On ne pouvait pas laisser s’achever cette année 2024 sans célébrer les cent ans d’un des chefs-d’œuvre romanesques du XXe siècle. Des chefs-d’œuvre, la littérature française en a produit son lot, et les centenaires à venir ne manqueront pas : en 2026, ce sera Les Faux-monnayeurs, en 2032, Voyage au bout de la nuit, en 2038, La Nausée, etc. Mais les auteurs ensablés aussi ont leurs grands et petits chefs-d’œuvre, dont certains ont été chroniqués ici même : L’Enfant à la balustrade, Les Javanais, par exemple. Et maintenant Mes Amis d’Emmanuel Bove : avis à ceux qui ne l’auraient pas encore lu. Par François Ouellet.
Le 15/12/2024 à 16:14 par Les ensablés
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15/12/2024 à 16:14
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Quelle place réserver à ce roman génial ? Sans doute l’une des toutes premières. Bove, du reste, n’est plus tout à fait un auteur oublié : il existe, sur le marché du livre actuel, plusieurs éditions de chacun de ses livres, d’autant plus que son œuvre est depuis quelques années dans le domaine public. Entre les deux guerres, l’écrivain a connu une célébrité certaine, avant de sombrer dans l’oubli (mourir à la Libération, ce n’était pas vraiment le meilleur moment), puis de renaître au tournant des années 1980.
Avec un succès qui ne s’est jamais démenti depuis, au point d’en faire une sorte d’auteur culte, comme a pu l’être une romancière comme Marguerite Duras. Bove est l’exemple le plus abouti d’un auteur qui est à peu près parvenu à redevenir, dans l’histoire de la littérature, le grand écrivain qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être.
C’est donc en juin 1924 que paraît ce premier roman d’un jeune écrivain français d’origine russe. Édité par Colette dans la collection qu’elle dirigeait chez Ferenczi & fils, Mes amis reçoit un accueil très élogieux. Même Sacha Guitry, dont l’œuvre, les manières, l’esprit, l’aisance sociale sont à mille lieues de l’univers bovien, choisit de faire une entorse à sa chronique théâtrale dans l’hebdomadaire Candide pour en parler : « Vous est-il arrivé souvent d’ouvrir un livre paru la veille, venu par la poste, dont le nom de l'auteur vous est absolument inconnu et de vous écrier à la troisième ligne : — Tiens, voilà quelqu’un. Cela ne m’est pas arrivé souvent. Cela m’est arrivé cette semaine en ouvrant Mes Amis, d’Emmanuel Bove. À la vingtième page, mon ravissement était tel, que je m’étais promis de vous en parler aujourd’hui. »
Ce n’est pas un roman à intrigue ; ce qui ne veut pas dire qu’il n’est pas intrigant, au sens le plus large du terme. Mes Amis, c’est l’invention d’une écriture, d’un style, d’un ton. Et, ce qui est magnifique, cette écriture fait encore mouche aujourd’hui, avec toute la fraîcheur des œuvres les plus inspirées, avec ses phrases méticuleuses et concises, avec l’expression astucieuse d’une subjectivité avivée, à fleur de peau mais quelque peu retorse.
Victor Bâton vit misérablement d’une petite pension d’invalide à la suite de la guerre. Ses journées se passent à errer dans les rues parisiennes. Il est à la recherche d’un peu d’amitié, d’un peu d’amour, bref de chaleur humaine. Le roman ne raconte rien de plus, du moins en apparence. Car tout Bove est dans la manière saisissante non pas tant de dire les choses (événements et sentiments) que de les montrer, de les suggérer. « Il a comme personne le sens du détail touchant », disait Samuel Beckett. Il y a chez Bove un sens de l’observation aigu, très juste, et aussi, sans doute en raison de cette extrême précision du regard et de l’esprit, un humour déroutant : il suffit de le lire à haute voix pour le constater.
L’admirable sensibilité littéraire de l’écrivain a été nourrie par une réalité sociale et familiale difficile. Son père, un être fantasque, tout à la fois velléitaire, rêveur et profiteur, a partiellement délaissé le foyer conjugal pour une autre femme alors que l’écrivain était à peine né. Bove connaîtra tout à tour le dénuement et l’aisance, les déménagements réguliers, les emplois précaires, les rancoeurs d’une existence instable ; il vivra une partie de son enfance en France, puis quelques années à Genève, avant de poursuivre ses études pendant une année en Angleterre. De retour à Paris, il se marie en 1921, puis le couple s’installe en Autriche parce que la vie, conséquence de la guerre, n’y est pas chère ; c’est à Vienne qu’il écrit Mes Amis.
