ENTRETIEN – La Saison de la lecture de Montréal se déroule jusqu’à la fin décembre. Auteur et dramaturge, Simon Boulerice en est le porte-parole, pour l’édition 2016. Il nous raconte cette manifestation, ses enjeux, et plus largement la vie littéraire du Québec.
Le 18/10/2016 à 13:49 par Cécile Mazin
Publié le :
18/10/2016 à 13:49
La saison de la lecture vise à regrouper et faire la promotion de toutes les activités en lien avec la lecture qui ont lieu pendant l’automne : salon du livre, remises de prix littéraires, campagne de la lecture en cadeau, activités dans les bibliothèques, etc.
SImon Boulerice - crédit Maxime Leduc
Simon Boulerice : Elle est vaste, essentiellement. Il est difficile de la circonscrire et la réduire en une seule case. Elle ratisse plusieurs genres, de l’horreur à la comédie, en passant par le drame social et l’aventure, et tant d’autres, et atteint plusieurs lecteurs, de tous âges. Elle est multiple, et la plupart des remises de prix l’ont compris en fragmentant les récompenses par groupes d’âge. Mais ce qui unit toutes ces littératures est certainement le fabuleux tremplin dans l’imaginaire, le délire et l’empathie qu’elles représentent.
Simon Boulerice :Ce n’est pas le constat que je fais quand je vais en classe. Je vois des élèves curieux, avides même. Il y en a qui sont indifférents à la lecture, bien sûr, et c’est bien leur droit, mais la plupart démontrent un intérêt. Du moment qu’ils peuvent mettre en perspective le roman avec leur propre vie, je sens de leur part une curiosité.
Simon Boulerice :Il y a une foule d’activités. Je proposerais d’aller assister à la remise du Prix du livre jeunesse des Bibliothèques de Montréal, qui récompense la richesse et la diversité de la littérature jeunesse montréalaise. La remise de prix aura lieu à la Bibliothèque Benny le 20 octobre prochain : l’occasion de rencontrer des auteurs et de peut-être découvrir une nouvelle bibliothèque. Autre idée : le 16 novembre, à 19 heures, le CEAD propose Théâtre à relire, où des comédiens, dirigés par Martine Beaulne, liront au public des extraits de pièces ayant été récompensées par le prestigieux prix Michel-Tremblay depuis 2009.
Pour entendre du théâtre d’aujourd’hui, fait ici, ça se passe à l’auditorium de la BANQ. Finalement, je rappelle aussi que, jusqu’au 4 décembre prochain, on peut participer à un concours et risquer de gagner de beaux prix. Tout ce qu’on a à faire, c’est de répondre à la question « Pourquoi lis-tu ? » et de partager notre réponse sur Twitter ou Facebook en utilisant le mot-clic #PourquoiJeLis en mode public.
Simon Boulerice : Il y a un attrait, oui. Visiter les bibliothèques de la ville, c’est répondre à cette question. Souvent, les sections jeunesse sont plus séduisantes et spacieuses que celles pour les grands. Plus aérées, sinon. Il y a des tapis colorés et un mobilier à hauteur d’enfants pour que cette littérature soit dégustée sur place. C’est sans compter les mille et une activités des maisons de la culture qui offre une sélection de choix en théâtre jeune public, notamment.
Simon Boulerice :Je suis pour la démocratisation de l’art. Chaque fois que l’art va à la rencontre de son futur public, j’applaudis. Je me dis que les présentations sont faites, et que le lecteur multiplie de visiter prochainement une librairie ou une bibliothèque en étant moins intimidé. Il faut que les livres soient partout, à portée de main de tous. Surtout des enfants.
Simon Boulerice : J’y ai participé à plusieurs reprises. C’est une activité qui m’amuse beaucoup. J’ai été libraire lors de mes études et j’éprouve un grand respect pour ce métier qui flirte avec la véritable vocation. Dans ce projet de l’ALQ (Association des librairies indépendantes du Québec), nous devions nous prendre pour des docteurs (littéraires) et offrir des prescriptions (littéraires) au public, après avoir écouté les symptômes (leurs allégeances littéraires).
C’était ludique, oui, mais surtout un fabuleux prétexte pour partager nos coups de cœur avec le patient/lecteur, de part et d’autre. Quand on s’y arrête, il y a de l’apôtre dans le rôle du libraire : il partage la bonne nouvelle.
Simon Boulerice : C’est peut-être une impression fausse, mais on dirait que, depuis quelque temps, les librairies réservent une importante aire de célébrité à la littérature jeunesse dans leurs vitrines. Je pense entre autres au Port de tête, qui alloue 50 % de ses présentoirs aux livres jeunesse, toujours avec le souci de célébrer une thématique bien précise ou de mettre de l’avant une couleur en particulier.
