Écrivaine rare et précieuse, Angélique Villeneuve a su en quelques livres imposer sa voix singulière et délicate. Dans une cohérence tant par le fond que par la forme elle construit une œuvre sensible et émouvante.
Le 16/03/2017 à 10:11 par La rédaction
Publié le :
16/03/2017 à 10:11
Angélique Villeneuve - Yves Tennevin, CC BY SA 2.0
Telle une dentellière qui sans cesse remet l’ouvrage sur le métier Angélique tisse ses récits avec précision, subtilité, explorant toujours et encore les profondeurs de la nature humaine, les relations complexes entre les êtres, du corps social et des corps privés. Angélique est un écrivain du clair-obscur, de la demi-teinte, des profondeurs jusqu’à la lumière, de l’intime et du fragile qui toujours se bat, se débat, se construit, résiste et triomphe.
À bien la lire, nous découvrons très vite des personnages qui montrent une force de vie incroyable, au-delà des souffrances et des humiliations, au-delà des blessures et des traumatismes. Sans doute est-ce là la puissance essentielle des livres d’Angélique, la capacité de résilience de chacun de ses personnages.
De Grand paradis à Les fleurs d’hiver en passant par Territoire — trois livres parus aux éditions Phébus — les trois personnages principaux, trois femmes, vont affronter leurs ténèbres personnelles pour enfin arriver à la lumière. Même si bien souvent la grande Histoire est sous-jacente ; les hystériques et le professeur Charcot à la Salpetrière dans Grand paradis ; la Première Guerre mondiale et le retour des gueules cassées dans Les fleurs d’hiver ; c’est bien de destin humain, personnel et intime dont il s’agit, destin de femmes toujours.
Angélique n’a de cesse de creuser toujours et encore plus, plus précisément, plus finement l’âme humaine. Comme pour en sortir la substantifique moelle, dirons-nous. La réussite est totale tant l’adéquation de la langue et du récit est parfaite. À la subtilité des caractères et des situations, ni tout noir, ni tout blanc, s’accorde une langue ciselée, toute en finesse, en nuance, précise et concise : de la dentelle.
Sans vouloir en déflorer précisément l’histoire, chacun découvrira dans ces trois livres toute la singularité d’un auteur authentique. Mais sachez que lire Angélique Villeneuve c’est accepter de partir en compagnonnage, dans l’intimité de ses personnages, accepter de sentir et ressentir les souffrances et les joies, les mêmes douleurs, les mêmes bonheurs. De vivre pleinement ses lectures en quelque sorte, physiquement, émotionnellement. Mais après tout n’est-ce pas le propre de tous les grands livres ?
Après ces trois romans aussi vrais que la vie elle-même, aussi justes, arrive en mars 2016 le magnifique Nuit de septembre paru aux éditions Grasset. Né d’un drame personnel, le suicide de son fils, ce récit prend immédiatement sa place dans l’œuvre d’Angélique, une place pleine et entière, cohérente, dans la droite lignée de son travail romanesque.
Au risque de choquer certain, ce récit s’inscrit bel et bien dans un travail d’écriture. Tout à la fois pudique et sincère, admirablement écrit, bouleversant d’émotions ce petit livre est un condensé de vie, la vie qui va, la vie qui s’en va, la vie qui continue. Véritable hymne Nuit de septembre est un récit qui saisit et accompagne longtemps.
Angélique Villeneuve est également auteur de livres pour la jeunesse. Là nous découvrons une autre facette de l’écrivain. Tantôt joueuse et malicieuse dans À la recherche du paon perdu (nous pourrions lire « temps » ou bien « pain » perdu) ou dans Les très petits cochons, tantôt gourmande et sensuelle dans Le festin de Citronne e ou le très récent Le doudou des bois, Angélique devient écrivain des sens, de la délicatesse, de la tendresse.
Il y a quelque chose de très maternel dans ses textes, mère nourricière, mère protectrice et enveloppante, mère caressante. Ses albums sont de véritables réconforts, des baumes au cœur, comme des gourmandises et autres sucreries.
À le regarder de près il n’y a bien sûr qu’une Angélique Villeneuve, auteure sensible, auteure sensorielle, auteure à la plume précise, infiniment humaine et profondément fraternelle. Lire Angélique Villeneuve c’est tout cela à la fois, et bien d’autres choses encore. Alors, faites-le vite, la lire, la découvrir et partager ces moments intimes et sublimes de lecture. Nous vous y invitons fortement et chaleureusement.
Jean-Marc Brunier,
Le Cadran lunaire (Mâcon)
en partenariat avec le réseau Initiales
Commenter cet article