De nombreuses études montrent toujours le même résultat : à l’école, les filles réussissent mieux que les garçons. Afin d’essayer d’expliquer ce phénomène, l’OCDE s’est penchée sur les facteurs qui créent des inégalités dans l’acquisition de nouvelles compétences au sein du système scolaire.
Le 11/08/2015 à 00:02 par Victor De Sepausy
Publié le :
11/08/2015 à 00:02
Intitulée L’égalité des sexes dans l’éducation. Aptitude, comportement et confiance, cette étude montre aussi que parmi les élèves très performants à l’âge de 15 ans, les filles s’en sortent moins bien que les garçons en mathématiques et dans les sciences en général, avec des difficultés rencontrées dans la résolution de problèmes.
L’OCDE constate cependant que « nombre de pays sont parvenus à combler les écarts entre les sexes en termes de résultats d’apprentissage. Toutefois, comme le met en lumière ce rapport, même lorsque garçons et filles font jeu égal en mathématiques et en sciences, leurs attitudes à l’égard de l’apprentissage et leurs aspirations pour leur avenir diffèrent sensiblement – autant d’éléments qui ont une incidence significative sur leurs décisions concernant la poursuite de leurs études et sur leurs choix de carrière. »
A titre d’exemple, « en 2012, 14 % des garçons et 9 % des filles participant à l’enquête PISA n’ont atteint le niveau seuil de compétence dans aucun des trois grands domaines d’évaluation. Parallèlement, dans les systèmes d’éducation les plus performants de l’enquête, tels que Shanghai (Chine), Singapour, Hong-Kong (Chine) et le Taipei chinois, les filles font jeu égal avec les garçons en mathématiques et obtiennent de meilleurs scores que les garçons de la plupart des autres pays et économies du monde. »
Ce rapport balaie rapidement de la main l’argument d’une inégalité d’aptitudes innées entre filles et garçons. Ce sont «plutôt des attitudes des élèves à l’égard de l’apprentissage et de leur comportement à l’école, de la façon dont ils choisissent d’utiliser leur temps libre, et de la confiance qu’ils ont – ou non – en leurs propres capacités en tant qu’apprenants.
De fait, ce rapport montre que l’écart de compétence en littératie entre les sexes se réduit considérablement – voire se comble totalement dans certains pays – chez les jeunes hommes et les jeunes femmes lorsqu’ils atteignent la fin de l’adolescence et la vingtaine. Pour garantir que garçons et filles disposent des mêmes possibilités de réaliser pleinement leur potentiel, il faut l’engagement des parents, qui peuvent encourager leurs fils et filles à lire, des enseignants, qui peuvent amener leurs élèves à résoudre davantage les problèmes en autonomie, et des élèves eux-mêmes, qui peuvent essayer de passer plus de temps ‘déconnectés’ après les cours », assure Angel Gurria, secrétaire général de l’OCDE.
Les chercheurs qui ont travaillé à l’élaboration de ce rapport veulent avant tout réaffirmer que « les aptitudes n’ont pas de sexe. Lorsqu’ils ont accès aux mêmes opportunités, garçons et filles, et hommes et femmes, ont les mêmes chances de réussir au plus haut niveau. »
Mais, face à cette réalité, « de nouveaux écarts entre les sexes se font jour dans l’éducation. Les jeunes hommes sont significativement plus susceptibles que les jeunes femmes d’être moins engagés vis-à-vis de l’école et d’avoir un faible niveau de compétences et de mauvais résultats scolaires. Ils sont également plus susceptibles de quitter l’école précocement, souvent sans diplôme en poche.
Ainsi, dans les pays de l’OCDE, les garçons sont plus susceptibles que les filles, dans une mesure égale à 8 points de pourcentage, de déclarer que l’école est une perte de temps. Parallèlement, dans l’enseignement supérieur et au-delà, les jeunes femmes sont sous-représentées dans les domaines des mathématiques, des sciences physiques et de l’informatique. »
Pour expliquer l’écart de réussite scolaire à 15 ans entre garçons et filles, l’OCDE assure que « les garçons consacrent, par exemple, une heure de moins par semaine que les filles à leurs devoirs – or chaque heure y étant consacrée par semaine entraîne un gain de score de 4 points aux épreuves PISA de compréhension de l’écrit, de mathématiques et de sciences.
