Avec le retour des élèves sur les bancs de l’école, c’est aussi le retour sur le devant de la scène des syndicats enseignants. Chacun a tenu, ou va tenir, sa traditionnelle conférence de presse de rentrée.
Le 01/09/2015 à 10:31 par Victor De Sepausy
Publié le :
01/09/2015 à 10:31
Au SE-Unsa, on se montre plutôt positif et ouvert sur l’avenir tout en étant attentif aux réformes en cours. « La maternelle devient l’avant-garde de la Refondation. C’est elle qui inaugure, avec un an d’avance sur les autres cycles, un nouveau cycle et de nouveaux programmes. Un défi pour les professionnels, tant cette mise en œuvre est peu anticipée et accompagnée par l’institution. Les documents d’accompagnement promis depuis plusieurs mois n'ont été mis en ligne que vendredi 28 août. Et à notre connaissance, les formations aux nouvelles logiques de travail et d’évaluation sont peu présentes dans les plans départementaux de formation. Cette impréparation inquiète… Et elle ne se limite pas à la maternelle : l’enseignement moral et civique, le parcours d’éducation artistique et culturelle et le parcours avenir pâtissent de la même précipitation dans la mise en œuvre. Les enseignants, comme toujours, feront au mieux…
On sait que la rentrée 2016 sera le grand rendez-vous de la Refondation pour l’école élémentaire et le collège. Ce sera tout à la fois les nouveaux cycles, le travail renforcé entre écoles et collège du secteur, les nouveaux programmes des cycles 2 et 3, la nouvelle évaluation, les nouveaux livrets scolaires, les EPI et l’AP au collège. Excusez du peu ! 2015-2016 devra impérativement être mise à profit pour (enfin) anticiper et accompagner le changement.
Avec les enseignants, le SE-Unsa revendique un accompagnement de qualité qui entend leurs besoins et reconnaît leurs atouts. Il exige des outils et des ressources professionnels à la hauteur des enjeux. Le ministère annonce un effort considérable de formation continue dans les collèges, oubliant en passant que la refondation, c’est aussi celle de l’école primaire où les besoins sont tout aussi importants. Mais même ce louable effort n’est pas pensé pour un premier accompagnement de tous les enseignants de collège au cours du premier trimestre, afin qu’ils soient tous partie prenante de la construction du nouveau projet pédagogique attendu dès fin janvier. En syndicat utile, le SE-Unsa se met au service de la profession et proposera tout au long de l’année des outils pour construire la rentrée 2016. »
Du côté du Snalc, on ne baisse pas la garde et l’on répond aux petits mots de la ministre de l’Education nationale glissés dans l’interview qu’elle a accordée au Parisien. Dans un communiqué, « le SNALC-FGAF tient à rassurer la ministre, qui effectue ces jours-ci sa rentrée médiatique : il n'y a aucun ‘malentendu’ au sujet de la réforme du collège. Les collègues ont très bien compris son fonctionnement, notamment grâce au travail du SNALC, qui a publié de nombreux articles, vidéos et désintox sur son site. Nous avons ainsi pu corriger quelques malheureuses imprécisions qui s'étaient glissées dans la communication officielle, au sujet par exemple du latin pour tous, du renforcement de l'allemand ou de la dimension « personnalisée » de l'accompagnement proposé. Les collègues s'opposent donc majoritairement à cette réforme en toute connaissance de cause.
Le SNALC-FGAF a bien noté que la ministre a déclaré ce matin même qu'elle ne croyait pas qu'on pouvait faire une réforme contre les personnels. Nous l'invitons donc à être logique et à abroger sa réforme du collège, qui va se faire contre les personnels.
Enfin, le SNALC-FGAF propose à la ministre de s'intéresser au fonctionnement des mutations dans l'Éducation nationale. Elle pourra ainsi découvrir que si des professeurs ne connaissent pas encore leur affectation au jour de la rentrée, ce n'est pas parce que d'autres enseignants ‘ont déménagé’ ou ont ‘changé d'avis’. Cela lui évitera de faire passer nos collègues pour des dilettantes ou des indécis qui mettraient en péril la scolarité des élèves. »
Quant au SNES, dans sa conférence de presse, il a annoncé une rentrée « à haut risque pour le gouvernement, sorti très affaibli des divers scrutins et très largement contesté y compris au sein du parti de la majorité. Les chiffres de croissance et du chômage publiés pendant l’été, les difficultés des collectivités territoriales à financer leurs missions montrent l’échec de la politique conduite jusqu’ici. Le débat budgétaire sera l’occasion de revenir sur les choix faits depuis 3 ans et d'en tirer le bilan.
Or, si de nombreuses contributions réclament une réorientation de la politique économique en faveur des ménages et des collectivités, il semble que le président ne veuille pas déroger à sa ligne de conduite marquée par l’austérité et l’affaiblissement des services publics. Même si l’Éducation fait encore figure de ministère préservé, les efforts consentis en matière de postes restent trop modérés; quant à la rémunération des enseignants, elle souffre toujours de son insuffisance.
