Oubliez les Jeux olympiques et paralympiques : 2024 marque aussi une autre échéance, celle de la concordance entre l'année et le nom d'une endurante maison, créée en 2010. Olivier Bron, cofondateur des éditions 2024 a évoqué avec nous, à domicile, les implications de cette « grande coïncidence »... Et dessiné ce que signifie être un (encore jeune) éditeur de BD et de jeunesse indépendant aujourd'hui.
Les planètes sont alignées, le calendrier synchronisé : la « Grande Coïncidence » manigancée depuis des années par les éditions 2024 peut enfin survenir. « Nous changerons de nom l'année prochaine, pour nous fixer un nouvel objectif », ourdit déjà Olivier Bron, croisé en juin dernier à Strasbourg, le fief de sa maison d'édition.
En réalité, admet-il rapidement, en 2010, à la naissance de la structure, 2024 semblait aussi futuriste que les voitures volantes ou les villes sous-marines. Quand nous l'avions rencontré la première fois, en 2016, accompagné par son compère Simon Liberman, à la librairie parisienne La Régulière, le nom de la maison paraissait encore improbable...
Et puis... Voici 2024. Pas question de se laisser dépasser pour autant. Sans se départir d'une sorte de modestie, comme étonné de se retrouver là, éditeur depuis bientôt 15 ans, Olivier Bron constate : « J'ai l'impression que nous avons atteint une taille et une place dans le rayon BD qui est chouette. Le principal enjeu est désormais de se stabiliser, nous sommes encore à une taille où nous choisissons les livres pour les mêmes raisons qu'avant, où on les fabrique de la même manière. »
Ces quatre dernières années, l'équipe des éditions 2024 s'est considérablement développée, réunissant aujourd'hui une dizaine de personnes, pour sept équivalents temps plein. Le catalogue compte une cinquantaine de bandes dessinées, environ 25 titres pour la jeunesse (au sein du label 2048) et deux bonnes grosses poignées de livres illustrés et d'ouvrages « du patrimoine ».
Largement de quoi célébrer, à travers une grande opération en librairies, mais aussi plusieurs expositions à Strasbourg, à l'occasion du statut de Capitale mondiale du livre, ou encore à Formula Bula, du 20 au 22 septembre à Paris. En attendant la fin programmée de l'aventure, le 31 décembre 2024, pour « reprendre à nouveau un pari sur l'avenir » comme l'indiquent eux-mêmes les cofondateurs dans la plaquette détaillant « La Grande Coïncidence ».
Les terres strasbourgeoises ont vu naitre le projet d'Olivier Bron et Simon Liberman à leur sortie de l'École supérieure des arts décoratifs de la ville. Avec plusieurs camarades, ils proposent leurs premiers projets aux différents éditeurs qu'ils apprécient, avec une idée en tête : « Nous avions envie de fiction, de BD d'aventures, mais aussi de BD d'auteurs. Et, finalement, il n'y avait pas de catalogue si évident pour cela, à l'époque. »
« Nous avions alors intégré le fait que la BD puisse accueillir une proposition artistique engagée, avec une intention d'auteur, mais nous ne voulions pas faire, forcément, de l'autobiographique », détaille-t-il. Les Requins Marteaux, Cornélius et L'Association avaient ouvert une nouvelle période de l'histoire de la bande dessinée francophone, en dérangeant les formats et les habitudes, en introduisant aussi « un plus grand rapport au réel », estime Olivier Bron.
Familiers du fanzinat et de la microédition, par leur passage aux Arts déco, mais aussi à l'école Estienne, auparavant, Bron et Liberman montent alors une première structure, un collectif nommé Troglodyte. Cette dernière porte notamment la revue trimestrielle « de bande dessinée et d'illustration » Écarquillettes, labellisée, pour son numéro 1, « fanzine de qualité supérieure ».
Un webzine, Numo.fr, voit même le jour, vers 2006-2007, où Matthias Picard, Thomas Vieille ou encore Guillaume Chauchat font leurs premières armes. Ce dernier, camarade de promotion de Simon Liberman, se souvient : « Troglodyte ont été les premiers à me publier. Pour moi, c'était les grands, j'avais des étoiles dans les yeux ! » Elles ne se sont pas éteintes, puisqu'il a publié en avril dernier Je suis un Américain chez 2024.
