BookBanUSA - Dans un message publié sur son compte X le 31 août, un certain Stephen King, résidant dans le comté de Sarasota en Floride, a exprimé sa consternation : « La Floride a banni 23 de mes livres. C'est quoi ce bordel ? », sans autres détails.
Le 06/09/2024 à 13:35 par Hocine Bouhadjera
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Publié le :
06/09/2024 à 13:35
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Stephana Ferrell du Florida Freedom to Read Project, association qui milite pour l'accès aux livres, suggère que les 23 livres mentionnés par le romancier pourraient faire référence à ceux retirés en attente de révision dans le comté d'Escambia, situé à l'extrémité ouest de la Floride. Le comté fait d'ailleurs face à des poursuites fédérales pour ces retraits.
« Je sais que Stephen King écrit généralement pour un public considéré comme adulte, mais nous avons des adultes dans les lycées. Beaucoup de ses livres ne contiennent pas de contenu qui serait considéré comme obscène ou pornographique selon les normes de quiconque », a commenté Stephana Ferrell auprès de Talahassee Democrat.
En ce qui concerne le comté de Sarasota, aucune documentation n'indique le retrait de livres de Stephen King pour contenu inapproprié, bien que certains aient été éliminés pour des raisons telles que leur état détérioré.
Le comté a récemment été au cœur d'une autre polémique nationale, autour du New College de Floride, où la doyenne de la bibliothèque, Shannon Hausinger, a été mise en congé administratif après que des livres, principalement axés sur des thèmes LGBTQ+, ont été retrouvés jetés dans une benne.
Ces ouvrages provenaient notamment du centre de genre et de diversité de la bibliothèque, géré par des étudiants. L'administration de l'école a justifié cette décision en invoquant un non-respect des procédures administratives de gestion des matériaux, s'appuyant sur le Statut de Floride 273, bien que ce dernier permette la vente ou le don de livres excédentaires.
Dans le comté de Clay, environ 70 des livres de Stephen King ont été contestés par un activiste conservateur : « Il ne s'agit pas juste de ses livres, ni même de 23 livres. Il s'agit des milliers qui ont été retirés au cours des dernières années », constate Stephana Ferrell.
En réaction au post de Stephen King, plusieurs figures républicaines ont réagi, dont Evan Power, président du Parti républicain de Floride, qui demande, toujours sur X : « Pouvez-vous nous donner une liste? Je parie que je peux les acheter tous dans la librairie locale. »
De son côté, le gouverneur DeSantis a notamment expliqué : « En Floride, les matériaux pornographiques et inappropriés qui ont été introduits clandestinement dans nos salles de classe et bibliothèques pour sexualiser nos étudiants violent nos normes d'éducation de l'État. » Un positionnement aligné sur celles des groupes de pressions conservateurs, comme Moms for Liberty.
Cette année, ce dernier a par ailleurs exercé son droit de veto pour annuler 32 millions de dollars de subventions destinées aux arts et à la culture, provoquant l'incompréhension dans son propre camp et parmi les acteurs culturels. En citant comme exemple un festival jugé inapproprié, il a motivé son action par une mauvaise utilisation des fonds publics. Environ 600 organisations culturelles sont affectées, mettant en péril leur fonctionnement et leurs employés.
À LIRE - Aux États-Unis, de nouvelles législations facilitent la censure des livres
Si les décisions concernant les livres dans les écoles ne sont pas prises directement par le gouvernement de Floride, mais déléguées aux responsables locaux des écoles, les législations récentes, soutenues par le gouverneur Ron DeSantis, ont mené à une augmentation notable du nombre de livres retirés des établissements scolaires de l'État.
De nombreux critiques de cette politique liberticide affirment que l'administration DeSantis a fourni des directives peu claires sur ces lois, résultant en des interprétations très variées des normes étatiques qui ont conduit au retrait de centaines de livres dans certains districts, contre très peu dans d'autres.
En cause, entre autres, la loi HB 241, qui permet aux parents d'intervenir plus largement dans les contenus scolaires, ou la loi "Don't Say Gay", signée en 2022 qui limite l'évocation de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre dans les écoles avant la troisième année de l'enseignement élémentaire. Pour cette dernière, des organisations telles que Equality Florida et Family Equality ont contesté cette loi, la jugeant discriminatoire. Après un rejet initial par la justice en 2023, un accord a été signé clarifiant que la loi ne s'applique pas aux livres qui référencent des personnages LGBTQIA+ ou des couples de même sexe.
Mais c'est la loi HB 1069, actuellement au cœur des débats pour son rôle dans la censure de livres, qui est la plus vigoureusement contestée par ses opposants. La dernière action en justice, et pas des moindres, réunit Penguin Random House, Hachette Book Group, HarperCollins Publishers, Macmillan Publishers, Simon & Schuster, Sourcebooks, The Authors Guild, les auteurs Julia Alvarez, Laurie Halse Anderson, John Green, Jodi Picoult et Angie Thomas, deux étudiants et deux parents.
