Coup de tonnerre dans le monde du financement participatif : Ulule annonce l'acquisition de son concurrent français KissKissBankBank.com, filiale de La Banque Postale. Ce rapprochement, basé sur des valeurs communes, représente une alliance stratégique entre les deux acteurs du crowdfunding. Objectif : structurer le secteur et renforcer l'accompagnement, de la conception des projets à leur réussite.
Le 02/12/2024 à 06:00 par Nicolas Gary
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02/12/2024 à 06:00
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Depuis 2010, Ulule soutient les créateurs et créatrices, avec quelque 48.000 projets ayant collecté plus de 311 millions d'euros via le financement participatif. Certifiée B Corp depuis 2015, l'entreprise est un acteur engagé dans l'économie sociale et solidaire.
Un an plus tôt, Adrien Aumont, Ombline le Lasseur et Vincent Ricordeau, ouvraient KissKissBankBank avec cette même intention d'aider au financement de réalisations créatives, associatives ou entrepreneuriales.
Avec plus de 29.000 objectifs concrétisés et plus de 177 millions d'euros accumulés, la plateforme, devint filiale de La Banque Postale en 2017. Elle aura soutenu des initiatives dans les domaines de la culture, de l'écologie et de l'innovation.
Voici donc les deux sociétés engagées dans une « alliance naturelle où se retrouvera le meilleur des deux mondes », assure Alexandre Boucherot, cofondateur d'Ulule à ActuaLitté. Ulule annonce le rachat de son concurrent auprès de la Banque postale, dans la perspective de construire un acteur majeur du crowdfunding pour la France et l’Europe. Mais pas seulement...
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C'est là la promesse d’une structuration du secteur, d’un côté, autant que d’une ampleur nouvelle pour créateurs et entrepreneurs, épaulés par ce « champion français ». En l’espace de 15 années, la communauté globale regroupe 9 millions de fidèles, pour un demi-milliard d'euros récoltés.
Adrienne Horel-Pagès, présidente du conseil d’administration de KissKissBankBank & Co et membre du comité exécutif de La Banque Postale salue ainsi le futur développement « au sein d’un acteur de référence ». Côté Ulule, Alexandre Boucherot envisage en effet « un point d’entrée unique offrant tous les services essentiels pour développer son projet, quel que soit son stade de maturité ».
Cette alliance intervient à un moment clé alors qu'Ulule se prépare à une transformation majeure pour le premier trimestre 2025 et portée par la convergence technologique des deux opérateurs. Démultiplier la capacité à accompagner les porteurs de campagnes, et intégrer des outils innovants : rendez-vous est pris.
Reste que pour les deux acteurs, le livre demeure un secteur important : en 2023, 1584 projets corrélés à la lecture ont vu le jour, représentant 12,5 millions € d'obtenus à travers les deux sociétés. Si les campagnes liées à la librairie « demeurent très minoritaires », elles représentent quelques dizaines d’actions par an, précise Arnaud Burgot, directeur général et cofondateur. Toutefois, elles bénéficient « d’un très bel écho dans la localité, avec des montants collectés parfois emblématiques pour un quartier ».
Alexandre Boucherot ajoute : « Le livre occupe une place majeure sur les deux plateformes. » D'autant que l’essentiel des approches littéraires tourne donc autour de la production de livre, quel qu'en soit le sujet. « Dans le domaine de l’édition, on se rend compte désormais qu’il y a d’importants besoins d'accompagnement pour les créateurs indépendants : nos services iront dans ce sens », reprend Arnaud Burgot.
L'avenir s'écrira avec une première étape : une plateforme Ulule entièrement revue et toujours transversale et sans spécialisation. Outre la consolidation des communautés — les audiences de chacun s’avéreront complémentaires, entre communauté créative et projets sociaux —, c’est avant tout une visibilité accrue pour les projets Livre (désignation très large) qui découlera de cette acquisition. Il importera par ailleurs d’optimiser les outils de financement en apportant plus de flexibilité.
