Editis en crise : la fusion avec CMI met le feu aux poudres
Dans la matinée du 11 février, quelque 250 salariés occupaient l’atrium du siège social d’Editis. Cette mobilisation découlait d’un appel à la grève de plusieurs organisations syndicales ce débrayage atteste d’un désaveu, face aux choix qu’imposerait la direction.
Le 12/02/2025 à 17:21 par Nicolas Gary
13 Réactions | 616 Partages
Publié le :
12/02/2025 à 17:21
13
Commentaires
616
Partages
Au commencement était le rachat du groupe par le milliardaire Daniel Kretinski : Editis devenait officiellement propriété de International Media Invest (IMI, filiale de CMI) en novembre 2023, après cinq années au sein du groupe Vivendi, propriété de Vincent Bolloré.
Lorsque cette passation fut officalisée, on s'est pris à rêver, au 92 avenue de France, d'autant plus que les figures de proue n'étaient autre que Denis Olivennes et Catherine Lucet. Le premier, président non exécutif, avait peut-être tout à prouver dans l'industrie du livre, mais la seconde remplaçait Michèle Benbunan, au poste de directrice générale, mettant fin à l'ère Bolloré. Une nouvelle ère... qui ne résisterait pas à l'épreuve du feu. Ainsi, au terme d’une grève que certains qualifient d’historique, le torchon brûle, un peu plus encore.
Dernier épisode alimentant le malaise des salariés, l’arrivée prochaine des salariés de CMI France, branche média du groupe de Daniel Kretinsky. Une décision découlant de l’actionnaire, que porte le président non exécutif, Denis Olivennes, « et qui nous tombe dessus. Moins de surface, plus de salariés et, en attendant, chacun fait valoir ses impératifs, au détriment des besoins des collègues », témoignait une salariée.
Ça déménage avenue de France
La couleuvre qui ne s'avale qu'avec difficulté, tiendrait donc à ce projet de regroupement des équipes côté édition et presse. Un revirement inattendu, puisque dans les premiers temps, Denis Olivennes avait garanti que rien de tel n'arriverait. Mieux : « On nous avait promis autre chose par rapport à l'ère Bolloré. Plus on progresse, plus les masques tombent, on se rend compte que ce n’est pas forcément mieux », déplorait un salarié côté diffusion distribution.
Partir, c'est mourir un peu, donc mettre en péril tant la dynamique qui anime les équipes que l'efficacité de leur travail. Réduire les coûts, chacun l'a compris, mais plus préoccupant encore « il pose une alternative intenable : accepter la décision ou opter pour le plan social. La crise du flex office est en marche ou comment « menacer l'identité du groupe », estime une salariée.
Voici le contexte qui a débouché sur la grève de ce 11 février, appuyée par des slogans simples : « Consultez-nous, pas seulement les statistiques » ou encore « On sait déjà comment “bien vivre ensemble” ». Et pointant la perspective de postes de travail partagés : « Un bureau ce n’est pas une chaise musicale ».
Autant de messages faisant écho à la lettre que ces mêmes salariés adressaient la veille à Catherine Lucet : « Nous vous demandons, en tant que directrice générale, de défendre vos salariés », y lisait-on.
Touche pas à mon poste !
Car cette logique de stricte rationalisation des coûts menacera l’aspect artisanal de leurs métiers ainsi que l’identité de leurs maisons d’édition, estiment-ils. Et de réitérer les différentes demandes adressées à la direction.
En premier lieu est réclamé le report du calendrier général du projet afin de garantir un processus réfléchi, rigoureux et mené sans précipitation. Ils insistent également sur le besoin d’équité entre tous les employés d’Editis, condition essentielle pour préserver un climat de travail serein et juste.
Par ailleurs, une évaluation complète et transparente des risques pour la santé et la sécurité des salariés s’imposerait —, et ce, à travers toutes les étapes du réaménagement, avant, pendant et après sa mise en œuvre. Enfin, ils dénoncent une gestion imposée sans véritable concertation, qui ne tient aucunement compte des réalités du terrain, et exigent que ce mode de gouvernance prenne fin.
“Ce n'est jamais indolore”
Sollicitée, la direction d’Editis ne fait pas de commentaires. Pour l’heure, donc, seule la lettre de Catherine Lucet aux salariés, réponse au courrier qui lui fut adressé, servira de ligne directrice.
Elle pointe un marché du livre complexe, obligeant à des réformes autant qu’à regarder « la réalité en face, pour conserver notre compétitivité et renouveler notre potentiel de croissance. Y compris en ajustant le niveau de nos frais généraux, ce qui n’est jamais indolore, mais permet de préserver l’essentiel ».
