Apparues en 1884 sous la dénomination postes téléphoniques publics, les cabines à coups de fil n’ont connu de déploiement à grande échelle qu’au XXe siècle. La loi Macron autorisera leur démantèlement en 2015, avec la fin du service universel obligatoire, qui incomba à France Télécom. D’accord, mais on en fait quoi de ces... machins ?
Le déclin de ces cabines — pourtant bien pratiques en cas d’orage intempestif, quand bien même on n’avait personne à appeler — fut précipité par l’avènement du téléphone portable : dès 1998, les premiers signes apparaissent, alors que plus de 300.000 d’entre elles étaient en fonction, d’après feu-France Télécom, devenu depuis Orange.
Le développement fut progressif à compter des années 30 dans les grandes villes : les cabines deviennent plus accessibles au grand public, notamment dans les gares et centres-villes. En 2015, la loi Macron entérine officiellement la possibilité de démanteler les cabines téléphoniques.
Dans ce cadre, France Télécom était libérée de son obligation de service universel relative à ces installations, une obligation jusqu’alors inscrite dans le code des postes et des communications électroniques. Conclusion, la dernière des mohicanes fut démontée en 2017 en métropole.
Rappelons que France Télécom évoquait depuis longtemps la lourde facture qu’impliquait l’entretien coûteux de ces appareils, notamment face aux actes de vandalisme.
Et qu’en plus, certaines ne servaient qu’à peine une fois par mois. L’évolution législative aura raison de ces équipements, classés dans la catégorie obsolète, comme le Minitel ou le moulin à café non électrique. Bien triste, tout cela.
Mais certaines municipalités ne l’ont pas entendu de cette oreille et entre la fin des cabines et la fin du monde, celle de Houdan (Yvelines) a mené une réflexion sur l’usage qui pourrait être envisagé pour l’ancienne située sur le parvis de la Mairie et en face de l'église Saint‑Jacques‑le‑Majeur et Saint‑Christophe de Houdan.
Cette dernière, classée monument historique en 1840, est un chef‑d’œuvre gothique flamboyant avec un chœur de style Renaissance. Construite entre le XIᵉ et le XVIIIᵉ siècle grâce aux dons des habitants, elle abrite une fresque de 1582 évoquant un pèlerinage contre la peste et un orgue Cliquot de 1739 restauré
Bien qu’elle appartienne toujours à France Télécom, la commune avait demandé à la société de la laisser à disposition librement. Et ce « comme souvenir d’une époque où les téléphones portables n’existaient pas. Ce vestige du passé peut cependant accueillir de nouveaux usages » Les différentes pistes étudiées conduisirent à cette métamorphose en « boîte à livres », permettant où chacun dépose et/ou emprunte des ouvrages gratuitement.
« Outre le fait d’encourager le partage et le don, ce projet permettrait de favoriser l’accès à la culture pour tous en rendant les livres accessibles à n’importe quel moment », indiquait la ville dès février 2021. « Autre avantage, non négligeable, c’est que c’est une démarche doublement écocitoyenne, puisqu’elle permet à la fois de donner une seconde vie aux bouquins déjà lus, mais aussi à une cabine qui ne sert plus depuis un certain temps. »
Conclusion et à l’image d’initiatives similaires, la cabine fut recyclée, rejoignant les rangs de ces dizaines, peut-être centaines de cabines ayant désormais une seconde vie en France sous forme de boîtes à livres. Mais faute de recensement centralisé, un nombre précis reste indéterminé.
Depuis l’association locale qui, à Chambéry, a aménagé plusieurs cabines en "bibliothèques libres et autogérées" jusqu’aux sauvetages par des collectifs dans des villages comme Lespiteau ou Encausse-les-Thermes ou dans les Charentes maritimes qui ont ainsi créé des espaces pleinement fonctionnels, la cabine connaît un regain d’intérêt.
Et la tendance est internationale : on se souviendra que chez nos voisins britanniques, le “Adopt a Kiosk”, a reconverti depuis 2008 des milliers de "red boxes" en mini bibliothèques, défibrillateurs, ou installations artistiques. Ou encore dans le quartier du Petit Saconnex à Genève, avec des horaires d'ouverture de 10h à 18h.
Crédits photos : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Par Nicolas Gary
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