Il y a peu, on évoquait la première biographie du redoutable Panzerführer, Heinz Guderian, Perrin publie en parallèle la première biographie française de l' « ange de la mort ». Un nom devenu synonyme du monstre froid, Josef Mengele. Pour raconter le médecin bourreau, c'est un dermatologue, chargé de cours d'histoire de la médecine à l'université Paris-IV, Bruno Halioua, qui s’y colle.
L’auteur des Médecins d'Auschwitz retrace le parcours d’un traître au serment d’Hippocrate : l’enfance, à Günzburg en Bavière, l’ascension dans le monde universitaire, ses recherches en anthropologie raciale, son mariage et ses premières ambitions de médecin. Jusqu’ici, une trajectoire presque banale - à cette époque bien sûr - d’un jeune homme promis à un avenir brillant. Tout bascule lorsqu’il entre au service d’Hitler en 1940. Trois ans plus tard, il devient médecin à Auschwitz…
Dans le plus grand complexe concentrationnaire du Troisième Reich, au camp des Tziganes, puis à Birkenau, il se livre à des expérimentations sur les déportés. Il sélectionne, torture, tue au nom de la « science raciale ». Jumeaux, enfants, femmes enceintes, aucun ne sera épargné…
Oui, les jumeaux : il les sélectionnait personnellement parmi les déportés, et les soumettait à des injections de substances inconnues, des amputations inutiles et des transfusions sanguines entre eux. Si l'un des jumeaux mourait, l'autre était souvent tué pour des comparaisons post-mortem… Il créait, auprès des enfants, une illusion de bienveillance en se faisant appeler « Oncle Mengele » et en distribuant des bonbons, tout en les soumettant à des expériences atroces.
Derrière la blouse blanche, un bourreau méthodique, animé par un antisémitisme profond et un désir d’eugénisme radical. Il est formel : les Juifs ne sont pas des malades à soigner, mais des « anomalies » à éradiquer.
Obsédé par la couleur des yeux, il tentait de modifier la pigmentation oculaire en injectant des produits chimiques dans les yeux des détenus, provoquant douleurs intenses, infections et souvent la cécité. Il collectionnait également les yeux de ses victimes, toujours pour ses recherches...
La guerre terminée, commence une longue fuite. Munich, l’Argentine, le Paraguay, le Brésil : il devient un fantôme, protégé par des réseaux complices, dissimulé par des sympathisants, invisible aux yeux des justices du monde. Jusqu’à sa mort, en 1979 Pas de procès, pas de salle d’audience, juste une fin minuscule.
Il faudra attendre 1985 pour que sa mort soit officiellement confirmée — et que le monde prenne conscience qu’il a définitivement échappé à la justice des hommes. À la suite du Prix Goncourt 2017 , La Disparition de Josef Mengele, signé Olivier Guez, la biographie d'une figure les plus terribles du XXe siècle. À défaut de justice, reste la mémoire — et la minutie avec laquelle Bruno Halioua la ressuscite.
Publiée le
10/04/2025 à 18:17
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Félix
11/04/2025 à 17:24
Merci de parler d'un sujet tabou. Cela me ramène à l'esprit le film "Marathon Man" (Le coureur de marathon) de John Schlesinger en 1976, avec notamment Dustin Hoffman et Sir Charles Olivier.
Film plusieurs fois oscarisé, il raconte justement l'histoire d'un ancien dentiste nazi cette-fois-çi des camps de la mort, Szell, reconnu par une de ses anciennes victimes de la Shoah dans les rues de New-York.
L'histoire de Mengele est si terrible que son nom ne figure même pas dans la partie des noms propres du Petit Larousse Illustré! Mais, elle nous renvoie à la science des "eugenics", mot attesté vers 1883 et composé par F. Galton (1822-1911), un disciple de Darwin. Ce terme désigne la discipline "fortement critiquée et discréditée" qui étudie les "méthodes susceptibles d'améliorer les caractères propres des populations humaines", et relative à "la politique des régimes racistes et dictatoriaux" (page 799 du DHLF, Dictionnaire Historique de la Langue Française, d'Alain Rey).
Finalement, il est reconfortant de savoir que tous ces suppôts du nazisme - tel Eichmann - n'auront quand même pas échappé à la justice divine.
Félix
11/04/2025 à 18:12
Erratum : l'autre acteur était Sir Laurence Olivier, le grand homme de théâtre shakespearien.