Et d’ajouter : « Il ne vous aura pas échappé que des mouvements analogues sont en cours chez nos confrères : déménagements, concentrations... […] Je mesure l’inquiétude suscitée, inhérente à tout projet de ce type, inquiétude à laquelle nous nous efforçons de répondre du mieux que nous le pouvons. » En somme : « Nous vivons, sur le plan économique, un moment difficile pour Editis », estime la DG.
Ce 11 février, les grévistes réunis ont pu entendre ce discours, lors d'une prise de parole : « Cette grève est un des moyens que nous avons pour vous faire savoir que nous voulons être considérés. Les salariés ne sont pas prêts à enterrer leurs conditions de travail sous la terre de la finance. Nous sommes attachés à nos métiers, nous avons l’amour des livres bien fait et nous n’accepterons pas de travailler dans des modes dégradés, pour produire des livres dégradés. »
Ce ne serait donc qu'un début ?
Crédits photo : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
DOSSIER - “Grands romans”, une littérature inoubliable
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
Plus d'articles sur le même thème
Autres articles de la rubrique Métiers
13 Commentaires
Mon œil ouai
12/02/2025 à 20:31
Tu parles! La direction aura bien ses petits bureaux. Ils ont fait des soit disant cocons qui en final seront les bureaux de ces messieurs dames pendant que nous on sera en flex office ! Le fric ? Tu parles aussi, ils veulent faire des économies non pas pour les salariés mais surtout pour être certains de continuer à s’en mettre plein les poches pendant que les salariés continuent d’avoir 0% d’augmentation. Oui nous regrettons l’ère Bolloré et toutes ses équipes qui nous respectaient.
Vos cartons vous allez vous les faire, votre télétravail 5 jours imposés vous allez vous faire attraper par l’inspection du travail. Ils font comme ils veulent nous on fera comme on veut et vous ne pourrez pas tous nous virer. Nos actions vous allez vous les prendre en pleine face parce qu’on ne va pas s’arrêter là
Dangereux
14/02/2025 à 15:05
Si ils masquent la vérité sur le nombre de postes de travail reels aux experts qui contrôleront à la fin des travaux, ils s'exposent à de gros problèmes...
A vos calculettes au retour !
Réunion de crise aujourd’hui à 17h30
12/02/2025 à 20:44
Aujourd’hui en réunion avec la direction nous avons été informé par la direction de la fin des négociations avec les organisations syndicales. Télétravail 5 jours, maintien du transport, ticket restaurant à 12 euros, indemnités télétravail. La direction a fait savoir qu’elle ne cédera jamais sur une prime compensatrice. J’ai ravalé ma salive et mon envie de leur faire connaître ma colère. Tout sera merveilleux à Ivry et dans les espaces loués dans Paris pour des réunions. Et le reste ?? Je n’ai jamais assisté à de telles absurdités. Elles ne connaissent rien à rien. Je soutiens les salariés grévistes et je leur dis de ne rien lâcher au nom de l’amour que nous portons à nos métiers.
Le club des 100...
13/02/2025 à 19:59
Après le club des 5 (DGA) : ADMF.
Voici le club des 100
"on" (le club des 5) informe ces gens (le club des 100) en Loose dé, tard le soir, au cas où certains ne les verraient...🤣 de tout ce qui se passe en Négos avec les OS (ces chers petits) et autre. C'est du jamais vu : Sans foi ni lois...
Et ça parle de dialogue social...🤪
En réalité ça ne sait même pas de quoi ça parle... 🤕
Franchement, en ce moment on est vraiment dans un no man's land plus simplement dit en français on touche le fond...
C'est du jamais vu..
AAS
Dites merci à Dalila Zein
12/02/2025 à 21:13
Ne cherchez pas trop loin, c’est elle qui met le barouf chez vous comme elle l’a fait ailleurs.
Article : Les salariés de l’AFP ne seront donc nullement surpris si dans les mois qui viennent, Dalila Zein envisage de réduire les effectifs (« réduction des coûts » et « restructuring »), supprimer certaines activités (« cessions ») en les sous-traitant (« optimisation du cash »), vendre le siège de l’AFP (« projets immobiliers »), le tout en privatisant l’AFP (« business transformation ») au nom de la-nécessaire-réforme-pour-sauver-l’AFP-dans-un- « environnement complexe ».
Elle fait ce qu’elle fait le mieux, réduire et essorer.
Aie aie aie
13/02/2025 à 18:33
Dalila est une cost killer...