En 2010, Olivier Bron et Simon Liberman prolongent leur élan éditorial avec 2024, une maison d'édition plus professionnelle, pour se frayer un chemin dans le 9e art, faire des livres et porter les œuvres des proches, tout simplement. Le catalogue s'ouvre avec Les derniers dinosaures, de Donatien Mary — un autre diplômé des Arts décos de Strasbourg — et Didier de Calan, puis Les aventures intersidérantes de Jean-Pierre Vortex, de Sylvain-Moizie, ancien élève de — vous l'avez deviné — l'école strasbourgeoise.
Ce tropisme pour Strasbourg et ses étudiants fraichement diplômés n'est pas du tout renié, a posteriori, par Olivier Bron : « Les gens qui démarraient dans la BD ou l'illustration et dont le travail nous intéressait, nous les connaissions, finalement », admet le cofondateur, « parce que nous appartenions au même tourbillon, on les avait croisés dans le fanzine ou la microédition ».
En janvier 2020, pour la première fois depuis sa création, 2024 dégage des salaires pour Olivier Bron et Simon Liberman. « Ce n'était pas grand-chose, deux SMIC, mais cela a posé une question, qui allait de pair avec la grosse introspection que tout le monde a connue avec le Covid. Avec Simon, on s'est dit : “Est-ce que l'on a vraiment envie de faire ça ?” »
Sans surprise, Olivier Bron a toujours été un gros lecteur de bandes dessinées. Né en 1982, il grandit à Melun et a relu Tintin « chaque année jusqu'à [s]es 25 ans » et ne s'est jamais vraiment remis des voyages de Corto Maltese. Il a connu les grandes années de Glénat, Soleil et Delcourt, mais aussi une vague inattendue de maisons d'édition indépendantes.
« J'avais 15 ans, j'allais chez mon libraire et, sans vraiment m'en rendre compte, j'assistais à l'émergence de maisons comme L'Association, l'explosion de Sfar et de Trondheim... Le même jour, j'achetais un Lanfeust [de Christophe Arleston et Didier Tarquin, Soleil] et un Comix 2000 [BD collective de L'Association]. » Il s'arrête, puis reprend : « Il y en a un des deux qui m'a servi un peu plus longtemps dans ma formation de lecteur. »
Lorsqu'il se tourne vers des études spécialisées, c'est avec une idée simple en tête : « Je ne m'étais pas projeté éditeur, je voulais être auteur de BD, c'était ça qui m'animait », résume-t-il. Il dessine encore aujourd'hui, participe de temps à autre à une publication de 2024 [Du pin sur la planche, paru en mai dernier, cosigné avec Caroline Klein et Timothée Ostermann], fait un fanzine « quand ça [l]e prend, une fois tous les 5 ans ».
Éditeur malgré lui ? Pas vraiment : « Je m'épanouis, dans le rapport aux œuvres, déjà » détaille-t-il. « L'œuvre “Catalogue 2024”, elle témoigne aussi d'une intention artistique qui regroupe celles de chaque auteur. »
Quand son compère Simon Liberman s'est éloigné de la direction de la maison pour mener à bien Le Talisman [paru en janvier 2023 chez 2024], avant de se limiter à un mi-temps pour conserver une pratique d'atelier, Olivier Bron garde la barre, en assumant le suivi comptable, la gestion des relations humaines, le suivi administratif ou encore la supervision de la fabrication. Tous deux se retrouvent autour du travail d'édition, où un projet reste lu par chacun avant que l'un d'eux ne se charge du suivi auprès des auteurs, selon les affinités.
Après presque quinze années d'activité, tout pourrait avoir changé chez 2024. « Ils sont passés à une structure avec des salariés, ont développé tout un catalogue, obtiennent des prix tous les ans à Angoulême, font de la traduction, accueillent de nouveaux auteurs et restent aux côtés des anciens, font du patrimoine, de la jeunesse », énumère Guillaume Chauchat.
