À partir de décembre 2024 et jusqu'en mars 2025, la Gaîté Lyrique a été occupée par des collectifs militants, qui se sont engagés pour ne pas laisser plus de 200 mineurs isolés étrangers dormir dans la rue. L'expulsion de ces personnes constitue un « échec collectif » selon Arty Farty, Arte France, makesense, SINGA et Actes Sud, les partenaires associés de la Gaîté Lyrique. Ils avertissent à présent d'une mise en danger du lieu par la mairie de Paris, faute d'un soutien à la hauteur, dans un texte reproduit ci-dessous.
Le 15/05/2025 à 15:30 par Auteur invité
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15/05/2025 à 15:30
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Le 14 mai, la Ville de Paris vient enfin de nous rendre les clés de la Gaîté Lyrique et les équipes peuvent enfin réinvestir le lieu. L’établissement aura donc été fermé pendant plus de 5 mois. La perte d’exploitation liée à cette fermeture, dans laquelle la Gaîté Lyrique SAS n’a strictement aucune responsabilité, est de près de 3 millions d’euros.
D’ores et déjà, la Gaîté Lyrique est mobilisée pour compenser et absorber une part significative de cette perte financière. Nous avons demandé à la Ville de Paris, propriétaire du bâtiment, un soutien exceptionnel pour accompagner cet effort. Le Conseil municipal avait pris plusieurs résolutions en ce sens.
Aujourd’hui, c’est la douche froide. La Ville de Paris fait volte face et refuse de participer au redressement économique de l’établissement. C’est une décision incompréhensible au regard des engagements pris, du rayonnement culturel de la Gaîté Lyrique et de ses conséquences sociales immédiates sur le maintien de plus de 80 emplois.
Arty Farty, Arte France, makesense, SINGA et Actes Sud, partenaires associés de la Gaîté Lyrique déplorent ce manquement grave et annonceront prochainement plusieurs initiatives pour éviter la fermeture définitive de la Gaîté Lyrique.
Les équipes, les associés fondateurs, les partenaires et les résidents de la Gaîté Lyrique ont reçu cette semaine la décision de la Ville de Paris, propriétaire du bâtiment et collectivité partenaire, de ne pas apporter son soutien économique pour la réouverture du lieu, comme elle s’y était pourtant engagée à de nombreuses reprises, notamment par la voix de la maire Anne Hidalgo et son adjointe à la Culture Carine Rolland.
Pendant les 100 jours qu’a duré l’occupation de la Gaîté Lyrique, de décembre 2024 à mars 2025, ses équipes et cette gouvernance collégiale, représentant Arty Farty, Arte France, Singa et makesense, ont accepté de prendre une responsabilité qui ne leur incombait en rien, en lieu et place des autorités compétentes, et ce afin que la Ville de Paris ait le temps nécessaire pour mener à bien sa légitime négociation avec l’Etat. Cette négociation a malheureusement échoué, plus de 400 jeunes ont été expulsés sans solution de relogement et sont toujours pour la plupart, aujourd’hui, dans les rues de Paris, ce dont personne ne peut se satisfaire. Mais la sanction de cet échec collectif ne peut en aucun cas être le sacrifice d’un lieu culturel et de ses 80 emplois.
Lors des deux derniers Conseils municipaux, en février et avril 2025, l’exécutif de la mairie de Paris a pris soin de formuler et de faire adopter par les élus des vœux indiquant clairement la détermination de la Ville de Paris à soutenir la Gaîté Lyrique, son équipe et sa gouvernance, pour « rétablir au plus vite le service public culturel assuré par la Gaîté Lyrique ».
Le 14 septembre 2023 à l’Hôtel de Ville de Paris, la maire de Paris rappelait à la direction de la Gaîté Lyrique son attachement sans faille au projet de la Fabrique de l’époque, choisi et revendiqué par la collectivité, dans le cadre d’une réunion où précisément il s’agissait de mobiliser les institutions contre le retour, en France et en Europe, des vents mauvais de l’obscurantisme et des vagues les plus réactionnaires.
Le 18 mars 2025, le jour-même de l’évacuation de la Gaîté Lyrique par les forces de l’ordre, la maire de Paris rappelait sur France Inter le caractère « exceptionnel » de la Gaîté Lyrique et de son projet.
