Comment faire émerger un livre dans un flot de nouveautés qui paraît sans relâche tout au long de l’année ? Comment construire autour de lui une communication mémorable ? Trois professionnels de la culture unissent leurs compétences et leur énergie au service d’une initiative pensée avant tout pour les éditeurs indépendants : Mizenvoix. L’idée ? Offrir aux maisons un service professionnel d’enregistrement audio d’extraits de leurs livres, lus par les auteurs eux-mêmes, ou des comédiens, si nécessaire.
Le 11/06/2025 à 17:59 par Hocine Bouhadjera
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Publié le :
11/06/2025 à 17:59
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« Il ne s’agit pas ici de produire des livres audio, mais de créer des extraits enregistrés dans des conditions techniques exigeantes, qui pourront ensuite être utilisés comme outils de communication et de valorisation éditoriale », présente Bénédicte Eustache, la partie communication du trio. Elle est entourée par le producteur sonore Geoffrey Quillaud et l'accompagnatrice artistique et préparation mentale, Camille Verleye.
Le premier, depuis 2020, accompagne des projets audio – podcasts, émissions de radio et formats mêlant écrit et son – à toutes les étapes de leur création : définition du concept, élaboration de la ligne éditoriale, travail d’écriture, prise de son, animation, montage, réalisation et diffusion. Il a collaboré avec des structures telles que Weezevent, La Clameur, Rinse France ou encore l’IUT de Montreuil.
La seconde accompagne les artistes entre mots et musique. Depuis 2021, elle développe un savoir-faire au service de la performance vocale et musicale, qu’elle a complété en 2024 par un travail autour du texte littéraire. Elle y prépare la voix et le corps, tout en accompagnant pensées et émotions jusqu’à la scène ou l’enregistrement.
Bénédicte Eustache, de son côté, après un parcours en lettres et en linguistique, officie en tant que traductrice littéraire et éditoriale depuis l’allemand, l’italien et l’anglais vers le français. Elle développe aussi des reportages dessinés et collabore régulièrement sur des sujets liés aux technologies, aux industries culturelles et au monde de l’édition - comme Microsoft, le Monde Diplomatique, le CNRS, The Irish Times, la Seine Musicale...
Ensemble, ils ont rejoint la société coopérative d’entrepreneurs Omnicité, qui regroupe plus de 300 entrepreneurs et entrepreneuses. Elle s'est récemment ouverte aux structures dédiées aux activités culturelles.
Concrètement, lorsqu’un éditeur ou un auteur leur confie leur projet littéraire, ils entament un travail de préparation avec Camille Verleye, qui aidera les artistes, s'il le souhaite, à surmonter la peur de l’enregistrement, et à habiter leur texte avec justesse. Une fois ce travail de mise en voix effectué, Geoffrey Quillaud prend le relais en studio pour l’enregistrement, le montage et l’habillage sonore. Cette capsule audio peut ensuite être diffusée : mise en ligne, communication, communiqué de presse, diffusion sur les plateformes de streaming, sur le web… « tout est adapté à l’objectif éditorial », promet Bénédicte Eustache, à la tête de cette dernière étape.
Pour ce faire, ils collaborent avec des studios indépendants, selon les besoins de chaque enregistrement. Le format privilégié repose sur un ensemble de trois capsules sonores, d’une durée de deux à cinq minutes chacune, pensées comme un tout cohérent pour mettre en valeur le livre de manière optimale.
Mais comment cette initiative a-t-elle germé dans l’esprit du trio ? « L’inspiration première est née avec Catherine Saint-Honoré, une autrice et comédienne, qui nous a proposé d’enregistrer, il y a un an, des extraits du livre qu'elle avait écrit, dans une logique de communication », partage avec nous Bénédicte Eustache.
Ils ont alors identifié les passages les plus propices à une mise en voix, et ont pris en charge l’enregistrement, le montage, et l’accompagnement à la diffusion. « Ce travail est resté une référence pour nous, et a servi de socle à la réflexion que nous menons depuis. Elle révèle à quel point une voix humaine, incarnée, peut transformer la réception d’un texte », constate cette dernière. Trois productions sonores ont ainsi vu le jour, diffusées en ligne.
Si le concept n’est pas totalement inédit, l'’initiative reste, à ce jour, particulièrement rare dans le paysage éditorial français, à ce niveau d'offre : « Des maisons diffusent déjà des extraits de leurs ouvrages, mais ceux-ci sont souvent lus dans des conditions d’enregistrement très sommaires, marquées par un certain amateurisme, voire bricolées en interne », constate la chargée de communication de Mizenvoix.
