Décerné par l'Union internationale des éditeurs (UIE, ou International Publishers Association, IPA), le Prix Voltaire distingue chaque année le travail et les efforts d'un ou d'une professionnelle, malgré les menaces, les intimidations et les interdictions. Ce lundi 2 juin, en Norvège, un éditeur et une éditrice biélorusses, tous deux exilés, ont été récompensés.
Le Forum mondial de l’expression (World Expression Forum, WEXFO), organisé les 2 et 3 juin 2025 à Lillehammer, en Norvège, a accueilli la cérémonie de remise du Prix Voltaire 2025. Cette distinction a salué cette année deux professionnels biélorusses : l'éditrice Nadja Kandrusevich (Koska) et l'éditeur Dmitri Strotsev (Hochroth Minsk).
L'un comme l'autre est en exil (en Pologne pour Kandrusevich, en Allemagne pour Strotsev), menacé par le régime autoritaire d'Alexandre Loukachenko qui s'est appliqué, ces dernières années, à réduire la liberté d'expression à peau de chagrin. Depuis sa réélection contestée au cours de l'été 2020, suivie d'importantes contestations, le président de la Biélorussie a multiplié les lois liberticides, réduisant l'espace de la liberté d'expression et de publication.
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Exilée depuis 2022, Nadja Kandrusevich a ouvert la maison d'édition Koska, spécialisée dans les ouvrages jeunesse, en 2018, en Biélorussie. Dmitri Strotsev, poète, éditeur et activiste, a pour sa part quitté son pays en 2022 après une arrestation. Il travaille désormais depuis Berlin et publie les textes d'auteurs biélorusses au sein de la maison Hochroth Minsk.
« Ce prix revient à tous les traducteurs, éditeurs et écrivains qui poursuivent leur travail envers et contre tout. À tous les enfants qui lisent ou écoutent des histoires avant de s'endormir et à tous les parents qui croient au pouvoir d'un bon livre », a souligné Nadja Kandrusevich, qui n'était pas présente lors de la cérémonie. Son collègue Dmitri Strotsev, à Lillehammer, a accepté la récompense, « un soutien pour la résistance démocratique biélorusse ».
« Aujourd'hui, une trentaine de maisons d'édition biélorusses ont refait surface ou repris leur travail en exil, et nous sommes tous étroitement liés. Nous formons une communauté éditoriale solidaire », s'est-il félicité.
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Le Prix Voltaire s'accompagne d'une dotation de 10.000 francs suisses, grâce au soutien financier de Al Dar Al Masriah Al Lubnaniah (Égypte), Albert Bonniers Förlag (Suède), Changbi Publishing (Corée du Sud), C.H.Beck (Allemagne), Dar El Shorouk (Égypte), Nowon Mungo (Corée du Sud) et Sahoipyoungnon Publishing (Corée du Sud).
L'année dernière, le Prix Voltaire avait récompensé l'éditeur et libraire palestinien Samir Mansour, dont la librairie, située dans la bande de Gaza, représente un véritable symbole de la liberté d'expression et de la culture au sein du territoire. L'établissement, détruit par une frappe israélienne en 2021, avait été totalement reconstruit l'année suivante.
Photographie : De gauche à droite : Dmitri Strotsev, Gvantsa Jobava et Kristenn Einarsson, lors de la cérémonie de remise du Prix Voltaire, le 2 juin 2025 à Lillehammer, en Norvège (Øystein Nordås/Wexfo)
Par Antoine Oury
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