Sous la présidence d’honneur de Frédéric Vitoux, membre de l’Académie française, le 38ᵉ Prix Jean Freustié a été attribué à Gabriella Zalapì pour son roman Ilaria ou la conquête de la désobéissance, publié aux éditions Zoé. La remise du prix s’est tenue le jeudi 27 mars 2025 dans les salons de l’Hôtel Pont Royal, à l’occasion d’une réception officielle.
Le 27/03/2025 à 17:59 par Hocine Bouhadjera
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Le jury, présidé par Simonetta Greggio, était composé de Christian Authier, Dominique Barbéris, Henri-Hugues Lejeune, Franck Maubert, Olivier Mony, Éric Neuhoff, Anthony Palou, Yann Queffélec et Philippe Vilain. Ensemble, ils ont distingué ce texte fort et sensible au sein de la sélection 2025.
Parmi les trois finalistes en lice — On est le mauvais garçon qu’on peut de Nicolas Fargues (P.O.L), Parmi d’autres solitudes d’Yves Harté (Le Cherche Midi) et donc Ilaria ou la conquête de la désobéissance de Gabriella Zalapì (Zoé) — c’est ce dernier roman qui s’est imposé au premier tour de scrutin, à la majorité absolue, comme l’a annoncé Simonetta Greggio.
Olivier Mony a présenté Gabriella Zalapì en « auteure un peu anglaise, un peu italienne, un peu suisse, née à Milan, vivant à Paris et qui, plasticienne de formation, écrit en français. Deux premiers romans sont parus, Antonia et Willibald, tissant avec une grâce toute particulière les fils de l’intime et de l’histoire familiale. (...) Tout dans Ilaria ou la conquête de la désobéissance relève du prodige littéraire. Tout n’est qu’évitement des pièges posés par sa propre narration, là où un auteur moins délicat aurait gaiement joué du registre des émotions. (...) Avec un art sublime de l’ellipse, elle avance, vite et la justesse de l’écriture fait droit à la justice. »
Le roman retrace l’itinéraire d’Ilaria, une fillette de huit ans qui, un jour de mai 1980, monte dans la voiture de son père, Fulvio, à la sortie de l’école. Ensemble, ils sillonnent l’Italie, enchaînant les petits hôtels et les aires d’autoroute, écoutant la radio et partageant des moments de jeu.
Au fil de ce voyage, Ilaria apprend à conduire, à mentir, et découvre tour à tour Milan, Trieste, un internat à Rome, avant de connaître une vie rurale et lumineuse en Sicile. Ce périple, qui pourrait évoquer une enfance presque ordinaire, est en réalité rythmé par les excès d’un père instable, comparé à un « guépard nerveux » évoluant dans un brouillard de nicotine.
Le style de Gabriella Zalapì, marqué par sa précision et sa rapidité, se distingue par l’absence de tout pathos. À travers une langue épurée, elle donne à voir la lente décomposition intérieure d’une enfant livrée à elle-même, contrainte de tracer seule son chemin. Fidèle à l’esthétique de ses précédents ouvrages, l’autrice opte pour des phrases brèves, une écriture sobre et maîtrisée, dans un souci constant de clarté et de retenue. Elle dresse ainsi le portrait contrasté d’un père en lutte avec ses propres démons et d’une fille déchirée entre fidélités contradictoires, le tout porté par une tonalité volontairement lumineuse.
Née en Angleterre et de nationalités italienne et suisse, Gabriella Zalapì vit à Paris. Son premier roman, Antonia (Zoé, 2019), lui a valu le Grand Prix de l’héroïne Madame Figaro 2019 ainsi que le Prix Bibliomedia 2020. Son second livre, Willibald (Zoé, 2022), qui explore l’exil à travers la figure sacrificielle d’Abraham, a confirmé sa place singulière dans le paysage littéraire contemporain, saluée par la critique.
Créé en 1987 à l’initiative de Nicole Chardaire-Vitoux, Frédéric Vitoux et Bernard Frank, le prix littéraire Jean Freustié a vu le jour afin de perpétuer la mémoire de l’écrivain Jean Freustié (1914-1983). Il a réuni autour de son épouse, Christiane Teurlay-Freustié, un jury composé de romanciers, de journalistes littéraires et d’amis proches de l’auteur.
En 1996, afin d’assurer la pérennité du prix, Christiane Teurlay-Freustié, décédée en 2010, fonde la Fondation Prix Jean Freustié, placée sous l’égide de la Fondation de France, qui en garantit la gestion. La coordination du prix est assurée par Pia Daix, secrétaire générale du jury, qui veille à en maintenir l’esprit fidèle aux souhaits de la fondatrice. Grâce à un capital généreusement constitué, ce prix est aujourd’hui le prix littéraire annuel le mieux doté en France, avec une récompense de 25.000 euros.
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Attribué à un écrivain d’expression française pour une œuvre en prose — qu’il s’agisse d’un roman, d’un recueil de nouvelles, d’une autobiographie ou d’un essai — le prix distingue avant tout un auteur prometteur ou vient encourager une voix littéraire encore en dehors du cercle des grands prix d’automne. En 2024, Mark Greene avait été récompensé pour son récit Réel Madrid, publié aux éditions Plein Jour.
Crédits photo : Roman Lusser (Zoé)
Par Hocine Bouhadjera
Contact : hb@actualitte.com
Paru le 23/08/2024
176 pages
Editions Zoé
17,00 €
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