Présenté en avril dernier, lors du Festival du livre de Paris 2024, Filéas (acronyme pour Fils d’informations libraires, éditeurs, auteurs) passe un cap. Portail offrant un suivi des ventes de livres, destiné à l’ensemble des acteurs de la filière, il est désormais encadré par une société, que dirige Harriet Seegmuller, et préside Alban Cerisier.
Le 20/12/2024 à 17:02 par Nicolas Gary
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20/12/2024 à 17:02
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Filéas, société à mission, vise à améliorer la transparence des chiffres de vente des livres imprimés et numériques pour les auteurs et à optimiser l’efficacité économique et environnementale de la chaîne du livre. Un comité de mission, composé de représentants des auteurs, éditeurs, libraires et partenaires institutionnels, supervise ses actions pour garantir son caractère interprofessionnel et d’intérêt général.
Son objectif principal est de créer un outil de suivi des ventes accessible via un portail dédié, en collaboration avec les acteurs de la profession. Ce projet s'inscrit dans la transformation numérique de la filière, en favorisant la fédération des acteurs et l’accès généralisé aux données.
La plateforme Filéas vise à fournir des données de vente précises aux acteurs de la chaîne du livre. Elle permettra aux auteurs de consulter gratuitement les ventes de leurs ouvrages et proposera, moyennant un abonnement adapté à la taille des structures, un accès aux éditeurs, diffuseurs et distributeurs.
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Filéas s'appuiera sur des outils existants comme la base Auteurs d'Electre et le FEL (Fichier Exhaustif du Livre) pour constituer sa base bibliographique. Le site proposera deux indicateurs de vente : un indicateur hebdomadaire disponible dès l’ouverture, basé sur les données de GfK, et, ultérieurement, un indicateur quotidien alimenté par les données des acteurs de la filière, notamment celles de plus de 700 librairies partenaires au démarrage.
Huit grands acteurs de la filière du livre se sont réunis le 20 décembre 2024 pour créer la société Filéas (Fils d’informations libraires, éditeurs, auteurs) : le Syndicat national de l’édition (SNE), le Cercle de la Librairie, Dilicom, l’Association pour le développement de la librairie de création (ADELC), le Syndicat de la Librairie française (SLF), l'Association des librairies informatisées et utilisatrices de réseaux électroniques (ALIRE), le Conseil permanent des écrivains (CPE) et la Société des Gens de Lettres (SGDL).
Lors de l’assemblée générale constituante, Vincent Montagne, président du Syndicat national de l’édition déclare « Ce projet trouve un aboutissement induit dans l’accord auteurs-éditeurs de 2013. Cela nous paraît très important. C’est aussi un formidable signe de solidarité de la filière ».
Un message qu’appuie Renaud Lefebvre, directeur général du SNE, soulignant auprès de ActuaLitté « une étape importante de franchie. C’est tout à la fois l’aboutissement de nombreuses discussions et un point de départ important pour toutes les professions du livre qui en bénéficieront ». Le lancement officiel s’effectuera lors du Festival du livre 2025 (du 11 au 13 avril prochain), avec « la présentation d’une version test ».
Severine Weiss, présidente du CPE, contactée par téléphone précise que « le déploiement sera progressive à partir du printemps. Auteurs et éditeurs disposeront d’une première solution hebdomadaire avec des données fournies par GfK », l’un des panellistes qui commercialisent les estimations de ventes pour l’industrie. Bien entendu, ces informations seront plus simples que celles aujourd’hui vendues aux clients.
Pour que circule d’ailleurs l’information de cet accès auprès des autrices et auteurs, seront mis à contribution, médias, organisations d’auteurs, ainsi que La Sofia. « Je ne doute pas non plus que les auteurs se feront passer le mot progressivement », assure-t-elle.
Depuis plusieurs années maintenant, le groupe Hachette fournit à ses auteurs une solution similaire d’accès aux chiffres de vente avec Mon Espace Auteurs ouvert en 2021. Après une année d’expérimentation, quelque 1000 écrivains du groupe s’y étaient connectés. En octobre 2021, c’était au tour d’Editis de développer la même solution, avec informations juridiques, administratives et commerciales. Anciennement Booktracking devenu Fileas, l’outil interprofessionnel ne concurrencerait en rien ces services – peut-être même servira-t-il à vérifier et confronter les éléments communiqués ?