Le 9 avril 2025, l’adjointe à la Culture, Carine Rolland, rappelait encore au Conseil de Paris de façon on ne peut plus claire, comme elle l’avait fait précédemment devant les équipes de la Gaîté Lyrique le lundi 17 février à l’Hôtel de Ville, l’alignement et le soutien de la Ville de Paris à la Gaîté Lyrique et au projet de la Fabrique de l’époque :
Les équipes de la Gaîté Lyrique « ont agi en responsabilité, en hospitalité, comme elles le font toujours ». « Je voudrais vraiment ici réaffirmer notre soutien à l’activité artistique et culturelle de la Fabrique de l’époque, remercier l’ensemble des salariés qui se sont totalement mobilisés dans la mesure de leur capacité pendant toute cette période d’occupation du bâtiment à laquelle ils n’étaient par définition pas préparés ». « Il convient évidemment que nous puissions aujourd’hui accompagner l’établissement pour qu’il rouvre ses portes et accueille à nouveau le public dans les plus brefs délais, public qui affluait depuis la mise en place de la Fabrique de l’époque il y a deux ans. En ce sens, avec Patrick Bloche, 1er adjoint à la maire de Paris, nous rencontrerons très promptement, d’ici la fin du mois, le collectif de la Fabrique de l’époque. (...) Nous tiendrons donc – je tiens à être explicite sur ce point – les engagements pris dans le cadre du contrat qui nous lie à la Fabrique de l’époque, sur la gestion et l’exploitation de l’établissement. Nous poursuivrons le dialogue de gestion avec le concessionnaire et pourvoirons à toute forme d’indemnité si elle est nécessaire ».
Dans cette perspective, la Ville de Paris a mandaté sa Direction des Affaires Culturelles (DAC) pour organiser et planifier, chaque semaine, les modalités de refinancement nécessaire pour rouvrir le lieu et préserver les emplois. Ce dialogue de gestion entamé dès décembre 2024, a permis d’identifier la gravité des pertes et de partager les risques économiques et sociaux. Évaluées à plus de 3 millions d’euros, ces pertes - intégrant les frais directs liés à l’occupation, les pertes d’exploitation de la SAS et des partenaires artistiques - nécessitent des soutiens financiers complémentaires pour viser le rééquilibrage du modèle économique. Depuis plusieurs semaines, la Gaîté Lyrique a proposé différents scénarios de réouverture et de modalités de financements, tous déclinés par la Ville de Paris.
Le 9 mai, la Ville de Paris a versé la subvention annuelle dûe dans le cadre du contrat de concession pour l’exploitation régulière de l’institution. Cependant, en contradiction avec les engagements pris, les services de la Ville de Paris ont fait savoir aux associés et à la direction de la Gaîté Lyrique SAS qu’il n’y aurait pas de compensation financière à la perte d’exploitation exceptionnelle subie.
Cette décision d’abandonner la Gaîté Lyrique met directement en danger l’établissement, économiquement exsangue, conséquence directe de la perte d’exploitation associée aux 100 jours d’occupation, et très bientôt en procédure de sauvegarde, ses plus de 60 emplois salariés permanents et intermittents du spectacle, ainsi que les 20 emplois de prestataires directement rattachés au lieu (équipes de sécurité et de maintenance).
Qu’est ce qui justifie un tel revirement ? Qu’est ce qui vaut à la Gaîté Lyrique l’annulation des discussions financières et une fin de non-recevoir de la Ville de Paris, contrairement aux engagements qui ont été pris ?
Ces équipes qui « se sont remarquablement mobilisées » pendant près de 100 jours pour assurer une mission qui n’était pas la leur, méritent-elles ce revirement ?
Cet abandon politique et économique met en grande difficulté un projet collectif, culturel, social et d’intérêt général au moment le plus tendu et risqué de notre vie démocratique. Au-delà de l’équipe, il a des conséquences économiques et sociales pour tous les partenaires, acteurs culturels, festivals, artistes, en particulier du territoire parisien. Plus globalement, ce revirement prive le public d’un lieu auquel il témoigne au quotidien la puissance de son attachement, comme l’a rappelé à plusieurs reprises l’adjointe à la Culture, Carine Rolland.