En dehors de l’école, les garçons consacrent plus de temps que les filles aux jeux vidéo, et moins de temps qu’elles à la lecture par plaisir, notamment de textes complexes, tels que les livres de fiction. Les compétences en compréhension de l’écrit constituent la base sur laquelle se fondent tous les autres apprentissages ; lorsque les garçons ne lisent pas bien, leurs résultats dans les autres matières en pâtissent donc également. »
Chez les filles, c’est un problème de confiance qui mine leurs résultats en sciences. « Dans une large majorité des pays et économies participant à l’enquête PISA, parmi les élèves très performants, les filles obtiennent de moins bons scores que les garçons en mathématiques ; à ce niveau, elles ne devancent les garçons dans aucun pays. De façon générale, les filles ont moins confiance que les garçons en leurs capacités à résoudre des problèmes de mathématiques ou de sciences.
Elles sont également plus susceptibles de faire part d’un fort sentiment d’anxiété vis-à-vis des mathématiques, constat qui vaut même pour les plus performantes d’entre elles. En moyenne, dans les pays de l’OCDE, l’écart de performance en mathématiques entre les filles et les garçons très performants s’établit à 19 points de score. Toutefois, cet écart se comble totalement lorsque l’on compare des garçons et des filles présentant des niveaux similaires de confiance en soi en mathématiques et d’anxiété vis-à-vis de cette matière. »
Mais, malgré ces écarts de réussite, les garçons arrivent à mieux s’en sortir, une fois la scolarité terminée. Pourtant, « les filles nourrissent en général des aspirations plus élevées que les garçons à l’égard de leur carrière ; toutefois, en moyenne, dans les pays de l’OCDE, moins de 5 % des filles envisagent d’exercer une profession dans les domaines de l’ingénierie et de l’informatique. Dans la quasi-totalité des pays, les garçons sont plus nombreux que les filles à envisager d’exercer une profession dans ces domaines.
En revanche, les garçons semblent mieux préparés que les filles pour l’entrée dans la vie active ou la recherche d’un emploi. Selon les résultats de l’enquête PISA, le pourcentage de filles de 15 ans indiquant ne pas avoir appris à préparer un entretien d’embauche est ainsi supérieur de plus de 10 points de pourcentage à celui des garçons dans ce cas. En outre, les garçons sont plus nombreux que les filles à déclarer avoir pris part à des activités pratiques telles que des stages ou des visites d’entreprises. »
S’ajoute à cela qu’ « en murissant et en entrant dans l’âge adulte, les garçons acquièrent également, dans le cadre professionnel et par leur expérience personnelle, certaines des compétences en compréhension de l’écrit qu’ils n’avaient pas assimilées à l’école.
Selon les résultats de l’édition 2012 de l’Évaluation des compétences des adultes, menée dans le cadre du Programme de l’OCDE pour l’évaluation internationale des compétences des adultes, aucune différence significative de compétence en littératie ne s’observe entre les sexes parmi les 16-29 ans. En outre, parmi les actifs occupés âgés de 30 à 69 ans, et plus particulièrement parmi les quinquagénaires et les sexagénaires, les hommes semblent largement plus susceptibles que les femmes d’utiliser leurs compétences en lecture, en écriture et en résolution de problèmes dans le cadre professionnel. »
Pour agir sur ces tendances de fond, les parents ont un rôle très important à jouer, en faisant attention à leur comportement et à leurs attentes face à leurs fils et leurs filles. Mais les enseignants aussi doivent se remettre en question pour ne pas adopter des attitudes différentes face à une fille ou face à un garçon. Chacun doit arriver à surmonter les préjugés dont il est victime afin de ne pas s’en faire le vecteur.
Pour les auteurs de cette étude, la clef de résolution du problème est là. « Des efforts concertés de la part des parents, des enseignants, des décideurs et des leaders d’opinion sont nécessaires pour que garçons et filles soient en mesure de réaliser pleinement leur potentiel et de contribuer à la croissance économique et au bien-être de leur société. »
(Crédits photos : CC BY 2.0 - Raquel Abe)
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