Pour l’heure, les partenaires s’attellent à la plateforme et son interface, des approches « qui induisent des questions complexes, quant à la sécurité ou la confidentialité pour tous ». La seconde étape, plus novatrice, passera donc par les remontées de ventes en sorties de caisse, avec le concours de 700 librairies (via le SLF), y compris Mollat à Bordeaux, réputé peu partageur de ses données.
Restera alors à convaincre les enseignes et grandes surfaces spécialisées de prendre part à Filéas, pour compléter la qualité des données – Fnac et d'autres ont refusé d'entrer capitalistiquement dans le projet. Tout en laissant l'accès aux métriques (via GfK), avec la réserve de pouvoir les retirer si l'outil ne convient pas. Si Filéas en tant que tel est une avancée d'envergure pour l'interprofession, il est encore loin d'avoir convaincu l'ensemble des opérateurs à ce jour.
L’enjeu pour les petites structures éditoriales, de nombreuses fois détaillé, résidera dans le contrôle des réimpressions : en cessant de naviguer à vue, c’est avant tout la trésorerie des maisons qui sera mise à l’abri de dépenses inutiles. En bénéficiant d’une meilleure vision des ventes, les maisons géreront plus efficacement leur production — avec les implications écologiques que l’on devine.
Conséquence pour les distributeurs : éviter le surstock. Pour certains, on l’a vu, il s’est avéré plus rentable de sortir des maisons partenaires de leur catalogue, plutôt que d’investir afin de grossir et d’accueillir plus de maisons partenaires. D’ailleurs, les hausses de coûts logistiques, transport ou même sur les cartons, oriente la distribution à repenser sa stratégie, en réduisant les volumes globalement.
Filés ne fera peut-être pas un tour de la Terre en 80 jours, mais pourrait, à sa petite mesure, contribuer à changer le monde ?
Serverine Weiss, par souci de précision, nous indique que Fileas n’intervient en nullement sur le système actuel de rémunération des auteurs fondée sur les redditions de comptes (donc les « flux »). Il ne s’agit donc que d’un outil d’information complémentaire fourni aux auteurs — ainsi qu’aux autres acteurs de l’environnement du livre et pas d’un substitut au calcul des revenus.
Un point extrêmement important pour que les auteurs n’imaginent pas être moins payés…
En outre, elle nuance le propos d’un commentaire indiquant : « Pour le calcul des droits d’auteurs ce sont bien les données de facturation de l’éditeur, une fois les retours pris en compte qui font foi. »
« Cela est faux puisque certains retours peuvent ne pas encore être pris en compte au moment de la reddition de comptes — donc cela avantage l’auteur… De là l’existe de la provision sur retours instaurée dans les contrats par les éditeurs, pour minorer le phénomène. »
Ndlr : Une précédente version de l’article indiquait en titre « Bientôt, les auteurs connaîtront les veritables chiffres de ventes de leurs livres » et a été corrigée pour apporter plus de justesse.
Crédits photo : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
8 Commentaires
Fluck
20/12/2024 à 22:22
Actualitté toujours aussi positif et enclin à saluer les avancées de la filière vers plus de transparence....
"On peut se moquer de tout et rire de tout, d'un rire sain et libre, mais sans aigreur, sans tristesse, sans la moindre trace de méchanceté." (Cherchez l'auteur).
Falco
21/12/2024 à 11:39
Bonjour
Pour plus de transparence ce nouveau « machin » qui va crouler sous les frais de fonctionnement devrait publier l’algorithme que l’on comprenne quels chiffres il collecte ! Actuellement les chiffres de vente sont issus des ventes éditeur ( ventes directes éditeur+ventes distributeurs- retours distributeurs) ainsi les stocks en librairie sont considérés comme vendus. Si dorénavant ce sont que les réelles c’est la porte ouverte à ce que les « à valoir » deviennent des « avances sur ventes » et là on va se marrer!!!!