Concernant les créations d’emplois, le bilan actuel indique qu’il faudrait faire sur le moyen terme un effort significatif supplémentaire sur le plan budgétaire. En effet, alors que le nombre de créations au ministère de l’Éducation, sur les budgets 2013, 2014 et 2015, tourne autour de 9 000 emplois en moyenne, plus de 11 000 créations par an sur 2016 et 2017 seront nécessaires pour atteindre les 54 000 promis avant la fin du quinquennat.
Or les orientations budgétaires de juillet dernier font état d’un projet de 8 561 emplois nouveaux… ce qui est très peu au regard de cet engagement mais aussi, des évolutions d’effectifs et des dernières annonces ministérielles qui chiffrent à 4 000 emplois le coût de la réforme du collège. Encore faut-il pourvoir les postes ouverts aux concours pour assurer la montée démographique, financer les réformes et couvrir les départs à la retraite. Or, assurer 22 000 créations d’emplois d’ici 2017 ne sera possible qu’avec une véritable politique incitative, d’aides aux étudiants et de pré-recrutements. Le mécontentement général des salariés et chômeurs n’épargne pas les personnels du second degré placés dans des conditions de travail difficiles (nombre d’élèves par classe, accumulations de prescriptions, multiplication de hiérarchies) et n’ayant pas bénéficié de mesures de carrière pour tous.
Au lycée, ils sont contraints de devoir continuer à gérer les conséquences des réformes Chatel non remises en cause et dont les axes inspirent la réforme du collège. L’arrivée de la nouvelle ministre il y a un an pouvait laisser espérer que les préoccupations des personnels, désireux de voir enfin des améliorations concrètes en matière de conditions de travail et de salaire, de voir mises en chantier des réformes pour un collège plus juste, pour une mixité scolaire et sociale renforcée, seraient prises en compte.
La gestion désastreuse de la réforme du collège, le coup de force du Premier Ministre publiant les textes au lendemain d’une grève majoritaire ont douché tous les espoirs et ravivé le mécontentement. L’ampleur de celui-ci face à une réforme dangereuse pour le métier et la formation des élèves a conduit à de nombreuses mobilisations qui reprennent dès cette rentrée et déboucheront sur une grève et une manifestation nationales avant les congés d'Automne. »
De son côté, le SNUipp, se montre critique dans un communiqué un brin ironique sur les dernières annonces de la ministre de l’Education nationale en matière de formation continue. « En déplacement à Dijon, la ministre vient d'annoncer un effort exceptionnel en faveur de la formation continue.
Mis en appétit par cette bonne nouvelle, nous sommes allés immédiatement consulter les nouveaux plans départementaux de formation continue exceptionnelle proposés aux enseignants du primaire pour cette année 2015-2016. Et à y regarder de près, que l'école primaire se réjouisse : c'est une offre de formation à couper le souffle !
Pour les programmes de maternelle, cela concerne 12 enseignants sur 816 pendant 2 jours dans le Doubs, 22 enseignants sur 2 204 pendant une semaine dans les Yvelines, 10 enseignants sur 417 pendant 3 jours dans l'Aude, 48 enseignants sur 198 pendant 6 jours en Ardèche, ...
Pour les nouveaux programmes d'enseignement moral et civique, cela va toucher 24 enseignants sur 2 932 pendant 4 jours dans le Doubs, 50 enseignants sur 7 857 dans les Yvelines, aucun en Ardèche, dans le Tarn et Garonne ou dans l'Eure ...
Mais, que les enseignants se réjouissent, il y en aura pour tout le monde. Sur ces deux sujets, le ministère affiche qu'entre 3 à 6 heures d'animation pédagogique seront offertes à tous les enseignants ...soit, pour la plupart, un mercredi après-midi dans des salles pouvant regrouper jusqu'à 200 personnes.
Comment croire, dans ces conditions, qu'il sera possible d'être formé aux nouvelles pratiques professionnelles concernant le langage, la compréhension du nombre, la découverte de l'écrit, le développement du jeune enfant en maternelle ... ou encore la laïcité, la mise en œuvre des débats sur les dilemmes moraux dès le CP ?
Pourtant, comme le rappelle l'OCDE, la formation professionnelle continue a autant d'importance, si ce n'est plus, que la formation initiale dans le succès d'un système d'éducation. A titre indicatif, à Singapour, tous les enseignants bénéficient de 100 heures de formation par an. Changer l'école ne s'obtient pas d'un claquement de doigt, fusse-t-il exceptionnel. Il est urgent de proposer un plan de formation continue consistant et de qualité aux enseignants du premier degré. C'est aussi cela la priorité promise au primaire. »
(Crédits photos : CC BY 2.0 - Frédéric Bisson)
Commenter cet article