#SalTo18 — Immense espace de quelque 5000 m2, le Bookstock Village est la fierté du salon. Aucune maison d’édition n’y est strictement présente, et pourtant des centaines de livres sont vendus, chaque jour. Ce lieu assez unique en son genre est un passage obligatoire pour les familles, et privilégié pour les enseignants. Rencontre avec Maria-Giulia Brizio, qui le fait vivre depuis trois ans maintenant.
Le 14/05/2018 à 16:35 par Nicolas Gary
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14/05/2018 à 16:35
Le Bookstock Village est un espace consacré à la jeunesse : on y trouve exposition, laboratoires littéraires d’expérimentations diverses et variées, ainsi que des librairies. « Cette année, nous avons ajouté une sélection spécialement pensée pour les 13-19 ans, à la demande des libraires. Ce segment éditorial fait l’objet d’une forte demande de la part des lecteurs, et nous voulions y répondre avec un choix de livres spécifique. » Au point que l’on a demandé aux jeunes et aux auteurs d’apporter leur grain de sel et leurs recommandations de livres, intégrés aux tables.
Pour 2017, les livres jeunesse ont représenté une production de 9923 ouvrages — dix fois plus qu’en 2007 — sur 66.757 livres produits au cours de l’année. Ainsi, le secteur a généré 233,9 millions €, en croissance de 7,9 % par rapport à l’an dernier. Mieux : la littérature jeunesse représente 43 % de l’export et des ventes de droit, en hausse de 7,7 % (chiffres AIE).
On comprend mieux comment, en l’espace d’une dizaine d’années, le pavillon qui n’était qu’un lieu dédié aux enfants est devenu ce vaste projet, impliquant bien plus que de la littérature. C’est en 2006 que le Bookstock Village voit le jour : avec l’investissement de la Fondazione Compagnia di San Paolo, fondation bancaire, une nouvelle approche va se déployer. « Il s’est agi, alors, de pouvoir consacrer un plus grand nombre de projets pour la promotion de la lecture, avec différentes approches thématiques », indique Maria-Giulia Brizio.
Pour cette édition 2018, la société Carioca est devenue un partenaire incontournable. L’an passé, plusieurs tableaux et des crayons de la marque étaient à disposition. Désormais, la société est omniprésente, « particulièrement confiante en l’approche que le salon peut avoir », nous précise-t-on. Si un salon du livre reste « le lieu idéal pour que les enfants quittent les écrans », il permet plus encore de leur donner des outils d’expression.
Mais le Bookstock ne pourrait pas exercer son rayonnement sans une multitude d’initiatives qui, au cours de l’année, rapprochent élèves, familles et enseignants, des livres. « Avec les professeurs, par exemple, nous entretenons une relation très en amont du Salon : ils s’inscrivent à nos lettres de diffusion, reçoivent une multitude d’informations à mesure que la programmation s’opère. Nous cherchons à anticiper le mieux possible pour les alerter. » En parallèle, le salon, hors Bookstock, aménage des temps de rencontre et réserve des salles pour leur faciliter la vie.
Côté élèves, ce sont plus de 27 000 jeunes qui viennent au Salon en moyenne — dont 30 % arrivent de toute l’Italie, et pas uniquement de la région piémontaise. « Pour les intéresser, nous tentons de nous rapprocher d’eux et de les impliquer, à travers des formats, comme la bande dessinée, ou des thèmes, comme l’édition numérique. Tout cela pour maintenir le lien avec les livres. »
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Mais plus encore : une opération baptisée Adopte un auteur offre à 27 classes de la région de pouvoir choisir un écrivain, chacune le sien. Trois rendez-vous sont alors organisés avec des opérateurs du salon, pour accompagner l’enseignant et les élèves dans la découverte des livres. L’objectif, qui s’inscrit dans la programmation du Salon Off, sera par la suite de présenter l’auteur à d’autres élèves.
« Si le Bookstock Village n’est pas au cœur de toutes ces activités menées durant l’année, c’est pour mieux donner au Salon du livre de Turin la présence qui lui revient. L’espace n’est pas à proprement parler mis en avant, mais nous sommes aux côtés des enfants et des jeunes, le plus possible. Toutes les synergies sont bonnes pour que le livre reste présent dans la vie de chacun », souligne Maria-Giulia Brizio.
