Trois ans après la publication du deuxième tome de sa trilogie du Pays des autres, Leïla Slimani y met un point final, avec J'emporterai le feu, publié le 23 janvier prochain chez Gallimard. Le livre raconte les enfants de la troisième génération de la famille Belhaj, Mia et Inès.
Le 15/11/2024 à 14:59 par Hocine Bouhadjera
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Les deux sont nées dans les années 1980. À l'image de leur grand-mère Mathilde, de leur mère Aïcha et de leur tante Selma, elles aspirent à une liberté propre à chacune, qu’elles recherchent dans l’exil ou dans la solitude. Elles doivent naviguer entre l'apprentissage de nouveaux codes sociaux et la confrontation aux préjugés, y compris le racisme...
Mehdi se sécha, enfila un tee-shirt propre et un pantalon de toile, et il chercha au fond de sa sacoche le livre qu’il avait acheté pour sa fille. Il poserait sa main sur son épaule, il lui sourirait et lui ordonnerait de ne jamais se retourner. “Mia, va-t’en et ne rentre pas. Ces histoires de racines, ce n’est rien d’autre qu’une manière de te clouer au sol, alors peu importent le passé, la maison, les objets, les souvenirs. Allume un grand incendie et emporte le feu.”
- Extrait de J'emporterai le feu, de Leïla Slimani
Leïla Slimani clôt ici sa fresque familiale commencée dans les années 40, quand Mathilde, une Alsacienne, tombe amoureuse d'Amine Belhaj, un Marocain qui combat dans l'armée française. Après la Libération, le couple s'installe à Meknès, au Maroc, où Amine tente de cultiver des terres arides et Mathilde lutte contre l'isolement et la méfiance en tant qu'étrangère. Le couple persévère malgré les défis financiers et sociaux. Leur histoire se déroule sur une décennie de tensions croissantes, aboutissant à l'indépendance du Maroc en 1956.
Le tome 2 de la trilogie prend place dans les années 60. Amine a transformé son domaine aride en une entreprise prospère. Désormais intégré à une nouvelle bourgeoisie marocaine, il évolue au sein d’une société festive et optimiste quant à l’avenir. Un Maroc nouvellement indépendant qui vacille entre traditions et modernité, tandis qu'une nouvelle génération doit faire face à des choix décisifs...
Les personnages vivent dans ce que Leïla Slimani appelle « le pays des autres » : qu'ils soient colons ou autochtones, militaires ou agriculteurs, exilés ou sédentaires. Les femmes, en particulier, affrontent un monde dominé par les hommes, où elles doivent sans relâche se battre pour leur émancipation.
Le premier volume, Le pays des autres, distingué par le Grand Prix de l'héroïne Madame Figaro en 2020, s'est écoulé à plus de 770.000 exemplaires, tous formats confondus, selon Edistat. Le deuxième, Regardez-nous danser, à près de 270.000 exemplaires. Les deux autres romans de l'écrivaine, également publiés chez Gallimard, Dans le jardin de l’ogre et Chanson douce (Prix Goncourt 2016 et Grand Prix des lectrices de Elle en 2017), se sont vendus à, respectivement, plus de 250.000 et près de 1,2 millions d'exemplaires, tous formats confondus.
Récemment, Leila Slimani a notamment participé à l'écriture de la cérémonie d'ouverture des Jeux Olympiques 2024, créée par Thomas Jolly, ou a présidé le jury de l'International Booker Prize 2023.
Le 6 février prochain cette fois, chez Gallimard toujours, sort le nouveau David Foenkinos, Tout le monde aime Clara, avec une présentation dans le ton de ses précédents livres : « Clara voit au-delà des apparences. Ceux qui la connaissent la redoutent autant qu’ils l’admirent. Car elle ne prédit pas seulement l’avenir, elle l’éveille. »
Le 4 janvier dernier sortait La vie heureuse, chez son éditeur de toujours, vendu à 113.844 exemplaires, d'après Edistat. L'auteur de La délicatesse (2009), vendu à plus de 1,6 million d'exemplaires (grand format et poche confondus), a fait ses débuts en 2002 avec Inversion de l'idiotie : de l'influence de deux Polonais, qui lui a valu le prix François-Mauriac. En 2014, son roman Charlotte a également connu un immense succès avec plus de 700.000 exemplaires vendus (grand format, poche et livre d’art), décrochant à la fois le Prix Renaudot et le Goncourt des lycéens.