Merci et bon Noël
Nicolas Gary - ActuaLitté
21/12/2024 à 12:02
Bonjour
Si vous prenez le temps de lire (je n'ose pas préciser avec attention), vous verrez indiqué
• étape 1 : les estimations GfK hébdomadaires.
• étape 3 : les sorties de caisse des 700 libraires impliqués.
(A ce titre, votre formule de calcul des ventes réelles est bien complexe et alambiqué)
La transparence que vous réclamez est déjà indiquée donc.
Quant au “machin”, cher général, il a le mérite pour une fois d'aller dans le sens de l'interprofession.
Son coût de fonctionnement prévu explique peut-être les réticences d'autres acteurs de la profession (côté GSS par exemple).
Falco
21/12/2024 à 13:55
Bonjour,
C’est bien ce qui me semblait, les ventes directes éditeur sont exclues et GFK n’est qu’une estimation dont le calcul est … mystérieux…
Mais bon si les « auteurs « sont contents et vont moins chouiner , ce que je doute…, tant mieux.
Depuis toujours on cherche à réinventer la roue et depuis toujours on a fait que l’habiller en rajoutant des couches et la roue quoi que l’on fasse elle est et reste … ronde!
Joyeux Noël… désolé mais moi je ne crois pas au père-Noël depuis plus 65 ans et à bientôt 70 ans et j’ai assez pratiqué les éditeurs et les auteurs pour savoir que les uns ne sont jamais satisfaits des ventes car à tel endroit le livre n’est pas présent et les autres parce que leur livre n’était même pas en vitrine dans telle et telle librairie… la France est depuis toujours et encore plus depuis Sartre le pays où l’on ne se remets pas en cause car « l’enfer c’est les autres » or on est toujours l’autre de quelqu’un … et puis pour paraphraser Pierre Dac « les femmes des uns font le bonheur des autres » et moi je rajoute « et … vice-versa ! »
Bye
Remarque
21/12/2024 à 15:45
Merci pour ces nouvelles informations sur le projet qui promet progressivement plus de transparence, de manière simplifiée pour les différents acteurs.
Toutefois, la notion de "véritables chiffres de ventes" annoncée dans le titre de l'article est trompeuse car les solutions sur lesquelles va s'appuyer Fileas ne couvrent pas la totalité des points de ventes et/ou comportent une part d'estimation.
Il ne s'agit évidemment pas de remettre en cause leur pertinence et leur utilité mais il faut aussi connaître leurs limites méthodologiques, en particulier pour les auteurs qui ne sont pas des professionnels du secteur.
Ces limites sont justifiées par la diversité et la complexité du marché ainsi que par la multiplicité d'acteurs indépendants dont on ne saurait se plaindre.
Pour le calcul des droits d'auteurs ce sont bien les données de facturation de l'éditeur, une fois les retours pris en compte qui font foi.
Nicolas Gary - ActuaLitté
21/12/2024 à 16:21
Bonjour et merci
Je vous remercie pour cette précision, en effet, "véritables chiffres" aurait dû être mis entre guillemets puisqu'il s'agit de l'intention portée par le projet, mais qui manquera de nombreuses données pour être réellement précis.
Je vais apporter une correction pour aller dans ce sens.
Concernant la rémunération, votre calcul est cependant inexact puisqu'il omet la provision sur retour qui, je vais détailler plus spécifiquement ces éléments.
Dudule
24/12/2024 à 20:40
Que de mensonges.
Ce que proposent depuis longtemps d'autres acteurs.
Actualitté comme toujours au service de l'establishment
Team ActuaLitté
25/12/2024 à 00:28
Bonjour
Oui, ce que proposent d'autres acteurs : c'est indiqué dans l'article. Les mensonges, ne sont finalement que dans votre intervention, qui laisse entendre que nous en écrivons. Bravo : c'est totalement idiot.
Quant à notre mise au service de l'establishment, dire une ânerie en anglais ne la rend pas plus vraie ni plus pertinente.
Pour le reste, joyeux noël, et quittez votre écran : cela ne portera préjudice à personne, surtout pas à vous.