Les initiateurs du projet tiennent plus généralement à rappeler ce qui fait la singularité de leur démarche : « Contrairement à ce que proposent de plus en plus de médias ou de plateformes, où les extraits sont souvent lus par des intelligences artificielles, nous défendons une approche profondément humaine. Ce que nous proposons, ce sont des lectures faites par des personnes, pour d’autres personnes — avec une sensibilité, une attention, une intention. C’est une démarche éthique, engagée, fondée sur la transmission vivante des mots. »
D'où une affinité particulière pour l’édition indépendante, à laquelle ils se disent personnellement attachés : « Cela ne signifie pas que nous excluons de collaborer avec des maisons plus installées, mais nous trouvons une grande cohérence dans le dialogue avec des structures éditoriales qui portent une ligne forte, singulière, souvent engagée. Nous avons notamment pris contact avec le réseau Fontaine O Livre, qui constitue pour nous un point d’ancrage riche en pistes et en interlocuteurs pertinents », nous explique Bénédicte Eustache, elle-même membre active de l’association Fontaine O Livre.
Mizenvoix s'est officiellement lancée il y a deux mois, avec quelles ambitions à court, moyen et long termes ? « Notre objectif premier était simple : vérifier que notre idée répondait à un vrai besoin chez les éditeurs. Elle a émergé assez naturellement, mais nous n’étions pas certains, au départ, qu’elle trouverait un écho. Nous avons donc commencé à en parler autour de nous, à sonder des professionnels, à proposer des exemples concrets… Et nous avons été très positivement surpris. Les retours ont été non seulement encourageants, mais aussi enthousiastes. Certains nous ont même suggéré des pistes d’amélioration. »
Une phase de validation qui a été rapidement atteinte, et pour le moment, pas d’objectif chiffré : « Ce que nous cherchons surtout, ce sont des maisons d’édition curieuses, prêtes à discuter avec nous. Certaines nous ont déjà fait part de leur intérêt, ce qui est encourageant », assure Bénédicte Eustache.
Et de continuer : « Nous aimons profondément travailler le son, la voix, et surtout accompagner les auteurs. Ce qui nous importe, c’est de mettre en avant le travail artistique derrière chaque livre. Nous cherchons à créer un espace bienveillant, qui aide les auteurs à prendre confiance face au micro, chacun à sa manière. Ce qui nous anime, c’est de révéler les textes autrement, à travers une mise en voix sensible et soignée. »
Le trio de Mizenvoix en est convaincu : « Notre démarche peut aussi s’avérer très utile dans le cadre des campagnes de presse par exemple. Les journalistes reçoivent une quantité impressionnante de livres chaque mois, et n’ont tout simplement pas le temps de tous les lire. Plusieurs éditeurs nous ont dit que ce serait un vrai plus de pouvoir leur envoyer un extrait audio : cela ferait gagner du temps à tout le monde, et éviterait à certains livres de passer inaperçus. Quelques minutes d’écoute suffisent parfois à donner envie d’en découvrir davantage. »
Crédits photo : Mizenvoix
Par Hocine Bouhadjera
Contact : hb@actualitte.com
3 Commentaires
Yves CASTEL
12/06/2025 à 10:03
"Cette capsule audio peut ensuite être diffusée." Tout est dans le peut-être. Sans qu'on puisse vraiment parler d'arnaque, ça ressemble à certains agents littéraires et autres attachées de presse qui promettent beaucoup mais ne garantissent rien. C'est bien beau d'offrir ou plutôt faire payer un bel enregistrement, une belle capsule veux-je dire, pour la diffuser sur son compte Facebook ou Instagram où quelques amis l'écouteront, mais si l'on n'assure pas un minimum de diffusion, c'est simplement flatter l'égo des auteurs et inciter les éditeurs soit à écouter d'une oreille distraite des extraits de leur oeuvre inédite, comme ils survolent leurs manuscrits, soit à fa
Yves CASTEL
12/06/2025 à 10:04
soit à faire, disais-je, une promotion de leurs auteurs haut-de-gamme mais basique.
Ollivier Du Val
13/06/2025 à 17:01
L'idée est intéressante.
Elle montre à quel point la littérature est l'art de conter une histoire.
C'est celà que demandent les petits enfants, qu'on leurs raconte des histoires.
C'est profondément ancré dans l'être dit humain.
Alors cette entreprise est à saluer sinon à encourager.
Bien amicalement Ollivier Du Val.