Bove, âgé de 26 ans, auréolé du succès de son premier roman, se lance dès lors dans l’écriture d’une œuvre audacieuse, qu’il voudrait balzacienne, car il s’agirait pour lui « de transporter le lecteur dans une humanité, réduite évidemment, mais aussi complète que celle que nous voyons autour de nous ». Une ambition néanmoins quelque peu paradoxale pour un écrivain qui a en quelque sorte toujours écrit le même livre. Cela, on pourrait le dire sans doute de bien des écrivains, mais c’est particulièrement vrai au sujet de Bove.
Quand au sortir de la guerre, en juillet 1945, il décède prématurément, à l’âge de 47 ans, après avoir publié une vingtaine de livres, sa renommée n’est déjà plus ce qu’elle était à la fin des années 1920 ; les années qui suivent la Libération, en construisant un nouveau monde, enterrent le souvenir de l’écrivain dont l’œuvre éminemment pessimiste contrariait les valeurs existentialistes triomphantes.
Sa renaissance n’a été que justice.
« Emmanuel Bove devrait devenir le patron-saint des écrivains (purs), plus que Kafka, et de la même façon qu’Anton Tchekov et Francis Scott Fitzgerald », écrivait l’immense romancier autrichien Peter Handke, traducteur de Mes amis en 1981 et comparse du cinéaste allemand Wim Wenders qui lui-même, dans un court-métrage, avait contribué à faire connaître Bove dans son pays dès 1982. Depuis, Mes amis a été traduit en espagnol, en polonais, en danois, en norvégien, en chinois, en hébreu, etc. C’est aussi ce qu’on appelle une œuvre universelle.
Ce roman admirable et admiré, qui cent ans plus tard n’a pas pris une ride, est disponible en format poche aux éditions L’Arbre vengeur, Points, Le Livre de poche et Nota bene, où il a été préfacé par votre serviteur.
François Ouellet — décembre 2024
Par Les ensablés
Contact : ng@actualitte.com
Paru le 05/09/2018
192 pages
LGF/Le Livre de Poche
7,20 €
Paru le 27/05/2022
227 pages
Points
7,50 €
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BONNES FEUILLES — À travers 19 essais percutants, Ian Svenonius, figure incontournable de la scène underground de Washington DC, déconstruit avec audace les codes et clichés du rock pour ébranler les fondements de la culture bourgeoise.
20/01/2025, 13:11
Dans Les Lendemains qui chantent (trad. Éric Boury), Arnaldur Indridason tisse une intrigue complexe où passé et présent s’entrelacent dans une quête de vérité menée par le commissaire Konrad. Avec son style caractéristique, Indridason mêle enquête policière et exploration des blessures sociales et historiques de l’Islande.
20/01/2025, 10:50
Margo est une jeune étudiante qui s’est laissée séduire par son prof de fac et se retrouve enceinte. Il est marié, elle est sans ressources et elle décide de garder cet enfant, non par conviction, mais Margo pense que garder cet enfant, fera d’elle une personne bien. Mais comment assumer d’être une bonne personne quand on est sans argent et que le monde vous tourne le dos ?
20/01/2025, 10:12
Nouvelle série de fantasy héroïque signée Pierre Grimbert, Les chemins de Ji est un spin-off de la saga de Ji, un fabuleux cycle de fantasy en treize volumes publiés entre 1997 et 2012. Le premier cycle, Le secret de Ji, paru en 1997 aux éditions Mnémos, est à l'origine de la carrière de l'auteur.
20/01/2025, 09:52
Avec Psychoses, Gilles Vincent nous plonge une fois de plus dans un univers empreint d’ombres, où l’enquête criminelle révèle autant de mystères que les personnages eux-mêmes. Ce roman, un fameux page-turner, combine la rigueur d’un thriller captivant avec une profonde réflexion sur les fractures humaines.
20/01/2025, 09:40
En 2019, Carl, jeune étudiant à la Sorbonne, est accepté à l’université de Birzeit en Cisjordanie dans le cadre du programme Erasmus +. Il s’apprête à faire un voyage qui bouleversera à jamais sa perception du monde et des hommes.
20/01/2025, 07:30
« Faut-il encore lire Camus dans les écoles ? » La question a pu conclure l’un des débats tenus autour de ce brûlot qui, à la rentrée 2023, appelait à Oublier Camus en réduisant toute sa pensée à une apologie de la domination coloniale, à un anticommunisme primaire, à des équivoques dans la lutte contre l’occupant ou contre la peine capitale, et à un sexisme patriarcal...
19/01/2025, 10:24
BONNES FEUILLES — L’œuvre de Brigitte Reimann, tout comme celle de Christa Wolf, est considérée comme un pilier de la littérature est-allemande. Publié en RDA en 1963, Une fratrie (traduit de l'allemand par Françoise Toraille) suscita des débats passionnés des deux côtés du mur, bien qu’il s’agît d’une version censurée par la Stasi. Brigitte Reimann décède en 1973, et le manuscrit original du roman demeure introuvable.
