« Elle traverse en courant les paysages. Elle traverse les paysages, elle ne les voit pas, elle les troue et s’immisce en eux. Elle va comme le vent, mais le vent qui ne déplacerait rien, pas une branche, pas une feuille. Elle va comme le vent, elle file comme une flèche, c’est ça, elle est une flèche. »
C’est le village qui parle, qui raconte, qui reconstitue le récit. À la troisième personne indéfinie : « On les voyait souvent sur la mobylette orange. » « On n’est pas venu la voir. Personne ou presque... Mais d’entre nous, personne. »
Ainsi le texte s’énonce-t-il par la voix d’un Coryphée : le village observe, commente, dit ce qui se sait, sans entrer pour autant dans les lieux qui échappent aux regards, sans juger.
La jeune Emma est le sujet de leur curiosité, le personnage du récit. Celle qui « court de tout son cœur ». Un jour pourtant sa course s’interrompt, la légèreté de ses pas cède la place à l’arrêt contraint.
Mais rien n’empêche la course inlassable de se poursuivre, celle qui mène à avancer à rebours, silencieusement, portée par des paroles énigmatiques à résoudre.
Maryline Desbiolles dépose avec délicatesse les mots justes, poétiques, qui expriment, au-delà du réalisme, l’endurance douloureuse nécessaire à un corps pour se réparer, tandis que le travail de la parole, dite, ou tue, chemine et trace un nouveau chemin dérobé à Emma... Celle qui courait peut-être à son insu à la recherche de son histoire ?
Publiée le
02/12/2024 à 09:19
Paru le 29/08/2024
145 pages
Sabine Wespieser Editeur
18,00 €
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