La maison Dior a missionné Jonathan Anderson pour une nouvelle collection de sacs à main… qui puisent dans la littérature, de quoi raviver l’intérêt pour la mode. Et en guise d’égérie, une certaine Rihanna, qui s’est emparée de la production. Le Book Tote, modèle emblématique, n’a pas fini de séduire !
Des sacs en tissu, à près de 3000 €, voici comment le directeur artistique exclusif de Dior a ouvert le bal pour ses premiers pas dans la maison de couture française. Depuis le 27 juin, les réseaux n’en démordent pas : la réinterprétation de l’iconique collection Book Tote suscite le débat. Le créateur irlandais a en effet mis un concitoyen immédiatement à l’honneur : un jeune écrivain promis à un brillant avenir, en matière de fantastique et d’horreur.
C’est avec une couverture revisitée du Dracula de Bram Stoker, également natif de l’île d’Émeraude, que Jonathan Anderson a ouvert les hostilités littéraires. Suivi, rapidement, par les délicieuses Liaisons dangereuses de Choderlos de Laclos. Puis, un classique Dior par Dior. Les deux références littéraires symboliseraient une union entre les deux pays, par le prisme culturel, assure d’ailleurs le créateur.
À LIRE - Dracula : un témoignage inédit de Bram Stoker retrouvé
Mais pour mieux saisir le choix de Bram Stoker, il faut replonger dans une interview donnée en 2017 à AnOther Magazine. Jonathan Anderson y évoquait les différents textes qui ont marqué sa vie de lecteur, autant que sa formation, son travail… et plus globalement, sa propre existence.
Sans surprise, les œuvres étaient toutes écrites par des artistes originaires d’Irlande : « Les Irlandais sont très doués pour raconter des histoires. Chaque pays exporte quelque chose, et je trouve remarquable qu’un si petit pays ait vu naître autant de grands écrivains. La littérature irlandaise est sans égale, et j’en suis très fière. Les auteurs que j’ai choisis pour Document — Samuel Beckett, James Joyce, Seamus Heaney, William Butler Yeats, Flann O’Brien et Bram Stoker — sont des géants de la littérature qui l'ont transformé, chacun à leur manière », expliquait-il.
« Il y a un côté romantique chez ces écrivains qui, selon moi, résume parfaitement l’Irlande. Beaucoup d’entre eux sont partis, bien sûr. Oscar Wilde est célèbre pour son départ. Quand je suis à Paris, je loge dans l’hôtel de la rive gauche qui était le sien et fut son ultime adresse. Joyce est également allé à Paris et a fini en Suisse. Beckett est allé à Paris, puis dans le sud de la France. Mais je pense que cela révèle quelque chose, en réalité… L’Irlande est un pays qui ne vous quitte jamais, où que vous alliez. »
Mais alors, Bram Stoker ? Eh bien cela remonte à son poste dans la maison de couture Brown Thomas. Anderson emménagea alors à Dublin et passant devant une maison de briques rouges, il découvre la plaque indiquant qu’Abraham (de son prénom complet) y écrivit son Dracula.
À LIRE - Tapi dans l'ombre, un texte perdu de Bram Stoker retrouvé par un lecteur
« J’ai dû m’y reprendre à deux fois, car je ne savais pas qu’un Irlandais avait écrit ce roman. Les gens pensent souvent que c’est un roman américain. Quand j’ai compris que Bram Stoker avait habité dans la même rue que moi, Kildare Street, à Dublin, j’ai mis quelques jours à m’en remettre », racontait-il.
« Dracula est devenu l’un des récits les plus emblématiques du XXᵉ siècle, il en existe plus de 200 adaptations cinématographiques, et pourtant son origine irlandaise est souvent ignorée. Le roman a souvent été interprété comme une métaphore des peurs liées à l’immigration, très présentes à la fin de l’époque victorienne — principalement venue d’Europe de l’Est à l’époque — ce qui montre bien à quel point l’histoire se répète. »
Plus qu’un simple clin d’œil artistique ou un parti pris esthétique, ce sac porterait une interprétation profondément ancrée dans les enjeux contemporains. Un terrain que le successeur tout récent de Maria Grazia Chiuri compte explorer pleinement à travers ses prochaines collections. Et le coup a plu : la chanteuse Rihanna, fidèle ambassadrice de Dior, a été aperçue arborant l’un de ces modèles lors de récentes apparitions publiques.
De quoi largement contribuer à l’engouement autour de cette ligne. Sa popularité et son influence dans le monde de la mode renforcent la visibilité de cette collection, qui s’adresse à un public sensible au croisement entre luxe, style et références culturelles.
Aperçue lors d’une virée parisienne, accompagnée de son petit garçon, Riot Rose, elle s’était rendue devant la boutique Dior de l’avenue Montaigne, puis assista au défilé. Et comme chaque apparition de Rihanna est un événement en soi, l’accessoire qu’elle portait aura littéralement enflammé les foules : le Book Tote Dracula de Dior, qui devait être présenté le lendemain lors de la Fashion Week et qui n’était bien entendu pas encore commercialisé.
La meilleure des publicités possibles. Inutile d’ailleurs de vous ruer sur le site de la maison, les différents modèles (à 3000 € pièce, rappelons-le) n’ont toujours pas été référencés... Pas avant début 2026, puisqu’il s’agit là de la collection Printemps/Été.
Crédits photos : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
Paru le 18/10/2024
128 pages
Urban Comics Editions
20,50 €
Commenter cet article