Il y a cent ans, Virginia Woolf publiait Mrs Dalloway, roman qui allait marquer un tournant dans la littérature, avec deux trois autres chefs d'oeuvres. Une journée dans la vie de Clarissa, femme de la haute société londonienne.
La même année que Gatsby le Magnifique et Le Procès de Franz Kafka, Virginia Woolf libère le flux de conscience, laissant les pensées de ses personnages se déployer sans entrave. À l’occasion des préparatifs d’une réception mondaine, Clarissa s’abandonne aux méandres de sa mémoire, où affleurent la solitude, le passage du temps et les cicatrices invisibles...
Le roman, dont le titre envisagé était Les Heures, tisse un parallèle entre Clarissa Dalloway et Septimus Warren Smith, vétéran hanté par la guerre qui précède. Entre l’ordre feutré de la bourgeoisie et le tumulte intérieur d’un esprit brisé, cette dualité interroge, avec finesse, la place de l’individu dans une société.
Tous les romans dits « expérimentaux » n’ont pas eu cette capacité à traverser le temps. Avec une force rare, Virginia Woolf fait advenir la complexité de nos identités.
À la faveur de cet anniversaire, La Pléiade propose un tirage spécial qui réunit le texte, mais aussi Orlando de 1928, et Une pièce à soi de 1929. Trois formes littéraires - un roman, un récit biographique et un essai -, qui incarnent les différentes facettes de l'écrivaine.
Orlando, qui a récemment inspiré un film à Paul P. Preciado, traverse 350 ans d’histoire, des fastes élisabéthains aux années 1920. Le protagoniste, d’abord jeune aristocrate promis à la cour d’Élisabeth Ier, s’éveille un jour dans un autre siècle, devenu femme. Virginia Woolf est formelle : « Dans chaque être humain se produit une oscillation d’un sexe à l’autre… »
Dans le troisième texte, elle affirme que les femmes ont besoin d’un espace à elles pour écrire et créer, bien au-delà des salons où on les cantonne. Ce texte, bien plus qu’un manifeste féministe, s’impose comme une pierre angulaire de son art poétique, un trait d’union entre littérature et émancipation sociale. La préface de cette belle édition, signée de Gilles Philippe, entend éclairer ces trois œuvres cultes.
Avec l’entrée d’Une pièce à soi au catalogue de la Pléiade, dans une traduction inédite de Laurent Bury, c’est une nouvelle étape dans la reconnaissance d’une écrivaine qui, un siècle plus tard, malgré l'évolution des formes et des structures sociales, demeure plus actuelle que jamais.
Publiée le
06/03/2025 à 18:14
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Paru le 27/02/2025
732 pages
Editions Gallimard
62,00 €
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