L'esprit de Noël s'est (aussi) emparé des librairies. Entre décorations festives, sélections thématiques, belles histoires, la magie des mots y rencontre celle des festivités de cette fin d'année.
Le 27/12/2024 à 15:34 par Hocine Bouhadjera
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27/12/2024 à 15:34
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Débutons avec une histoire digne d'un conte de Noël : Jean-Pierre Beaurepère, après avoir commencé sa carrière à la librairie Basquin à Saint-Brieuc en 1984, est aujourd'hui responsable de la librairie Japanim, spécialisée en mangas, située juste en face de son premier emploi. À 17 ans, il a commencé comme vendeur Basquin, avant de devenir responsable de rayon, puis directeur du magasin jusqu'en 1996. Après un intermède comme directeur régional pour le groupe Agora à Paris, où il gérait 15 magasins, et une tentative dans la restauration rapide, il est revenu à la librairie.
Il a d'abord travaillé pour le dépôt de presse de Saint-Brieuc, avant de rejoindre Japanim en novembre 2024. Passionné de livres, il apprécie de travailler à nouveau dans sa ville de cœur, où il retrouve certains de ses anciens clients. Et d'être fier de contribuer à faire découvrir de nouvelles séries de mangas aux passionnés grâce à son équipe de quatre experts.
Une histoire de résilience cette fois : dans un précédent article, on évoquait la librairie Hisler à Metz, cible d'un cambriolage dans la nuit du 26 au 27 novembre 2024, dix jours après avoir subi un incendie dévastateur... L'enseigne a repris ces activités malgré tout, dans un format innovant : un « bus librairie ». Gérée par Simone Hisler et inspirée par sa fille Juliette, la structure temporaire sera située au pied de la cathédrale, place Jean-Paul II, depuis le 13 décembre. Le bus, aménagé avec 90 étagères, offre une sélection restreinte de livres et d'articles de papeterie. Ce projet, réalisé en collaboration avec plusieurs partenaires locaux, est une réponse créative à la catastrophe qui a ému la communauté locale, marquant une continuité dans l'histoire centenaire de cette librairie à Metz. Le bel esprit de Noël, en somme.
Dominique Chaptal, qui a commencé sa carrière à la librairie Genevès en 1983, a ouvert sa propre librairie, Chaptal, en 1993 sur la place Charles-de-Gaulle à Mende, en Lozère. Initialement axée sur la papeterie, la librairie s’est progressivement spécialisée dans les livres, participant à divers salons littéraires. Le 1er janvier 2023, Sarah Lavabre a repris l'enseigne, marquant un passage de relais en douceur, tandis que Dominique se concentrait sur la papeterie. Le 19 décembre 2024, une soirée a été organisée par Lavabre pour célébrer sa retraite imminente, qui prendra effet au 1er janvier 2025. Également passionné de football et de pétanque, il pourra désormais se consacrer à ses loisirs.
À Rennes, l'association la Basse Cour a publié un fanzine de recettes intitulé Une histoire de recettes, révélé lors du marché de Cleunay. Ce recueil, réalisé avec la collaboration des habitants du quartier Cleunay et des bénévoles, contient treize recettes qui racontent des histoires personnelles et culinaires. Coordonné par Laura Raynaud, en service civique, le fanzine est distinctif avec ses écrits manuscrits et illustrations, évoquant les cahiers de recettes traditionnels. Chaque recette, comme le kabouli afghan de Nassir ou le poulet de mamie de Guillaume, porte une histoire familiale ou personnelle, enrichissant le partage culturel et le lien social. Actuellement, le fanzine est disponible à l'Antipode, au Bâtiment à modeler, au centre social de Cleunay, et à la Basse-Cour, avec une mise en ligne prévue sur les réseaux sociaux de l'association.
Le 19 décembre 2024, la librairie café Le Grand Bain à Bannalec, dans le Finistère, a de son côté organisé une soirée où Fabrice Melquiot, auteur d'une soixantaine de pièces de théâtre, a présenté son premier roman Écouter les sirènes, publié chez Actes Sud et Prix Transfuge du Meilleur Premier Roman. Inspiré par la chanson Suzanne de Leonard Cohen, celui qui est également poète et metteur en scène, a captivé une vingtaine de passionnés par son discours sur l'écriture et le théâtre. À Aubenas dans l'Ardèche, La librairie du château célèbre la saison festive non seulement en mettant en avant les auteurs, mais aussi en exposant les peintures et dessins de l'artiste Mère-ci Gaïa.
Un beau cadeau encore, pour une petite commune cévenole de 850 habitants, Génolhac. Pauline Roux, ancienne documentaliste et archiviste, a ouvert La Librairie qui relie en juillet dernier, après la perte de son poste au Parc national des Cévennes. Encouragée par la libraire des Vans et soutenue par France Travail, elle a remporté le Prix du public du concours Alès Audace, obtenant une aide de 7000 € et un accompagnement de trois ans. Sa structure propose plus de 2000 livres et des activités comme des ateliers pour enfants et des conférences, renforçant ainsi le lien communautaire. Une démarche qui contribue significativement à la revitalisation rurale et à la création de liens sociaux au sein de Génolhac. Et un pari audacieux.