18/01/2025, 09:30
BONNES FEUILLES — Tour à tour perçu comme un gourou, un guérisseur, un révolutionnaire, une icône de l’underground ou un criminel lié au pouvoir, Nikolaï le Svatoj est au cœur de l’attentat le plus meurtrier de Mertvecgorod.
18/01/2025, 09:00
La guerre de l'eau a-t-elle déjà eu lieu ? Cédric Gras nous invite, avec Les routes de la soif - Voyage aux sources de la mer d'Aral (Stock), à un périple extraordinaire, des étendues arides de la Mer d'Aral jusqu'aux glaciers du Pamir, source de l'Amou-Daria, un fleuve chargé d'histoire. Un écrivain-voyageur passionné et un récit captivant pour celles et ceux qui aiment l'histoire-géo.
17/01/2025, 16:10
« Tous les matins, pendant un quart de seconde, je suis bien. Un quart de seconde où je ne me rappelle plus qui je suis, ce que je fais, où je dors. Pendant ce quart de seconde, Rose n’existe pas, la Rose que je suis devenue n’a pas encore pris possession de mon esprit. » Depuis le décès de sa fille, Anna, trois ans plus tôt, Rose ne sait plus exister comme avant. Plus rien n’a de sens, tout est flou, chaque jour se transforme en une insupportable mascarade…
17/01/2025, 15:01
Malgré l'arrivée de nombreux nouveaux titres, les deux premières marches du podium restent solidement occupées par l'irrésistible Freida McFadden, avec La Femme de ménage et Les Secrets de la femme de ménage, traduits par Karine Forestier. À leurs côtés, le manga d'Inoxtag, Instinct, complète ce trio de tête indétrônable. Ces titres se sont respectivement vendus à 42.285, 29.837 et 14.528 exemplaires pour cette nouvelle semaine (du 06/01 au 12/01).
17/01/2025, 12:10
BONNES FEUILLES — Denver, Colorado, 1933. Luz Lopez, surnommée « Petite Lumière », gagne sa vie en lisant les feuilles de thé sur les foires et en lavant le linge des riches familles anglo-saxonnes de la ville. Dans un climat où le Ku Klux Klan fait régner la terreur, être catholique, mexicaine et amérindienne, comme Luz, est un danger quotidien. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Karine Lalechère.
17/01/2025, 09:30
BONNES FEUILLES — En juin 1975, à Glasgow, l'épouse d'un pasteur signale la disparition de son fils. Pourtant, personne ne semble avoir jamais entendu parler de ce garçon. Voici la sixième enquête de l'inspecteur Harry McCoy. Traduit de l’anglais (Écosse) par Olivier Deparis.
17/01/2025, 09:00
Qui se souvient de ces mots de Flaubert, se justifiant dans une lettre de réponse à son vieil ami Maxime Du Camp d’avoir écrit « une pure invention » : « Non, Monsieur, aucun modèle n’a posé devant moi. Madame Bovary est une pure invention. Ce qui n’empêche pas qu’ici en Normandie, on n’ait voulu découvrir dans mon roman une foule d’allusions. » Par Alex Delusier.
16/01/2025, 10:19
BONNES FEUILLES — Quand le corps nous confronte à notre impuissance la plus profonde : une première philosophie des sanglots. Beaucoup ont exploré le sujet des larmes, mais étonnamment, les sanglots restent peu étudiés. Ces derniers représentent une véritable insurrection du corps, qui suspend les fonctions essentielles de notre condition de sujet – parole, pensée, posture.
16/01/2025, 10:00
BONNES FEUILLES — Les multinationales façonnent notre quotidien, qu’il s’agisse de consommer leurs produits, d’admirer leurs marques ou de critiquer leurs pratiques. Mais que sait-on réellement d’elles ? Comment ont-elles acquis leur puissance et leur influence ? Cette œuvre ambitieuse, fruit de la collaboration entre chercheurs et journalistes, propose une fresque mondiale inédite et une analyse critique de leur évolution.
15/01/2025, 18:00
L’incipit du dernier roman de Jean Echenoz, Bristol (éditions de Minuit, janvier 2025), est emblématique. In medias res, il nous introduit doublement dans le livre : dans l’intrigue en même temps que dans la dimension parallèle qui l’escorte toujours chez l’auteur et qu’il ouvre à travers des jeux littéraires qui éventent le monde, le rendent à son impensable légèreté.
15/01/2025, 09:36
3 Commentaires
Edco
16/12/2024 à 11:48
Oui merveilleux écrivain
J ai lu : le piège , un homme qui savait, le pressentiment .
Merci de le faire connaître
Bénard
16/12/2024 à 14:04
Merci pour cette remarquable mise au point. Bove méritait bien cela.
FredEx
22/12/2024 à 18:36
Un chef-d'œuvre est un chef-d'œuvre est un chef-d'œuvre.