Ils jugent ses dispositions sur la suppression des livres « radicales », soit d'exiger que les bibliothécaires scolaires suppriment les livres contenant tout ce qui peut être interprété comme un « comportement sexuel », sans tenir compte de la valeur éducative de l'ouvrage dans son ensemble.
Dans un communiqué commun, les éditeurs ont par ailleurs rappelé : « Si « un parent ou un résident du comté » s’oppose à un livre, le livre doit être retiré dans les cinq jours et rester indisponible jusqu’à ce que l’objection soit résolue. Il n’est pas obligatoire de réviser un livre dans un délai raisonnable, ni même de le restituer s’il s’avère qu’il ne viole pas la loi. Si un livre est restitué à la bibliothèque, un opposant peut demander un examen par un magistrat spécial nommé par l'État, aux frais du district scolaire. »
Et d'ajouter : « Les étudiants ont besoin d’avoir accès à des livres qui reflètent un large éventail d’expériences humaines pour apprendre et grandir. Il est impératif pour l’éducation de nos jeunes que les enseignants et les bibliothécaires soient autorisés à utiliser leur expertise professionnelle pour adapter les livres de nos auteurs au bon lecteur, au bon moment de sa vie. »
À la suite de cette loi HB 1069, mise en application depuis juillet 2023, des centaines de titres ont été interdits dans des bibliothèques d'écoles primaires, de collèges et de lycées, dans tout l’État, parmi lesquels Le Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley, Les Aventures de Tom Sawyer de Mark Twain, ou encore Le Journal d'une jeune fille d'Anne Frank...
Le porte-parole du ministère de l'Éducation de Floride, Sydney Booker, a répondu à la BBC qu'il s'agissait d'un « coup monté », « qu'il n'y a pas de livres interdits en Floride » et que « le matériel et l'enseignement sexuellement explicites ne sont pas adaptés aux écoles ».
Le 4 septembre dernier, La Society of Authors (SoA), le Chartered Institute of Library and Information Professionals (CILIP) et la School Library Association (SLA) ont exprimé leur préoccupation face à la censure croissante dans les écoles, soulignant l'importance de maintenir des collections de bibliothèques scolaires diverses et inclusives pour protéger la liberté d'expression.
Une enquête d'Index on Censorship indique que 53% des bibliothécaires scolaires ont été sollicités pour retirer des livres, souvent sur des thèmes LGBTQ+, avec une majorité de ces demandes provenant des parents. Les organisations notent également une tendance à l'autocensure parmi les bibliothécaires, due à la peur des confrontations.
Les organisations affirment que les collections doivent représenter divers points de vue et groupes culturels pour enrichir l'éducation des enfants et encourager l'empathie et la compréhension par le biais de la lecture. Ils soulignent également l'importance des visites d'auteurs de divers horizons dans les écoles pour stimuler les habitudes de lecture et la compréhension culturelle.
Face à la menace de la censure et de l'autocensure, qui peuvent limiter la liberté intellectuelle des enfants et entraver leur accès à une information variée, ces organismes insistent sur le dialogue entre les écoles et leurs communautés comme solution préférable. Ils mettent en garde contre les coûts financiers de la censure pour les auteurs, citant des revenus médians bien inférieurs au salaire vital, et appellent à la protection des moyens de subsistance des auteurs qui jouent un rôle crucial dans l'éducation des enfants.
À LIRE - Explosion des tentatives de censure de livres en 2023 aux États-Unis
Et enfin de rappeler leur soutien aux bibliothécaires qui souhaitent développer des collections qui répondent aux besoins divers des communautés, tout en résistant à la censure et en promouvant la liberté intellectuelle.
L'année dernière, les trois associations avaient déjà partagé une déclaration commune, afin d'offrir des orientations sur la gestion de la liberté intellectuelle et les enjeux de censure dans les écoles.
Crédits photo : La Grande Librairie
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Rex Toy
06/09/2024 à 17:55
manquerait plus que les alligators viennent foutre le bordel dans les librairies non mé o cé quoi ce bordel le King va se fâcher à la fin et l'autre le mal peigné c'est pas la quil habite en Floride le golfeur de mes 2 ? ce monde vraiment va mal dude
TOUCHE PAS À MON KING!!
Tartuffe
06/09/2024 à 23:44
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Marie
07/09/2024 à 08:52
Ce ne peut être qu'un yankee, pour s'exprimer ainsi. Jamais lu quelque chose de lui, jamais envie, encore moins aujourd'hui.
Paul
07/09/2024 à 09:22
America is like Germany 1933 ???
Wenn ich das Wort Kultur höre, zücke ich mein Messer!
Céline Proust
08/09/2024 à 09:58
Wenn ich das Wort Kultur höre, entsichere ich meinen Browning.
(Hanns Johstf)
HUPP
08/09/2024 à 16:55
Ich glaube das ein Walther PPK pistol angemessener wäre. Bonne fin de journée !
Marioniet
08/09/2024 à 18:52
"Quand j'entends parler de culture, j'prends mon révolver" in "Conversation avec un adjudant", extrait de "En avant la zizique' : Boris Vian