Ainsi, 4000 artistes, élus et parlementaires, acteurs culturels et de la société civile ont apporté leur soutien à la Gaîté Lyrique – Fabrique de l’époque, en signant la tribune publiée le 27 février dernier par Télérama.
Chaque jour qui passe rend plus difficile et plus onéreuse la reconstruction économique indispensable de la Gaîté Lyrique. Il est désormais urgent que la collectivité respecte les engagements qu’elle a pris et qu’elle leur donne un cadre financier et un calendrier clair. C’est en ce sens que la Gaîté Lyrique a été contrainte de mettre en demeure la collectivité.
La Gaîté Lyrique SAS ne demande pas à la Ville de Paris de régler seule le problème. Les équipes et la gouvernance sont conscientes des tensions budgétaires qui existent et militent pour le respect et le bon usage du denier public. La Gaîté Lyrique réussit à s’autofinancer à près de 70%, ce qui est exceptionnel pour une institution de cette taille, et elle recommencera à le faire dès 2026. D’autres partenaires publics et privés sont prêts à apporter leur concours à ce redressement urgent et souhaité par tous. Mais elle demande à la Ville de Paris de tenir ses engagements et de participer financièrement à sa reconstruction économique, et plus encore de protéger les emplois qui œuvrent au quotidien pour le rayonnement culturel de son institution.
La Gaîté Lyrique – Fabrique de l’époque ne doit pas fermer ses portes, et elle fera tout pour continuer sa mission.
La Gaîté Lyrique - Fabrique de l’époque
Photographie : Eric Bréchemier, CC BY 2.0
Par Auteur invité
Contact : contact@actualitte.com
7 Commentaires
Houla
15/05/2025 à 20:57
Oui enfin, la Gaieté Lyrique est victime du syndrome de Bossuet :
- Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes.
https://fr.irefeurope.org/publications/les-pendules-a-lheure/article/lextreme-gauche-squatte-la-gaite-lyrique/
Pour ceux qui veulent en savoir plus, taper : SINGA, Benoit Hamon, Gaieté Lyrique...
On peut comprendre que la Ville de Paris tique à financer un truc qui s'est mis volontairement dans la panade...
seingelt
16/05/2025 à 07:27
Excellente histoire : ses Tartuffes gauchistes qui prennent des responsabilités morales en engageant un bien qui ne leur appartiennent pas, pensant que leur idole séculaire, la Société, va les rembourser par culpabilité : vous avez pris des responsabilités morales que vous estimez valorisantes : payez pour elles et assumez les, ne venez pas pleurnicher sur les conséquences de vos actes et demander l'aumône aux autres : le chantage à la culpabilité des bourgeois gauchistes est méprisable, la faillite sera leur punition.
toutoune
16/05/2025 à 12:36
Ah ces satanés gauchistes qui ont la mauvaise idée d'aider de plus démunis qu'eux... Bien fait pour eux ! Au moins c'est clair qu'on ne viendra pas chercher asile chez vous, Seingelt.
seingelt
16/05/2025 à 13:30
Et vous aurez tort : chez moi c'est une vraie Gaité, je fais asile à tous, hospitalité véritable, c'est sur mes deniers, je ne pleurniche pas, ne demande rien, et ne dis rien : tout à l'inverse du tartuffe gauchiste.
Ben oui
16/05/2025 à 12:44
Ce qui s'appelle "jouer sa peau"... Cf Taleb.
rez
16/05/2025 à 12:03
après le camp hidalgo et la gestion antisociale du ps + croix rouge des demandeurs d'asile et mineurs ("sors d'ici ou le crs va te gazer" devant les cameras et j'en passe) qui peut s'étonner?
nico
17/05/2025 à 07:34
La lecture des commentaires est encore plus attristante que la décision de la mairie de Paris.
Notre humanité sombre chaque jour de plus en plus dans les méandres de de l individualisme. On parle de culture, d intérêt général laissons les petites guéguerre politique de côté.
Nous avons tous intérêt à ce que des lieux comme la gaité soit sauvé, de gauche ou de droite.
La culture tout comme la littérature est un bien commun ne la perdons pas comme nous le faisons actuellement avec ce que nous nommons "nature". Culture et nature préservons notre humanité.