Et une fois encore, les données personnelles des usagers de réseaux sociaux sont menacées. Utilisateurs de Facebook, LinkedIn ou Twitter, ils sont 48 millions à s’être fait siphonner les informations par Localblox, pointée comme responsable. Et bien entendu, sans leur consentement...
Le 21/04/2018 à 12:35 par Nicolas Gary
Publié le :
21/04/2018 à 12:35
Marc Meynadier, CC BY ND 2.0
Le monde numérique ne pouvait conduire qu’à rendre numérisable l’existence de tout un chacun. La manne des marketeux et des publicitaires se change en enfer. L’exemple de Locablblox n’est pas des plus brillants, alors que l’affaire Facebook/Cambridge Analytica est encore dans les esprits.
Alors, certes, Facebook a décidé de mettre en place de nouveaux paramètres de confidentialité – mais il semblerait que seuls les utilisateurs en Europe en bénéficieront. (voir France 24) Impossible de raisonner l’entreprise, ou de lui faire adopter un comportement vertueux, manifestement. Vraiment ?
Quand on est grand lecteur, on ne peut que ressentir un peu de compréhension vis-à-vis de Facebook : qui vit par les données finit par périr par les données, non ? Car, bien avant la collecte de big datas instaurée par le réseau social, les lecteurs avaient déjà mis en place un modèle de moissonnage généralisé, leur permettant d’enrichir... leur Pile À Lire. Eh oui !
Car le lecteur est une créature tout aussi fourbe que Facebook en réalité, prêt à emmagasiner toutes les données personnelles que les autres lecteurs lui fournissent. De l’espionnage industriel ouvertement pratiqué, à des niveaux internationaux – et une pratique unanimement admise entre eux.
Prenons un exemple, manifeste, qui atteste de ce comportement fonctionnant sans aucun algorithme. Un lecteur, avide de données, entre dans une rame de métro, un bus ou un tram : son premier réflexe, avant même de chercher une place pour s’asseoir est d’opérer un balayage rétinien minutieux. Une méthodologie éprouvée, affûtée avec le temps.
Il est troublant de noter que cette technique s’enclenche tout aussi bien dans les lieux publics, cafés, gares, aéroports...
Francisco Osorio, CC BY 2.0
En l’espace de quelques secondes, il applique une forme évoluée de reconnaissance de données, confrontant à sa propre base celles ainsi collectées. Il cherche en effet d’autres lecteurs, livre ostensiblement ouvert, et concentrés sur leur texte. Le lecteur-collecteur applique également une classification par extension de nom de fichier : xxx.roman, xxx.essai, xxx.youngadult ou encore xxx.livredemerde.
Cette solution lui permet non seulement d’enregistrer les données personnelles dévoilées par les autres lecteurs en pleine pratique, mais surtout, de disposer d’un ensemble d’informations qu’il fera fructifier lors de son prochain passage en librairie. Il écartera toute forme de duplicate content – des ouvrages qu’il a déjà lus – non sans avoir souri de se découvrir un point commun avec sa victime.
Dès lors, il peut s’enquérir d’une place pour s’adonner lui-même au partage de ses propres données de lecture, pertinemment conscient qu’un autre lecteur passera, et moissonnera alors les informations qu’il communique de la sorte.
C’est à se demander si la lecture n’est finalement pas le plus puissant réseau social que l’on ait inventé. Tellement vertueux qu'on lui a donné un nom exotique : BouchaOreill...
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
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