Solène Chavanne a fondé Mon Chat pitre à Aix-en-Provence, la première « ronron librairie » de France en 2021, où les chats de refuges et les livres cohabitent pour offrir une expérience apaisante aux visiteurs. Trois ans plus tard, elle prépare l'expansion du concept via des franchises. Les futures librairies franchisées doivent être spacieuses pour le bien-être des chats. Solène Chavanne explique participer activement à la sélection des chats, des locaux et des villes, pour garantir l'adéquation des sites avec les valeurs de Mon Chat pitre. La première franchise sera annoncée prochainement.
Après les chats, les chiens : à Chauny, dans l'Aisne, Pytha, la chienne de la gérante, arpente depuis six ans les allées de la librairie locale. Avec le temps, les clients se sont familiarisés avec sa présence. Aujourd'hui, elle est considérée comme la mascotte officielle de la boutique.
Les élèves de 4e du collège Lelorgne de Savigny à Provins, en Seine-et-Marne, ont de leur côté participé à un projet éducatif nommé Jeunes en librairie, mené avec la librairie Canova et soutenu par la DRAC Île-de-France, l'association Paris Librairies, le ministère de l’Éducation nationale et la SOFIA. Le but était de cultiver un intérêt pour les classiques patrimoniaux en explorant différentes adaptations de Les Trois Mousquetaires d'Alexandre Dumas, y compris en bande dessinée, en anglais, et au théâtre.
Les élèves ont étudié des extraits, comparé les adaptations, et rencontré des professionnels du livre. Ils ont également acheté des livres avec des chèques Lire lors de visites en librairie, et créé des marque-pages « coup de cœur ». Leur engagement s'est reflété dans un article de journal scolaire et une exposition de leurs travaux.
Pour les un peu plus âgés, la librairie de Sciences Po recommande une sélection de livres récompensés par des prix littéraires de 2024, de quoi faire de beaux cadeaux. Même après le réveillon, on peut toujours...
Impossibles adieux de Kang Han, lauréat du prix Nobel de littérature, qui raconte l'amitié et la mémoire d'un massacre en Corée. Tenir tête de Paul Audi, prix Femina Essai, qui explore le retour de l'antisémitisme à travers des lettres entre deux amis. Jacaranda de Gaël Faye, prix Renaudot, qui plonge dans l'histoire du Rwanda. Ou encore Le rêve du pêcheur de Hemley Boum, prix littéraire des Sciences Po, qui mêle la vie d'un pêcheur camerounais et celle de son petit-fils psychologue à Paris. Pour explorer l'intégralité de la sélection concoctée par la librairie étudiante, c'est ici.
Même si nous somme en plein dans les fêtes de fin d'année, il ne faut pas gommer l'actualité plus tragique : Le Moulin à lire, une bouquinerie située dans le centre historique de Grasse, fait toujours face à un avenir incertain suite au décès de son propriétaire, Eric Attias, le 18 juillet 2023. Cette librairie, anciennement un moulin à huile, contient des milliers de livres, organisés de manière thématique unique : des livres de musique sous un piano suspendu, des ouvrages religieux sous les bras d'une statue de Jésus, et des romans policiers sous une pipe.
Clélia Attias, veuve d'Eric et actuellement enseignante, ne souhaite pas reprendre la gestion du lieu en raison de son métier actuel et de l'expertise requise pour gérer une telle collection. Elle envisage de transformer la librairie en un tiers lieu en collaboration avec des associations locales pour y organiser des événements culturels. Entretemps, l'enseigne continue de vendre des livres et a même accueilli une lecture de contes de Noël.
À LIRE - La fin d'année des librairies : entre nouveaux chapitres et points finaux
Finissons avec le regard tourné vers l'avenir, même si cette période est toujours propice au recueillement. Alors que l'année 2025 se profile, Benoît Lasserre de Sud Ouest en appelle à François Bayrou : il faut soutenir les librairies. Il rappelle : entre 2019 et 2023, la France a vu l'ouverture de 574 nouvelles librairies, dont une sur cinq dans des communes de moins de 5000 habitants. Tout en répétant que les libraires font face à des défis comme la faible rentabilité et la surcharge de travail.
Le secteur du livre, selon lui, requiert un soutien public renouvelé, similaire à l'introduction du prix unique du livre en 1981. En tant que Premier ministre et amateur de littérature, François Bayrou a une occasion unique de défendre ce secteur, conclut-il.
Crédits photo : MystickTroy (CC-BY-SA-3.0)
Par Hocine Bouhadjera
Contact : hb@actualitte.com
Paru le 28/08/2024
289 pages
Actes Sud Editions
21,80 €
1 Commentaire
Sophie Le Goffre
31/12/2024 à 13:12
Si Biroutte veut vraiment s'occuper des libraires, il aurait dû commencer par éliminer Rachida du Ministère de la Culture. Qu'est ce qu'elle fait là ?
Il y a peut-être 574 nouvelles librairies qui naissent mais la moitié qui disparaissent.
Qu'il se penche aussi (s'il le peut encore) sur le problème des prix du livre. Celui-ci, même en Poche est devenu un objet de luxe : 25€ pour un roman !
35€ pour une B.D ! Et ainsi de suite.... Bon courage, amis libraires !