#Assises2025 – À la veille des Assises 2025 réunissant les maisons indépendantes à Bordeaux, Esther Merino a lancé un appel à toutes et tous. Présidente de la Fédération des éditions indépendantes, ainsi que de l'Association des Éditeurs en Nouvelle Aquitaine, elle dirige Les Monédières, maison installée à Limoges. Un anneau pour les gouverner tous ? Pas même : uniquement les mots justes...
Le 19/02/2025 à 23:20 par Nicolas Gary
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Publié le :
19/02/2025 à 23:20
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Un discours engagé, investi, entier : à l'image de l'éditrice et du catalogue qu'elle construit. Durant deux jours, ces Assises ouvriront la voie à plus que des constats. Ainsi qu'elle le clame : « Nous n’avons pas besoin qu’on nous dise ce qui ne va pas : nous le vivons chaque jour. » Alors oui, une édition indépendante garante de la bibliodiversité, avec des difficultés clairement identifiées et des problématiques propres. Mais un discours résolument combattif et tourné vers l'avenir. Que ActuaLitté vous propose de découvrir ci-dessous.
Nous, chères consœurs, chers confrères éditeurs indépendants, sommes l’âme de cette filière, son moteur, son souffle. Sans nous, pas de bibliodiversité. Pas autant d’engagement ni de détermination pour défendre ses valeurs. Pas de textes portés par de nouvelles voix atypiques. Pas de prise de risques.
Mais voilà qu’avec nous, ou pour nous, moins de visibilité, des ressources plus limitées, des moyens financiers qui s’amenuisent, qui s’épuisent... et nous épuisent. Nous, l’édition indépendante — celle qui ose plus qu’elle ne tient compte des calculs —, sommes pourtant le pilier de l’économie de cette chaîne qui nous fait tant subir.
C’est dans un contexte sous tension qu’évoluent les modèles de lecture, d’écriture et de consommation (n’ayons pas peur du mot : nos maisons sont aussi des entreprises). Et c’est dans ce contexte — allez-y, vous pouvez sortir vos mouchoirs — je ne vais pas la faire courte, c’est le moment émotion :
• d’épuisement après toutes ces crises successives ;
• de concentration ;
• de prolifération des mastodontes de la vente des livres d’occasion ;
• de méconnaissance générale de notre métier ;
• du développement de l’auto-édition qui dévalorise notre travail ;
• d’invisibilité de nos titres en librairie, en médiathèque, de nos auteurs dans les salons ;
• de la suppression prochaine du tarif Livres et brochures ;
• de l’annulation des crédits du Pass culture ;
• ou tout récemment sorties du chapeau, des interprétations hasardeuses sur ce qui est « un commerce de vente au détail de livres » pour éviter d’appliquer des frais de port. Parce que, oui, le tarif postal est apparemment prohibitif, pour tous, même pour les géants du net.
Je disais donc, c’est dans cet environnement compliqué, où nous devons faire face à tous ces défis, que ces deuxièmes Assises de l’édition indépendante se tiennent aujourd’hui.
À un moment où nous devons prendre le virage pour éviter le mur. Mais, l’édition indépendante a toujours trouvé de nouvelles voies, de nouveaux modèles. Nous avons maintes fois réinventé nos façons de travailler. Nous nous sommes fédérés pour exister, pour résister. Mais aujourd’hui, résister ne suffit plus.
Si de nos premières Assises nous étions sortis « visibles » et aussi un peu plus « quantifiés », nous pouvons regarder avec fierté le chemin parcouru depuis par notre Fédération. Cette fédération qui n’a cessé de grandir et sa représentativité de se renforcer.
Organisée en 13 associations d’éditeurs, présente dans 12 régions de France métropolitaine et des îles y compris dans la région Île-de-France, la Fédéi regroupe aujourd’hui 477 maisons d’édition : un réseau dense et créatif.
Tel un chef d’orchestre, ces maisons animent l’ensemble de maillons de la chaîne du livre : auteurs, illustrateurs, maquettistes, correcteurs, traducteurs, imprimeurs, etc. Ces maisons font vivre les territoires.
Ensemble, avec cette belle fédération, nous avons fait avancer des initiatives. Nous avons bâti des projets pour valoriser, défendre et mettre en lumière l’édition indépendante. Pour vous tenir informés, nos avons développé notre communication avec l’envoi de newsletter et la création du « Petit journal ».
Nous avons créé et publié la Charte de l’édition indépendante : témoin de nos engagements communs, elle est là, souligne notre éthique et fait désormais office de boussole pour nos pratiques et, surtout, nos valeurs.
Nous avons montré que des solutions de mutualisation sont possibles offrant à la graine Oplibris, un terreau où germer, se développer. Projet consolidé et constitué en SCIC, il vole maintenant de ses propres ailes.
Les « mardis de l’édition indépendante », des rencontres littéraires en ligne et en podcast, en partenariat avec des libraires, donnent une visibilité à nos titres du fonds, à nos maisons, tout en faisant intervenir d’autres acteurs de l’interprofession. (émission réalisée en collaboration avec Un endroit où aller le soutien du Centre National du Livre)
Mais, au-delà de ces réalisations concrètes, notre Fédération n’a cessé de travailler en profondeur pour expliquer la diversité et la richesse de nos structures, expliquer nos différentes façons de fonctionner, pour porter notre voix.
En parcourant avec grand plaisir des kilomètres en train : 11.479 très exactement l’année dernière, soit 229.580 longueurs de brasse coulée – c’est SNCF Connect qui me l’a dit – la Fédéi est devenue incontournable pour les acteurs professionnels ainsi que pour les partenaires institutionnels avec lesquels nous avons tissé des relations de dialogue et de collaboration, et à qui on a su faire entendre une parole reconnue aujourd’hui comme indispensable et surtout constructive.