L’an passé, le crowdfunding aurait financé le secteur culturel à la hauteur de quelque 86,2 millions € (voire Baromètre du crowdfunding en France 2023, PDF), pour un montant global de plus de 2 milliards € — en retrait de 11,3 %. Cette baisse est principalement attribuable au recul du crowdfunding immobilier, qui a diminué de 28 % tout en représentant 55,6 % de la collecte globale, soit environ 1,16 milliard d’euros.
L’acquisition qu’opère Ulule ne manquera pas d’implications pour le secteur en France, à commencer par la consolidation du marché (ou concentration, terme redouté dans l’industrie du livre), avec un acteur plus concurrentiel face à d’autres acteurs internationaux. Chacune ayant ses spécificités sectorielles et communautaires, leur union proposera une gamme plus étendue de fonctionnalités et de projets, attirant ainsi une audience plus large.
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Évidemment, l’impact pour les projets et les contributeurs bénéficieront de cette nouvelle structure consolidée : un catalyseur, alors que les concurrents internationaux comme Kickstarter et Indiegogo restent des références. Rappelons surtout qu’en 2023, KKBB réalisait un chiffre d’affaires de 2,73 millions € — stable depuis 2020 —, mais un résultat qui n’a cessé de creuser dans le négatif au cours de ces quatre dernières années.
On se souviendra d’ailleurs que l'on ne fait pas feu de tout bois en la matière : Bibliocratie, déclinaison spécifiquement dédiée à l’édition relancée le jour en janvier 2014, mais s’acheva en juillet de la même année, sans parvenir à trouver son modèle économique ni les financements nécessaires. D'autres se sont arrêtés, comme My Major Compagny, qui avait confondu industrie musicale et industrie du livre ou encore Sandawe, qui s'était consacré à la bande dessinée.
Apparue dès le XVIIe siècle, la souscription sécurisait, pour auteurs et libraires/éditeurs, le financement de leurs projets éditoriaux en obtenant des promesses d’achat de particuliers – accompagnées de sommes sonnantes et trébuchantes. Ce procédé assurait donc base financière solide avant l’impression des ouvrages. Exemple célèbre, le poète anglais Alexander Pope lança en 1713 une souscription publique et finança la traduction de l’Iliade en anglais, levant quelque 10. 000 £, somme considérable pour l’époque.
Pas question donc d'inventer l'eau froide : juste le tuyau le plus adapté. Désormais, les outils pour mobiliser l’attention se sont simplement modernisés et en basculant dans l’univers numérique et l’internet du oueb, il devient plus simple de soumettre un projet. Et, corollaire, plus de projets voient le jour, certaines avec des réussites phénoménales, d’autres sans jamais décoller. Mais le livre projet résolument de cette solution, comme par le passé.
Pourtant, ce modèle de concrétisation de projets est parfois surprenant : il suffit pour s'en convaincre de parcourir quelques-unes des campagnes menées à terme, comme Le Seigneur des fourneaux, le livre de recettes non officiel hommage à la saga légendaire, par Gastronogeek ou encore Oenohiphopologie, guide pour découvrir le vin grâce au hip hop et inversement.
Ou, sujet revenant dans l'actualité depuis des mois, Bouquinistes, livre d'art qui célèbre l'histoire des bouquinistes de Paris...
Crédits photo : Ulule
Par Nicolas Gary
Contact : ng@actualitte.com
2 Commentaires
Arthur Magnus
02/12/2024 à 15:46
Bonjour Nicolas Gary.
"Avec plus de 29.000 à impact positif et plus de 177 millions d'euros accumulés" : il manque un mot ("projets", j'imagine ?).
Nicolas Gary - ActuaLitté
02/12/2024 à 15:47
Bonjour Arthur
Presque. Mais vous y étiez !
NG