Sophie Guerrive, au catalogue des éditions 2024 depuis 2016 avec, notamment, le fantastique Tulipe, nous confie : « Aujourd'hui, quand j'entends parler des éditions 2024 comme d'une petite maison d'édition indé, ça me fait tiquer. C'est devenu plus que ça. On est heureusement encore très loin de Dupuis ou de Casterman, mais on commence à avoir les avantages des gros sans les inconvénients. Simon et Olivier ont réussi à garder le même cap, c'est juste qu'il y a un peu plus de moyens pour taper un peu plus loin. »
Diffusés et distribués en France par Les Belles Lettres, les livres de la maison sont désormais tirés autour de 4 à 5000 exemplaires, au minimum, avec des pics pour les sorties des auteurs les plus en vue. Les mises en place, elles, varient également selon la notoriété et la bibliographie des auteurs, de 800 pour un premier titre à 10 ou 15.000 pour le prochain opus de Jérémie Moreau.
Aujourd'hui, le principal objectif de la maison reste de consolider l'acquis, en maintenant un équilibre délicat : « Poursuivre le travail avec tous nos auteurs, mais aussi accueillir de nouvelles têtes, car conserver le même catalogue renvoie un message d'immobilisme », résume Olivier Bron. Outre les projets reçus dans la boite mail, les deux cofondateurs gardent un regard attentif sur la microédition et les fanzinats, les propositions au cœur ou en marge des événements, comme ceux de Central Vapeur, association implantée à Strasbourg, ou le Spin Off du Festival international de la bande dessinée d'Angoulême.
En matière d'accompagnement des auteurs, les éditeurs cherchent toujours à « faire le meilleur livre possible avec l'auteur : c'est-à-dire apporter ce que l'on peut, mais comprendre aussi jusqu'où l'auteur peut aller. Pour le premier livre, notamment, il faut identifier les limites actuelles, qu'un créateur pourra éventuellement dépasser plus tard dans son œuvre. »
Une perspective qui dessine d'emblée une relation sur le long terme, comme celle bâtie avec Jérémy Perrodeau : « Dans Isles, il n'y avait pas de scénar', il est parti avec un stylo en impro totale, juste sur le rythme, sans perso. Ensuite, il ajoute un scénario, puis des personnages plus écrits, dans les projets suivants. Il y a des strates... C'est grisant, en tant qu'éditeur, à accompagner », songe Olivier Bron.
Après la rencontre de Simon Roussin, Raphaël Meltz et Louise Moaty, les éditeurs accompagnent la création du titre Des vivants, paru en octobre 2021. Quand Anouk Ricard publie des détournements visuels en y insérant ses personnages, les cofondateurs de 2024 l'aiguillent vers Étienne Chaize, et la rencontre donnera finalement Boule de feu, aussi paru en 2021. En bon professionnel, Olivier Bron s'efface rapidement devant l'œuvre : « On a planté la graine, mais ils ont fait leur livre », tranche-t-il en filant la métaphore verte : « Ça ne peut être qu'organique, nous ne voulons pas être un éditeur de livres de commande, mais de livres d'auteurs. »
Une posture qui sait être réservée et qui plait visiblement aux principaux concernés, les auteurs : « J'apprécie un éditeur qui ne soit pas directif, qui me laisse explorer mes trucs dans mon coin, sans mettre de pression ni essayer de faire le livre à ma place. Mais qui sache aussi me dire sans complaisance quand je me suis plantée », relève ainsi Sophie Guerrive.
Aucun livre de 2024 ne ressemble à un autre livre de 2024, serait-on tenté d'écrire. Et pour cause : les éditeurs publient des livres « auxquels personne ne s'attend », en cherchant l'effet de surprise. En matière de fabrication, par exemple, « nous remettons tout en cause à chaque fois : le papier, le format, nous n'avons pas de collection ». Par chance, la maison s'est trouvée un partenaire idéal en Pologne, avec lequel elle travaille depuis une douzaine d'années.
Ce goût du livre beau a quelque peu coloré un rayon BD indépendantes, dans les librairies. « Je ne dis pas que nous avons tout inventé, mais l'indé s'est fondé avec l'introspectif et l'autobio, mais aussi avec un petit format en noir et blanc, souple. Cette habitude s'est installée, mais les frais d'impression ont beaucoup baissé entre-temps : quand nous sommes arrivés sur le marché, nous avions envie de couleurs, de fabrication, et c'était financièrement possible », se souvient Olivier Bron.
