Madame Grès, le Sphinx de la Haute Couture

Figure discrète mais monumentale de la mode, Madame Grès demeure une énigme, presque imperméable aux récits habituels de la couture, où anecdotes, influences extérieures et exubérance tiennent souvent lieu de matière première. À rebours de ses contemporains, elle s’est effacée derrière ses robes, refusant le spectacle de soi au profit d’un engagement total envers la forme, la rigueur et le silence de l’atelier.

Couturière sculpturale, elle domptait les étoffes comme d’autres la pierre ou l’argile, répétant sans relâche le même geste pour en atteindre l’absolu. Ses drapés, célèbres pour leur pureté intemporelle, n’étaient dictés ni par les modes ni par les voyages, mais par une exigence intérieure, presque monastique. À l’inverse des couturiers stars du XXe siècle, Grès n’a jamais cherché la lumière : elle l’a concentrée sur son œuvre.

Elle habilla pourtant les plus grandes, parmi lesquelles Marlene Dietrich, sans jamais céder à l’esbroufe médiatique. C’est ce mystère que lève aujourd’hui Anne Graire, sa petite-fille, dans un récit intime mêlant souvenirs, archives et émotions.

Surnommée le « Sphinx de la Haute Couture », Madame Grès n’a laissé que peu de mots, mais une œuvre souveraine, à la mesure des plus grands. Ce livre lui rend justice, révélant l’ampleur d’un génie discret et d’une femme libre.