établit à 80,3%. Il se situe entre celui de 2013 (78,6%) et celui de 2014 (81,9%). « Le baccalauréat 2015 a permis de qualifier professionnellement plus de 176 200 jeunes, 60 000 de plus qu'en 2010 », se félicite le ministère.
Le ministère félicite élèves et enseignants
Ces chiffres sont presque en adéquation avec la volonté de porter à 80 % le nombre de bacheliers d’une même classe d’âge. Pour la session de juin 2015, on est à 77,2%. Ce qui donne l’occasion à la ministre de l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Najat Vallaud-Belkacem de « féliciter les élèves et leurs enseignants pour ces très bons résultats de l'ensemble des voies du lycée et à remercier tous les personnels ayant contribué au bon déroulement de cette session. »
Face à tant de succès, il reste cependant une question à se poser : pourquoi dit-on donc que tout va mal dans l’Education nationale ? Sachant que cette vision n’émane pas simplement des « usagers » du système mais du ministère lui-même qui justifie ses réformes en prenant appui sur l’échec massif du système actuel, une situation constamment constatée par des évaluations à la fois externes et internes mais jamais par les examens que l’institution met en œuvre à destination des élèves.
Tout va vraiment bien dans le meilleur des mondes possibles ?
L’équation reste, de ce point de vue, toujours aussi impossible à résoudre. D’un côté, l’Education nationale arrive quasiment à remplir l’objectif louable et respectable d’amener près de 80 % d’une classe d’âge au bac, et de l’autre, on assure qu’il s’agit d’un des systèmes les plus injustes socialement parlant, générateur d’un nombre considérable d’élèves en situation d’échec scolaire. L’OCDE ne disait pas autre chose en s’adressant au ministère le vendredi 10 juillet 2015 (voir notre article).
(Source : Ministère de l'Education nationale)
Il semble donc y avoir une forme de schizophrénie dans le vaste navire que constitue l’Education nationale. Les résultats du brevet 2015, qui ont été dévoilés en grande partie le 10 juillet 2015 semblent montrer qu’il s’agit d’une année record. A ce titre, l'académie de Rennes, pour la première fois dans l'histoire du brevet, décroche un taux de réussite supérieur à 90%, avec exactement 90,3% !
Un système éducatif atteint de schizophrénie
Que penser d’une telle situation quand on sait que les évaluations mises en œuvre par l’Education nationale elle-même font état de 20 à 25 % des élèves qui, en troisième, ne maîtrisent pas les attendus minimaux en français comme en mathématiques ! (voir notre article)
Il est d’ailleurs étonnant que l’Education nationale ne se soit même pas fendue d’un communiqué pour se féliciter des résultats obtenus au brevet, alors même que l’institution assure de l’inefficacité du collège unique dans son architecture actuelle.
Mais, c’est sûr que cela aurait fait un peu désordre, les résultats étant tombés le jour même où l’OCDE renouvelait son constat sévère sur le rôle du secondaire en France. Dire en même temps qu’on dépasse les 80 % de réussite au brevet et que le collège dysfonctionne, en termes de communication, c’était plutôt risqué.
Comment interpréter objectivement de tels taux de réussite ?
Est-ce à dire donc que l’on peut obtenir le brevet sans véritablement savoir calculer, écrire et lire correctement ? La question mérite d’être posée à l’heure où l’Education nationale réfléchit, pour la énième fois, à une réforme du brevet, un examen qui n’a plus aucun sens, à part celui de tenir lieu de premier examen dans la scolarité d’un élève. Rappelons qu’en 2014, le taux de réussite moyen au brevet avait atteint 85,4%, en hausse de 0,4 point par rapport à 2013…
Des questions à peu près identiques, mais en relevant quelque peu le niveau, peuvent aussi, bien entendu, être posées pour le bac. Et ce ne sont pas les professeurs du supérieur qui diront le contraire, eux qui s'interrogent sur l'intérêt, à la fois pour le système et pour les jeunes eux-mêmes, d'envoyer chaque année des milliers d'étudiants au casse-pipe des études supérieures sans un niveau suffisant pour permettre leur réussite (voir notre article).
De son côté, le syndicat enseignant SNES-FSU saisit l’occasion des résultats du baccalauréat pour poser la question du bilan de la réforme du lycée. « Alors que la troisième génération de bacheliers de la réforme du lycée découvre aujourd’hui ses résultats, le SNES-FSU dénonce les effets délétères de cette réforme et continue d’en demander un bilan sincère, permettant d’ouvrir les discussions pour une remise à plat.
La diminution des horaires disciplinaires au profit d’un accompagnement personnalisé sans efficacité, des programmes mal conçus, et le cadrage local des dédoublements compliquent la tâche des enseignants et nuisent à la formation des lycéens dans toutes les disciplines générales et technologiques.
En philosophie, une délégation menée par le SNES-FSU rassemblant syndicats, associations de spécialistes, représentants d’assemblées générales, et soutenue par des rassemblements en province, a été reçue au ministère le 3 juillet. Elle a transmis à Madame la ministre l’appel de plus de 150 universitaires demandant instamment 'de restaurer au plus vite, les conditions d’un enseignement ambitieux de la philosophie au lycée.' Pour le SNES-FSU, le rétablissement du fléchage national des dédoublements doit en particulier bénéficier à l’enseignement de la philosophie en séries technologiques.
En sciences physiques et chimiques, les contenus et les conditions d’enseignement ainsi que l’évaluation au baccalauréat doivent être mis en débat. Il n’est pas acceptable qu’élèves, enseignants et correcteurs soient répétitivement mis en difficulté par des sujets et des barèmes problématiques, voire inacceptables, au motif que l’Inspection générale n’arrive pas à « faire avec » des programmes qu’elle a elle-même conçus.
En langues vivantes, les épreuves en cours d’années sont sources d’inégalités, en plus de constituer un travail considérable pour les équipes. Elles doivent être revues.
Dans la série technologique STI2D, les moyennes académiques à l’épreuve d’Enseignements technologiques transversaux (coefficient 8) sont largement en dessous de 10/20. Pourtant, les questions qui n’ont pas été traitées par une majorité de candidats n’ont pas été prises en compte afin de ne pas pénaliser les élèves. Cela démontre la nécessité d’une refonte de cette formation tant dans ses finalités que dans les contenus d’enseignements.
Alors que la réforme du collège 2016 s’inspire de celle du lycée, il est urgent d’ouvrir le bilan du lycée Chatel, de ses conséquences pour les personnels et de ses effets sur la formation des jeunes. Les réformes du collège et du lycée seront un des axes forts de la mobilisation du SNES-FSU à la rentrée scolaire 2015. »
(Crédits photos : CC BY 2.0 - Académie de Toulouse)
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