N’en déplaise à certains « peut-être sans être contre personne, nous sommes là et faisons désormais pleinement partie du panorama de l’édition en France. Ainsi, nous continuerons à mobiliser nos forces pour faire avancer les dossiers qui ont failli aboutir cette année.
Je parle de notre représentation, j’évoque un certain siège, au sein d’une belle et grande maison qui est aussi la nôtre. Parce que notre conviction est toujours intacte, nous saurons nous donner les moyens, faisant encore preuve de persévérance pour montrer notre engagement à ancrer la Fédéi au cœur du débat culturel national, pour que notre voix soit davantage écoutée, là où elle doit aussi l’être, face aux grands enjeux du secteur.
Parce le constat est simple, mais puissant : ensemble, nous sommes une force. Alors, comme nous avons l’habitude de le faire, jetons nos mouchoirs et mettons à profit notre résilience créative lors de ces Assises.
Pendant ces 2 jours, tirons pleinement parti de l’intelligence collective. Parce qu’aujourd’hui, nous le savons, notre voix ne représente que quelques centaines de millions d’euros. Rien, comparé aux presque trois milliards que pèse le marché de l’édition...
Oui, mais voilà. C’est ça, l’édition indépendante portée par cette Fédération : un tout petit rien ou un pas grand-chose qui fait TOUTE la différence. Plus que jamais, nous devons réaffirmer notre place et notre travail pour valoriser notre métier. Ces Assises sont notre espace.
Elles ne doivent pas être un simple état des lieux, mais un laboratoire d’idées et de solutions possibles. Un moment pour nous retrouver et réfléchir ensemble. Parce que nous n’avons pas besoin qu’on nous dise ce qui ne va pas : nous le vivons chaque jour. Mais cette année, il était quand même important de mettre, avec une étude, des chiffres sur nos difficultés.
Pour cette édition, nous avons voulu ouvrir encore plus grand les portes du dialogue avec les auteurs, libraires, diffuseurs, distributeurs et institutions. Parce que nous le savons, aussi : si nous voulons bâtir un avenir durable, nous devons le faire ensemble.
Alors, pendant ces deux jours, échangeons sans détour, exposons nos visions, explorons les chemins possibles. Ensemble, trouvons comment continuer à exister tous à innover, à surprendre.
Nous avons besoin de nos idées, de solutions concrètes, d’une voix forte et collective pour asseoir notre avenir. En définitive, nous avons plus que jamais besoin de renforcer les liens entre les différents maillons de la chaîne. Car si nous sommes là aujourd’hui, c’est bien parce que nous avons encore tant de choses à dire et à défendre.
Profitons de ces deux journées pour nous écouter, partager, débattre, imaginer. Ne l’oubliez pas, l’avenir de l’édition indépendante, c’est nous qui l’écrivons. Et je ne peux quitter cette estrade sans vous remercier vous : Région Nouvelle Aquitaine, Ministère de la Culture, la Drac, Bordeaux Métropole, la ville de Bordeaux, le CNL, la Sofia, le CFC, nos indispensables et généreux soutiens institutionnels.
Vous, l’Alca, la FILL, le lycée viticole Libourne-Montagne, le Tnba pour votre soutien professionnel et technique.
Vous aussi, sponsors de cette manifestation : Audiens, CPI, Printcorp, Artic Papers, Corlet, Sepec, Insist, Dilicom, Pollen, Mobilivre. Vous, partenaires média Actualité et Livre hebdo, pour l’ampleur que vous donnez à notre voix. (Ainsi qu'Axiales pour l'étude réalisée)
Vous remercier, vous, chères consœurs, chers confrères, bénévoles, étudiants et vous tous qui êtes venus de toute la France pour participer à cet événement. Et enfin, tout particulièrement, je vous remercie vous. Vous, celles et ceux que vous voyez derrière moi, qui, avec votre temps, votre énergie, votre générosité, votre bonne humeur et votre engagement avez fait de ces assises une réalité, et j’en suis sûre, une réussite.
Audace, créativité, résilience, puisons la force qui est en nous et créons ensemble, un meilleur futur pour l’édition. Ensemble faisons exister notre demain. Je vous souhaite la bienvenue à ces 2 Assises de l’édition indépendante.
Crédits photos : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
DOSSIER - Economie, coopération au coeur des Assises de l'édition indépendante 2025
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
1 Commentaire
D. L.
20/02/2025 à 09:45
Bof
Désolé, les gars, mais qu'avez-vous réellement fait en 3 ans?
1 grosse messe à Aix il y a 2 ans, oui, bougé un peu, mais concrètement?
Bolloré continue à faire sa route en raflant tout ce qu'il peut pour gaver ses actionnaires, .
La chaîne du livre n'a pas bougé d'un micron :
- Les libraires poussent toujours les cartons des industriels et méprisent les indépendants
- Les Salons du livres font la même chose, et les rares Salons d'éditeurs disparaissent
- La presse ne connaît les éditeurs indépendants que pour un éclat, le dernier souvent (ou le rachat par un groupe)
- Les Prix littéraires sont toujours plus nombreux et, comme les autres, servent la soupe.
- Les lecteurs sont si gavés des mêmes têtes de gondoles qu'ils ont oublié d'être curieux.
Alors, ce qui va être dit et fait à ces assises a déjà eu lieu sans réel changement. Quel argument avez-vous pour faire espérer un autre avenir que le présent ?
Mais bon, une bonne messe, ça fait du bien… ou pas !