« Ce n'est pas le locataire du 6e étage qui est anti-fasciste, c'est le fascisme qui est anti-locataire du 6e étage. » Qu’elle est belle cette réplique du film d’Ettore Scola, Une journée particulière ! Et que le livre de Michela Murgia nous aide à mieux comprendre cette idéologie que d’aucuns qualifient hâtivement de nauséabonde !
Le 16/09/2024 à 15:50 par Nicolas Gary
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16/09/2024 à 15:50
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Admettons-le, on ne déteste jamais aussi aisément que pour de crasses raisons : l’ignorance, la méconnaissance, voire, les préjugés. Et si l’on taxe de fasciste à tout bout de champ en notre époque moderne — comprendre : tout ce qui a débuté post Seconde Guerre mondiale – c’est avant tout par paresse intellectuelle. Qu’on accuse ces pauvres fascistes de tous les maux, eux qui ne demandent qu’à être aimés pour ce qu’ils incarnent : la droiture, l’ordre et le respect de la chemise noire bien repassée…
Fallait-il donc être Italienne, comme ce doit très certainement être le cas de la signora Murgia, pour publier un pamphlet anti-fascisme primaire qui hisse l’esprit de son lecteur directement au grade d’anti-fasciste secondaire. Et cette fois, en suivant le mode d’emploi.
Car, il n’est pas d’antifascisme qui ne suive dûment les recommandations d’une pensée structurée, issue d’une tête bien faite – c’est-à-dire, posée sur une nuque. Laquelle a tendance à plier sous le joug fasciste, voire à difficilement résister au contact du tranchant d’un couperet type guillotine. D’où l’expression : avoir le couperet de la tête…
Michela Murgia, auteure italienne reconnue pour son engagement politique et social, publiait en 2018 ce fascicule, incisif et provocateur. Ce court essai, sous la forme d’un manuel ironique, propose une réflexion profonde sur les dérives autoritaires contemporaines.
Murgia y dévoile avec sarcasme les mécanismes insidieux du fascisme, un système de pensée qui, selon elle, persiste sous des formes modernisées dans de nombreuses sociétés actuelles.
Loin de se limiter à une analyse historique du fascisme, elle adopte un ton volontairement cynique pour illustrer les rouages de cette idéologie. Ce texte, qui passerait de prime abord pour une apologie du fascisme, est en réalité une dénonciation des discours populistes et nationalistes qui prolifèrent aujourd’hui.
En jouant sur l’ironie, Michela Murgia pousse le lecteur à réfléchir sur les compromissions politiques et les abandons de valeurs démocratiques qui permettent la montée de régimes autoritaires.
L’essai est ainsi structuré comme un guide pratique, avec des « conseils » sur la manière de devenir un parfait fasciste. Chaque chapitre se concentre sur un aspect précis de la manipulation politique : l’utilisation de la peur comme outil de contrôle, la nécessité d’un ennemi extérieur, ou encore la simplification des débats publics.
Une parodie très intelligente qui révèle combien ces stratégies sont encore utilisées par les régimes contemporains, qu’ils soient situés en Europe ou ailleurs. Car l’auteure n’épargne personne, ni l’Italie ni les autres pays où l’on observe une résurgence de tendances autoritaires.
En ce sens, Devenir fasciste dépasse largement le strict cadre italien et s’adresse à un public international, l’avertissant des dangers d’une acceptation passive de l’autoritarisme.
À la fois alarmant et éclairant, le livre trouve une pertinence saisissante dans le contexte politique actuel, rappelant que la démocratie, loin d’être acquise, doit être défendue chaque jour. Avec pour seul antidote : la vigilance constante des citoyens face aux discours populistes et dans l’engagement pour les droits et libertés.
Un extrait de l'ouvrage est proposé en fin d'article.
Crédits photo : Mussolini à Milan, 1930 - Das Bundesarchiv / CC BY-SA
Paru le 19/09/2024
160 pages
Plon
15,00 €
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10 Commentaires
Gaucho Marx
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Ce commentaire a été refusé parce qu’il contrevient aux règles établies par la rédaction concernant les messages autorisés. Les commentaires sont modérés a priori : lus par l’équipe, ils ne sont acceptés qu'à condition de répondre à la Charte. Pour plus d’informations, consultez la rubrique dédiée.
