La lutte contre le piratage informatique continue au Brésil. L’accent est désormais mis sur la suppression des sites de streaming, diffusant illégalement des animes ou Webtoons coréens. En avril 2024, 16 sites ont ainsi été fermés pendant la deuxième phase de l’« Opération Animes », qui s’inscrit elle-même dans le cadre de l' « Opération 404 » : une initiative du gouvernement brésilien pour lutter contre le piratage informatique.
Lancée en novembre 2019 sous la coordination du ministère de la Justice et de la Sécurité publique du Brésil, l’Opération 404 a entraîné aujourd’hui le blocage de 16 nouveaux sites de streaming d’animes et Webtoons coréens.
En référence à l’erreur 404, elle vise à lutter contre les infractions liées à la violation de la propriété intellectuelle. Pour ce faire, le gouvernement fait le ménage sur la toile, et délivre des mandats de perquisition et de saisie au domicile des hors-la-loi, bloque les sites web et applications de streaming, désindexe des contenus sur les moteurs de recherche, et supprime des profils douteux et pages frauduleuses sur les réseaux sociaux.
4 années plus tard, en 2023, la Content Overseas Distribution Association (CODA), elle-même partenaire de l’opération, dressait le bilan : Erreur 404 a bloqué 1974 sites, supprimé 783 applications illégales et a procédé à 128 perquisitions de matériel incriminant, dans une vingtaine d’États brésiliens.
Mais, si l’opération a permis l’arrêt de diverses pratiques illégales en ligne, l’une d’elles nécessitait une analyse plus approfondie, tant sa pratique est courante et généralisée : la diffusion illégale d’animes ou Webtoons coréens. C’est ainsi qu’une seconde opération, découlant de la première, a été lancée en 2023 : « Opération Animes ».
D’abord effective dans la municipalité brésilienne de Pompéu, elle s’est ensuite étendue sur l’ensemble du territoire. Menée en coopération avec la CODA, une association d’entreprises basée au Japon qui regroupe des titulaires de droits sur des contenus japonais, elle est soutenue par des représentants du gouvernement japonais, notamment le ministère de l’Économie, du Commerce et de l’Industrie, l’Agence des Affaires culturelles, le ministère des Communications et l’Agence nationale des politiques publiques.
Ainsi, en septembre 2023, trois entreprises — Toei Animation, Toho, et Bandai Namco Filmworks — ont déposé plainte via la CODA contre plusieurs sites pirates au Brésil, qui diffusaient des animes japonais avec des sous-titres en portugais, la langue locale, sans l’autorisation des détenteurs de droits. À noter que les pirates généraient d’importants revenus publicitaires, et bloquaient l’accès des adresses IP japonaises pour empêcher les créateurs de découvrir les infractions.
De fil en aiguille, et grâce aux travaux des forces spécialisées, cette première phase avait conclu à la suspension de 36 sites, cumulant un total de 83 millions de visites au cours des trois mois précédant l’affaire : un gros manque à gagner pour les ayants droit.
Forts de cette réussite, le gouvernement brésilien a lancé une deuxième phase de « l’opération Animes », en 2024. Cette nouvelle vague poursuit les objectifs de la première, en élargissant son champ d’action.
L’équivalent coréen de la CODA, la Copyright Overseas Promotion Association (COA) de Corée du Sud, a donc rejoint l’équipe, et permet aux autorités brésiliennes de traquer la diffusion illégale de Webtoons coréens.
Le 25 avril dernier, les forces policières de 5 régions — Alagoas, Ceará, Minas Gerais, Rio Grande do Sul et São Paulo — ont exécuté 11 mandats de perquisition, afin d’obtenir des équipements informatiques, tels que des disques durs internes et autres dispositifs permettant de prouver l’implication matérielle des malfaiteurs dans les infractions.
Deux ordres de blocage et/ou de suspension de sites, en plus de la désindexation de contenus sur les moteurs de recherche, ont également été menés à bien.
Cette nouvelle vague ciblait un total de 8 adresses web, dont 3 pointées du doigt par les plaintes de la CODA et 5 sites de piratage de Webtoons signalés par la COA. L’enquête qui a suivi a été menée par le Laboratoire des opérations cybernétiques (Ciberlab) du ministère brésilien de la Justice et de la Sécurité publique, en coordination avec la Direction des opérations et du renseignement intégrés (Diopi).
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En dénouant le nœud de l’affaire, ces derniers ont obtenu l’arrêt d’activité de 8 sites supplémentaires, parmi lesquels animeshouse.net, animesbr.cc, et meuanime.io.
« Ces 16 sites enregistraient un trafic mensuel moyen d’environ 21 millions de visites », annonce la CODA. « Actuellement, l’accès à ces derniers redirige automatiquement vers une page de notification de fermeture mise en place par la CODA », détaillent-ils.
Si l’association d’entreprises japonaise rappelle que ces infractions sont passibles de « 2 à 4 ans de prison, assortie d’une amende », elle précise aussi que « les personnes mises en cause peuvent également être inculpées pour association de malfaiteurs et blanchiment de capitaux », alourdissant considérablement leur peine.
La CODA met en garde : « Il est crucial que les fournisseurs de contenu légitime prennent des mesures pour contrer ces sites ». Mais l’association tient à sensibiliser les fans d’animes, et appelle à la responsabilité de chacun : « Nous souhaitons que les fans de contenu japonais comprennent que la consultation de sites de piratage ou de vidéos illégalement mises en ligne nuit aux créateurs et détenteurs de droits, perturbant ainsi le cycle de création de contenu ».
Pour autant, la CODA ne baisse pas les bras, et s'engage « à promouvoir activement la création d’un marché sain à l’étranger où les contenus légitimes atteignent les fans, et nous continuerons à œuvrer en ce sens », concluent-ils.
Crédits image : ActuaLitté / CC-By-SA
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