C’est la fin d’une ère littéraire pour la commune de Bron, à proximité de Lyon. La Fête du Livre de Bron annonce, ce mercredi 9 octobre 2024, mettre « un point final à l’aventure », après 39 éditions pourtant couronnées de succès sur la scène nationale.
Le 09/10/2024 à 17:56 par Louella Boulland
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Publié le :
09/10/2024 à 17:56
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C’est officiel : il n’y aura plus de Fête de Livre à Bron. Et pourtant, depuis 1987, la manifestation s’est imposée comme pionnière dans le genre, « là où n’existaient que des salons du livre axés exclusivement sur les dédicaces », rappellent les équipes de l’événement.
Ce festival proposait de donner la parole aux écrivains, et offrait une véritable programmation artistique, « thématisée et exigeante ». Pour ce faire, les équipes s’appuyaient volontiers sur l’expertise des libraires indépendants pour « penser des croisements entre la littérature et d’autres formes d’expression artistique, des dialogues d’auteurs et des lectures musicales, des projections cinématographiques... », complètent-ils.
Au fil des décennies, grâce à l’impulsion de ses fondatrices, Véronique Forcet et Colette Gruas, et sous la direction artistique successive de Brigitte Giraud, Laetitia Voreppe et Yann Nicol, le festival, soutenu par une équipe « fidèle et engagée », s’est hissé parmi les événements littéraires majeurs de la scène nationale, et couvrait aussi bien la littérature générale que les sciences humaines ou encore la littérature jeunesse.
« C’est une annonce qui peut paraître brutale, mais elle fait suite à une longue réflexion », conclut Yann Nicol, actuel directeur du festival, joint par ActuaLitté. Le critique littéraire pointe du doigt « un contexte difficile, à tous les égards, dans le secteur culturel ». Sous cette formulation se cache une situation financière précaire, cumulée à « l’inflation et la hausse des coûts ». Résultat : l’assemblée générale extraordinaire a voté la dissolution de l’association Lire à Bron, ce lundi 7 octobre 2024.
Pourtant, l’événement affichait de bons résultats : 40.000 visiteurs ont répondu présents lors de la précédente édition du festival en mars 2024, dont le dernier thème aura ironiquement été « sauver l’amour »... Notons également le dynamisme de l’association, qui assurait deux prix littéraires et créait, en 2020, un nouveau projet intitulé « La Route des Libraires ». Ces derniers organisaient des rencontres littéraires hors les murs dans des zones dépourvues de manifestations littéraires.
Mais, continuer d’innover, et développer des projets tout en pérennisant les derniers lancés, s’est avéré être un pari risqué, et onéreux, qui plus est. « Nous dépendons beaucoup des collectivités publiques (Ville de Bron, Métropole de Lyon, région Auvergne-Rhône-Alpes, DRAC, Centre National du Livre) », explique le directeur.
Même s’il souligne l’investissement « de partenaires fidèles ,qui ont fait ce qu’ils pouvaient pour éviter d’en arriver là », c’est en septembre, alors qu'ils planifient l’édition 2025, que Yann Nicol et son équipe ont fait face à un sentiment partagé. « On est arrivés au bout du chemin », constate-t-il.
Il détaille : « La situation pesait sur les équipes, qui étaient épuisées ». À la mention du départ d’Aurélie Dubois, responsable de la communication, quatre jours plus tôt, le passionné de littérature reste en retrait. « La vie des associations et des festivals passe par différents états », conclut-il.
« Nous sommes lucides et préférons arrêter les choses de la meilleure des façons », glisse Yann Nicol. Le clap de fin semble marquer la fin d’une ère pour les Lyonnais, et de nombreux acteurs du monde du livre. « C’est la Fête du Livre de Bron qui m’a donné l’envie et l’audace de créer la Fête du Livre Jeunesse de Villeurbanne », s’attriste Gérard Picot sous la publication Facebook de l’association.