Ca va tacler...
adnstep
12/02/2025 à 22:46
Ce commentaire a été refusé parce qu’il contrevient aux règles établies par la rédaction concernant les messages autorisés. Les commentaires sont modérés a priori : lus par l’équipe, ils ne sont acceptés qu'à condition de répondre à la Charte. Pour plus d’informations, consultez la rubrique dédiée.
Salarié élu
13/02/2025 à 08:38
Etes-vous certains que les salariés de CMI arrivent en décembre 2025 au 92 ADF ?
Surtout avec la vente de Magazine à venir !
La non venue dans les locaux du journal Franc-tireur !
Des salariés intéressé par le plan senior chez CMI !
L'annonce de la fusion et le prétexte idéal pour tout changer et enfin le réaménagement pour renouveler le mobilier.
Lisa
13/02/2025 à 08:40
Eh bien Mme Lucet, je me demande si vous aussi vous avez l’intention de partager leurs futurs conditions de travail. Je ne sais pas pourquoi, mais je sens que votre bureau, vous en resterez l’unique propriétaire. Et apprenez à vous relire : « conserver notre compétitivité »… En les empêchant de bien faire leur travail ?! Déjà qu’ils passent d’immenses journées à bosser, vous pourriez au moins leur permettre de poursuivre leurs tâches sans être interrompu et qui sait pour combien d’heures par un collègue qui lui aussi a besoin du poste ! Ça donne quoi ? Une entreprise avec une atmosphère électrique parce qu’ils se marcheront sur les pieds malgré eux. Ah c’est sûr, c’est bon pour la compétition ça !
Changez l'entraîneur!
13/02/2025 à 09:17
Il n'aura échappé à personne que le marché du livre change et évolue et les groupes, les éditeurs indépendants, les salariés ne sont pas des abrutis !
Cela ne change rien au problème de fond : les actionnaires actuels veulent du retour sur investissement ( assez normal)... Le problème c'est que l'on a jamais développé ou redynamisé une entreprise à coûts de rabots et d'économies!
La fin de Planeta n'était pas glorieuse, l'ère Bolloré pouvait poser idéologiquement problème mais le nouvel actionnaire a confié la présidence; même non exécutive à la personne qui connaît le plus de monde dans l'édition tout en y connaissant rien à l'Edition...!
Par ailleurs que peuvent faire Catherine Lucet toutes les directrices générales adjointes à part mettre collectivement leur démission dans la balance pour que le Président Non Exécutif soit remplacé...?
Et pour terminer je trouve assez cocasse que sorte au moment de cette crise chez Editis un livre du Président Non Exécutif exhortant à travailler plus pour gagner plus...
Cet homme d'une intelligence et d'une culture exceptionnelle vient de se dévoiler publiquement :
Son job , c'est lui ... et il travaille plus pour lui et gagne plus pour lui!
Qu'elle est loin son époque d'homme de gauche humaniste, si Pierre Bérégovoy pour qui il a travaillé le voit d'où il est il doit se dire qu'il a bien changé Denis Olivennes.
Et last but not least nommer Frédéric Taddéï à la tête de Marianne, lui qui fut le dernier, envers et contre tous à recevoir Dieudonné et Alain Soral sur son plateau c'est idéologiquement nauséabond...
Bon courage à vous tous , Camarades d'Editis, vraiment!!!
Le Nouveau
13/02/2025 à 12:11
Et maintenant ça regrette l’ère Bolloré. Ça voulait du changement? Il y en a eu.
Vous êtes finis
13/02/2025 à 14:47
Vous êtes finis, la mort de votre groupe est clairement annoncé avec tout ce qui s’y passe. C’est comme une usine de boîtes de petits pois sans petits pois.
Il n’y en a que quelques uns qui vont bien s’en tirer dans cette histoire, toujours les mêmes, les mieux lotis du comex. La plus grande erreur c’est d’avoir confié ce groupe à ces vendeurs de rêves. La réalité va en être autrement à la fin de l’année. Et l’année prochaine vous savez ce qu’on va vous annoncer ? Non ? Et pourtant c’est dans le business plan. Vous n’êtes pas sortis de l’auberge
Treza
14/02/2025 à 07:52
Denis Olivennes intelligent? Non surtout pas. Peut être cultivé mais là aussi on doute il dit toujours la même chose et les mêmes phrases. S'il était intelligent il ne ferait pas aux entreprises ce qu'il fait. Donnez moi le nom d'une entreprise qu'il a sauvée ? La sienne et lui surtout. Dans vos économies vous avez calculé la société DO et Ris de madame Rus ? Ou bien vous y versez du pognon ? Combien coûte la société d'olivennes ? Lui est il aussi rémunéré ? Les 2 sont-ils compatibles ? Renseignez vous bien les gars. Ça risque de vous piquer les yeux. Faites travailler vos experts.