Plusieurs de ses livres, dont La délicatesse (adapté au cinéma en 2011 par l'auteur lui-même, avec son frère Stéphane), Les souvenirs, Je vais mieux et Le mystère Henri Pick, ont été portés à l’écran.
À noter le retour de l'important Pierre Michon le 6 février prochain, avec un récit édité chez Gallimard, J’écris l’Iliade. L'auteur des Vies minuscules partage : « Ce récit est souvent érotique. Quand il résiste à l’appel du désir, il écoute les voix des bêtes, des arbres, des pierres, de ceux qu’on a appelé les dieux – les voix de la guerre, aussi. » Et d'ajouter : « L’amour et la guerre sont père et mère de tout récit, depuis le premier, qui est le Chant d’Homère. J’ai essayé d’entrevoir Homère dans ses antiques temps et lieux, mais aussi ici et maintenant. Le Chanteur inlassable hésite entre son époque et la nôtre, sans regret ni nostalgie, ni illusions. Avec étonnement peut-être. Il est aveugle, n’est-ce pas. Nous voit-il ? Homère est le héros de ce livre. » Paraît en simultanée l'édition poche des Deux Beune, dans la collection Folio.
La maison de Kamel Daoud édite également un texte de Georges Navel (1904-1993), Près des abeilles, avec une préface de Jean Giono, publié le 20 février 2025.
À partir de la fin des années 1920, Georges Navel mène une vie au rythme des saisons dans l'arrière-pays provençal. Il occupe, tantôt seul, tantôt entouré d'amis, une maison abandonnée nichée entre vignes et forêt. Cette existence n'est pas exempte de heurts, ponctuée d'affrontements et de moments de désespoir. Toutefois, dans les pages d'une poésie saisissante tirées de Chacun son royaume (Blanche, 1960), Navel exprime « cette patiente recherche du bonheur » qui se déploie comme un « travail de héros grec », rappelant les « Travaux et les Jours d'un Hésiode syndicaliste », selon Jean Giono.
Né en 1904 et disparu en 1993, Georges Navel fait de son récit autobiographique une véritable œuvre romanesque, où il dépeint les paysages et la communion avec la nature.
En élevant des poules, des lapins, des abeilles, j’espérais tirer ma subsistance, lutter, vaincre la nature, faire pousser des légumes, loin des patrons, des chantiers, des bourgeois, vivre libre, dans une heureuse pauvreté. J’avais trente ans, des illusions, il en fallait pour ma tentative. Mon capital d’entreprise se limitait à trois mois de vivres, le temps d’atteindre à la récolte des pommes de terre et d’un carré de haricots verts. Pionnier d’un foyer futur, je vivais momentanément seul.
- Georges Navel
Enfin, Gallimard publie le 6 février 2025 le dernier roman-enquête de Roberto Saviano, Giovanni Falcone, traduit de l’italien par Laura Brignon. Il reconstitue l'histoire de l'assassinat du magistrat, remontant à l'époque où le magistrat, encore inconnu, décide de rouvrir un dossier anti-mafia. Sous la protection d'une escorte sans cesse renforcée, il a patiemment rassemblé un nombre incalculable de preuves contre la mafia, tout en pleurant la perte de nombreux collègues tombés avant lui. Malgré le poids de cette lutte, Falcone a su trouver des moments de bonheur en tant que mari, frère et ami. Mais à chaque instant, il vivait avec la certitude que ses jours étaient comptés.
Roberto Saviano décrit les ramifications étendues de la pieuvre mafieuse, et offre un portrait poignant de l'antidote le plus efficace contre celle-ci : le courage de persévérer, malgré la peur, jusqu'à ce que justice soit rendue.
Roberto Saviano, né à Naples en 1979, est l’auteur de plusieurs ouvrages marquants, dont le best-seller international Gomorra (2007), Extra pure. Voyage dans l'économie de la cocaïne (2014), Crie-le ! (2023), ainsi que des romans tels que Piranhas et Baiser féroce (publiés respectivement en 2018 et 2019), tous édités chez Gallimard. Depuis 2006, il vit sous protection policière en raison des menaces que ses enquêtes lui ont attirées.
Crédits photo : Francesca Mantovani / Gallimard
Par Hocine Bouhadjera
Contact : hb@actualitte.com
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