Que ce soit avec la Scuola Holden, établissement fondé par Alessandro Baricco, ou encore les bibliothèques et les librairies de la ville, Turin et son Salon marchent à l’unisson. D’autres partenaires, comme la Lucca Comics & Games, manifestement extrêmement populaire dans le bel paese, ou encore le Salon du livre et de la presse jeunesse de Montreuil, sont présents. « Nous nous enrichissons à leur contact, sans compter leur précieuse aide. »
Pour preuve : la Foire du livre de Bologne, internationalement connue en tant que lieu de vente et d’achats de droits pour les éditeurs. Avec le concours du Castello di Rivoli, le musée d’art contemporain de Turin, le Bookstock Village élabore une décoration spécifique des lieux. « Notre collaboration avec le musée dure depuis 1998 : nous explorons avec eux le thème choisi par le salon — Un giorno, tutto questo — et travaillons à un design propre. »
Résolument tournée vers l’avenir, l’édition 2018 a ainsi vu une approche graphique moderne, « en hommage aux artistes contemporains, ceux qui ont une vision du monde et parviennent tout à la fois à envisager l’avenir, tout en détruisant les murs de la rationalité ». Moralité, les murs blancs sont couverts de figures argentées, certaines sont creuses, pour inciter les enfants à dessiner à l’intérieur. « Et avec Bologne, nous avons réalisé des tables d’exposition, présentant des livres d’architecture et de design, en mesure de parler aux enfants. »
Une composante graphique très forte, marquante, et qui brille un peu partout : de quoi émerveiller les plus jeunes, et attirer les plus âgés.
Pour mêler modernité et histoire, on retrouve une exposition autour de la figure de Topolino — aka Mickey en Italie. Des bandes dessinées réalisées par les enfants sont exposées, dans une présentation qui se rattache également à la manifestation romaine #IoLeggoPerche (Je lis Parce Que…), qu’a instaurée l’Associazione Italiana Editori. « Et nous avons aussi organisé une animation particulière avec Assassin’s Creed, en présence des équipes d’Ubisoft, venues pour l’occasion. »
De fait, « le Bookstock Village incarne l’aboutissement de tous les projets mis en œuvre au cours de l’année, impliquant même l’université de Turin. Et nous ne perdons jamais une occasion de proposer des rencontres, ou de profiter de la venue d'un auteur chez nous ».
Maria-Giulia Brizio, au centre
Traversant depuis l’Arena jusqu’aux librairies, nous passons devant un lieu légèrement à l’écart. Sourire bienveillant de Maria-Giulia Brizio : « Ici, c’est notre blog qui prend vie. » Des élèves entre 12 et 18 ans réalisent quotidiennement des articles pour couvrir la manifestation. « Depuis 2010, ce projet existe. En 2011, nous avons passé un partenariat avec La Stampa [journal national basé à Turin, Ndr]. Désormais, un journaliste vient le matin pour une conférence de rédaction, et diriger l’équipe. »
On y choisit alors les événements de la journée, les auteurs à suivre, les interviews à produire et les choses à annoncer. Une quinzaine de rédacteurs est sur le pied de guerre — sur l’ensemble, 400 jeunes, volontaires, bénévoles ou en alternance encadrent le lieu. « Et les plus anciens reviennent pour accompagner les plus jeunes », ponctue Maria Giulia.
L’autre grande innovation de 2018, c’est la réalisation d’un livre, Parole Ostili, qui établit les dix règles essentielles à respecter sur internet – un manifeste pour sensibiliser aux agressions et intimidations. Le projet de livre, préfacé par Nicola Lagioia, auteur et commissaire général du Salon, est réalisé avec le soutien du ministère de l’Éducation, de l’Université et de la Recherche. Il fait suite à un manifeste que 10 auteurs italiens avaient signé, recueil de dix histoires sur la communication non agressive.
Un projet de plus, un lien supplémentaire, qui renforce la présence du livre pour chacun…
pour les photos : crédit ActuaLitté CC BY SA 2.0
DOSSIER - Turin : 2018, année exceptionnelle pour le Salon du livre
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
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