Gaucho Marx
17/09/2024 à 13:03
"l’utilisation de la peur comme outil de contrôle, la nécessité d’un ennemi extérieur, ou encore la simplification des débats publics"
Il y a bien un parti auquel je pense qui répond à cette définition en France, mais chut... On ne sort de l'ambiguité qu'à son détriment. Car la modé veille et elle a bien raison.
On peut ajouter le culte du chef, l'antisémitisme, l'appel au peuple,...
Gilles
17/09/2024 à 16:22
Jolie description de l'extrême-droite.
Je vous suggère ceci : https://www.aphg.fr/Umberto-Eco-Reconnaitre-le-fascisme
Certains points sont incompatible avec la gauche, malheureusement pour vous.
Par contre l'extrême-droite coche toutes les cases.
Gaucho Marx
17/09/2024 à 23:30
C'est vrai, la gauche ne fait pas encore tout très bien mais elle y travaille fortement. Ne vous découragez pas. Après tout, Mussolini vient du socialisme révolutionnaire (cf Faisceau d'action révolutionnaire interventionniste).
Gilles
18/09/2024 à 07:24
Oui c'est bien connu que Mussolini et Hitler étaient socialistes 😂.
Gaucho Marx
18/09/2024 à 09:40
Ah ces jeunes et l'Histoire !
Pour Mussolini, c'est clair.
Pour Hitler, ça l'est moins, bien que comme le port-salut, ce soit écrit dessus (national-socialisme). Le nazisme avait une dimension sociale et anticapitaliste (comme Hitler pour ce dernier point) indéniable.
Quant au socialisme, dans l'autre sens, on ne peut pas dire que dans les contrées où il a régné ou règne encore, nous avons affaire à de sympathiques démocraties.
NB (wiki)
"Le Faisceau d'action révolutionnaire interventionniste est un mouvement politique italien fondé le 11 décembre 1914 à Milan patronné par des figures de l'extrême gauche interventionniste comme Benito Mussolini et Alceste De Ambris. Il se réfère au programme des faisceaux révolutionnaires d'action internationaliste signé le 7 octobre 1914, par Libero Tancredi (pseudonyme de Massimo Rocca), Filippo Corridoni, Cesare Rossi et d'autres représentants du syndicalisme révolutionnaire en faveur de l'entrée en guerre de l'Italie contre les Empires centraux.
(...)
Les faisceaux d'action révolutionnaire sont présentés par les dirigeants du mouvement comme les noyaux de la future société socialiste.
(...)
La plupart des membres de ce mouvement se retrouvèrent en 1919 pour la fondation des Faisceaux italiens de combat."
Gilles
18/09/2024 à 10:32
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Olivier
18/09/2024 à 13:05
Mussolini a rompu avec le PSI lors de l'entrée en guerre de l'Italie.
Celui-ci étant contre, la rupture était inéluctable. Sa politique ultérieure, notamment cléricale, est aux antipodes des partis socialistes de l'époque.
Quant aux nazis, il suffit simplement de comparer le programme du SPD et du NSDAP pour trancher la question :
https://www.youtube.com/watch?v=PNiNeEQSWoA
Gaucho Marx
18/09/2024 à 14:54
Il a été viré du PSI en 1914 au seul motif (sic) de leurs positions respectives sur l'entrée en guerre de l'Italie.
5 ans plus tard, il était toujours socialiste révolutionnaire :
"Le 23 mars 1919, il fonde les Faisceaux de combat (fasci italiani di combattimento) avec un programme révolutionnaire, nationaliste, anticapitaliste et anticlérical, prévoyant également le vote des femmes, l'instruction et la santé gratuite, l'assurance sociale pour les travailleurs. Il les transforme en 1921 en Parti national fasciste (PNF)."
(Wiki)
Le fascisme au pouvoir évoluera bien sûr vers autre chose, du fait de ses alliances, mais il ressemblera malgré tout à tout ce que sont devenus les autres pouvoirs socialistes ailleurs et ensuite : un totalitarisme.
Edco
19/09/2024 à 08:31
Et le pire , c est qu il n y a pas de gdes différences avec le maoïsme, ou tte autre dictature...voir sur Arte TV les 3 documents sur Mao et la révolution culturelle .... édifiant....