« On a conscience de l’impact et de l’attachement du public et des acteurs à ce festival. Ça nous attriste, mais on l’assume et on essaie de le faire de manière élégante », rassure le directeur du festival, avant de conclure : « la Fête du Livre fut aussi le symbole d’une époque marquée par la liberté, l’exigence pour tous, la démocratisation culturelle, portant haut l’idée selon laquelle l’art et la littérature permettent à chacun de trouver une place dans le monde. »
Crédits image : Romainbehar, CC0, Wikimedia Commons
Par Louella Boulland
Contact : lb@actualitte.com
7 Commentaires
dominique perron
09/10/2024 à 19:23
Bravo à l'ensemble des acteurs de la fête, Yann, Véronique, Colette, Brigitte, Aurélie et tous les autres qui ont tant investi de leur temps pour faire rayonner cette fête unique dans la région. Perso, je n'ai louper qu'une seule édition en 37 ans ! Merci pour ces moments uniques, ces rencontres improbables, ces tables rondes si riches, ce temps suspendu et cette fête unique en son genre!
Un grand vide va s'installer début mars....
Merci pour tout
Christophe Fourvel
10/10/2024 à 08:47
Toute ma sympathie et mon affection à ceux qui ont créé et fait croître cette belle histoire. Une touche de couleur terne et grise supplémentaire, posé sur le tableau d'une époque qui commence à en être saturée. Quand changerons-nous ces peintres qui nous rendent tristes ?
Polettina
10/10/2024 à 21:11
Quelle tristesse ! Souvenirs de moments intenses et riches, de tables rondes extraordinaires. La fête du Livre de Bron va énormément manquer à tous les passionnés de littérature. Merci pour tout !
Flo
11/10/2024 à 01:20
Cette annonce m'attriste ,comme elle attriste tous les Brondillants, car cet événement culturelle faisait partie de notre histoire, presque 4 générations ont vécu cette belle fête devenue un rendez-vous incontournable des écrivains, des poètes, et de tous les amoureux de la littérature .
Nous comprenons derrière les lignes que le problème est purement financier, et nous
le déplorons
Les efforts fournis par Mme Giraud ,M Nicol et toute l'équipe sont à saluer,ils auraient dû être soutenus, mais que dire ,
les temps changent, les Hommes aussi ,et le mot culture n'a pas la signification pour tout le monde ,c'est dommage pour BRON et pour toute la Région .
Chapeau bas à toute l'équipe.
Yves Melia
11/10/2024 à 15:57
Acteur privilégié de la fête du livre de bron pendant plus de vingt ans en tant que chauffeur de l accueil écrivain je suis triste de cette fin brutale.
Pensées à Colette, Véronique, Laeticia et Brigitte qui se reconnaîtront
framboise
12/10/2024 à 08:53
J'ai découvert la fête du livre de Bron par hasard il y a une dizaine d'années. Depuis, chaque mois de mars, je prenais le train d'Aubagne près de Marseille pour Lyon ne pouvant pas manqué ce RV. Je courrais d'une rencontre à une autre, programme annoté à la main, repartais chez moi la valise à roulettes chargée à bloc, la tête pleine de découvertes, l'esprit ouvert au delà des frontières de l' hexagone. Merci pour tout ce que vous nous avez donné, j'espère que vous avez aussi trouvé du plaisir dans ce partage de culture, bien" ESSENTIEL".
guidez jean marie
15/10/2024 à 18:29
Triste nouvelle !
Des décennies de travail professionnel ou associatif pour en arriver là !
Une reconnaissance unanime, une réussite culturelle et populaire...
Une décision "en catimini ", tout sauf démocratique, non clairement expliquée, brutale...
Quelles réactions de la ville, de la métropole, du département, de la région, de l'état ???
Pas d'explication financière claire, aucune évaluation sérieuse, ...
Pas assez de financement, mais quelle revendication ?
Personnel épuisé, mais quelle mobilisation ?
Une décision opaque.
Les libraires, éditeurs, bibliothèques, auteurs, où est leur solidarité culturelle ?
Les temps sont mous !
La politique, l'environnement, et maintenant la culture, " à la trappe ", comme disait l'autre !
Les lendemains seront difficiles...