Et ça, c’est sans compter les libraires spécialisés, qui sont au fait de toutes les parutions, et qui conseillent avec ferveur pour tous les âges.
Simon Boulerice : En multipliant et en diversifiant les activités. Participer à des lectures échevelées partout et à des ateliers d’écriture, assister à l’heure du conte dans des parcs, organiser des Clubs de lecture, créer des spectacles honorant certaines thématiques, comparer une œuvre littéraire à sa version cinématographique… Et en n’hésitant pas à multiplier les rencontres informelles entre les écrivains et les jeunes lecteurs. Pour beaucoup d’enfants, un auteur, c’est un métier inatteignable, inaccessible.
Un métier froid comme un cadavre. Parfois, ils ne connaissent que des auteurs étrangers ou morts. En France, il y a un festival qui s’intitule Les auteurs vivants ne sont pas tous morts. Ce titre éloquent est génial. Pour qu’elle soit accessible, il faut désacraliser la littérature. Ou à tout le moins les écrivains.
Simon Boulerice :Dans ce domaine, je ne suis pas un expert. Dans l’écriture, j’ai tendance à aborder des sujets tabous (anorexie masculine, énurésie, autisme, intimidation, homophobie…), et jamais je n’ai été censuré. Les seuls cas d’appel à la censure que j’entends ici sont pour des œuvres d’un auteur décrié pour son inconduite, ou des soupçons d’inconduite.
Biographie :
Né au lendemain de la Saint-Valentin de 1982, Simon Boulerice est un touche-à-tout épanoui. Il est à la fois auteur, comédien (cuvée 2007 en interprétation théâtrale du collège Lionel-Groulx) et metteur en scène. Il a écrit une dizaine de pièces de théâtre, dont Qu’est-ce qui reste de Marie-Stella ? (Dramaturges Éditeurs) et une autofiction, Simon a toujours aimé danser (prix de la création Fringe 2007, solo de l’année LGBT 2007), qu’il a présentée en tournée jusqu’au Tchad, en Afrique, en passant par la France et la Belgique. Il a également publié des romans pour adultes (Les Jérémiades en 2009 et Javotte, prix des lecteurs émergents de l’Abitibi 2013), des romans pour enfants et ados (Jeanne Moreau a le sourire à l’envers en 2013 et Edgar Paillettes, prix des libraires jeunesse 2014) ainsi que trois recueils de poésie (Saigner des dents, prix Alphonse-Piché 2009, Nancy croit qu’on lui prépare une fête et La Sueur des airs climatisés). Il écrit et joue de plus en plus pour le jeune public. Sa première pièce pour enfants, Éric n’est pas beau, est parue à L’École des loisirs, et il est actuellement en tournée avec sa pièce Les Mains dans la gravelle (prix du spectacle de l’année des jeunes critiques de la Montérégie 2011 et prix du public de Belœil 2011, parue aux Éditions de la Bagnole) au sein de la compagnie L’Arrière Scène.
Il a cofondé Abat-Jour Théâtre en 2005, compagnie qui a reçu à deux reprises le prix du public lors du Gala des cochons d’or 2011 pour sa pièce Martine à la plage, publiée à la Mèche en roman illustré, dans sa propre mise en scène, puis en 2014 pour sa pièce PIG, parue chez Leméac. L’automne sera chargé pour l’auteur. En plus de la parution en France (Grasset) et en Allemagne (Diogenes) de son livre Un verger dans le ventre, illustré par Gérard Dubois, il publie ici un autre album pour les petits (Albert 1er, le roi du rot), un roman pour enfants (La Tempête est bonne), un recueil de poésie pour ados (Les Garçons courent plus vite), un roman pour adultes (Le Premier qui rira) et le dernier tome de sa série M’as-tu vu ? (Le Plan d’ensemble). En théâtre, il reprendra son spectacle tout public traitant d’homoparentalité Tout ce que vous n’avez pas vu à la télé (prix du texte de l’année 2014 des jeunes critiques de la Montérégie 2014), alors que deux de ses pièces seront créées : Tu dois avoir si froid verra le jour à Belœil et Peroxyde, à Jonquière.
S’il a surtout œuvré sur scène en théâtre jeunesse, il a aussi joué pour le NTE et le Théâtre du Party Chinois. Au grand écran, on a pu le voir dans Boderline de Lyne Charlebois et Les Maîtres du suspens de Stéphane Lapointe, alors qu’au petit écran, il était de La Galère et Les Boys. Il entame également son entrée au sein de l’Arrière Scène, compagnie jeune public, en tant qu’assistant à la direction artistique, aux côtés de Serge Marois. Mais malgré tout ça, il prend le temps de faire la split une fois par jour. (via Globensky)
Par Cécile Mazin
Contact : cecilem@actualitte.com
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