L'éditeur cite également les éditions Misma, qui ont participé à cette « bariolisation » des coins BD. « Là où on se démarquait avec des fabrications un peu classes, le rayon nous a clairement rattrapés », relève-t-il en pointant le mimétisme des « gros » éditeurs, généralement peu inventifs à ses yeux.
La structure a aussi dû faire avec la hausse soudaine des prix du papier, au sein des répliques de la crise liée à la pandémie de Covid-19. « Avant, pour faire un beau-livre, tu rajoutais une toile, un marquage, un deuxième marquage... Aujourd'hui, tu choisis un peu plus tes options, on va dire. Notre expérience en fabrication nous permet de nous en sortir », indique-t-il, en soulignant néanmoins que certains titres, réimprimés aujourd'hui, ont vu leur prix de revient doublé. Helios, d'Étienne Chaize, parmi les titres les plus impressionnants, matériellement, de la maison, « a pris 7 à 8 € par rapport à la première édition de 2016 ».
Ces contingences de l'époque n'empêchent pas la maison de se lancer dans des projets atypiques, comme la publication d'une version illustrée d'un texte-phare de la littérature asiatique, La Pérégrination vers l’Ouest. Le texte, abrégé et traduit par Évelyne Lesigne-Audoly et Delphine Mulard, et les illustrations d'Ōhara Tōya, Utagawa Toyohiro et Katsushika Taito II, occupent plus de 800 pages. Cette fresque épique, qui inspira Dragon Ball à Akira Toriyama, est en librairie depuis la fin 2023.
Si elles se permettent ce genre de prise de risques, c'est parce que les éditions 2024 se savent soutenues par des alliés de premier ordre : les libraires. « Si je continue la comparaison avec les glorieux anciens [L'Association, Les Requins Marteaux et autres, NdR], leur enjeu était de forcer les portes de la librairie, pour exister quand personne ne voulait de leur livre. Aujourd'hui, nous pouvons compter sur la curiosité des libraires, qui vont prendre le temps de lire la nouveauté et de la mettre en avant », remarque Olivier Bron.
Il poursuit : « Les énormes succès d'il y a 15 ans, c'était encore Largo Winch. Aujourd'hui, c'est Riad Sattouf, Christophe Blain... Le public s'est largement ouvert, et un lecteur de littérature qui veut une BD, il va plus facilement aller vers L'arabe du futur que vers Largo Winch. C'est bénéfique pour nos catalogues : nous sommes moins à la marge, le centre de gravité du rayon se déplace. »
Bien qu'à l'origine de grands succès publics chaque année, le secteur de la bande dessinée n'échappe pas aux maux de l'édition contemporaine, entre la paupérisation des auteurs, la concentration des acteurs et d'une partie des ventes, ou encore une tendance à la surproduction.
Proches des auteurs, puisqu'ils le sont eux-mêmes, les cofondateurs se sont attachés à leur proposer des conditions correctes dès les premiers titres, avec un taux de droit d'auteur de 12 % généralisé à tous et toutes, des à valoirs systématiques et même une rémunération des séances de dédicaces dès 2018. Au sein du label jeunesse, 4048, le taux a été porté au même niveau, « quand nous avons remarqué que rien ne justifiait la différence que de nombreux éditeurs imposent encore à leurs auteurs ». Dans le secteur, les taux plafonnent souvent à 6 ou 8 %.
« Être dans la position de l'éditeur, cela permet aussi de se rendre compte que, si certaines mesures ne sont pas faites, c'est simplement par manque de volonté de certains », observe Olivier Bron. Désireux de faire bouger les lignes, l'éditeur s'est impliqué au sein du SEA, le Syndicat des Éditeurs Alternatifs, conçu pour porter la voix des structures indépendantes et répondre à la représentativité patronale unique du Syndicat national de l'édition (SNE).
Inutile de trop insister : jusqu'à présent, le lobbying du SEA reste quasiment inaudible face à celui du SNE. « C'est une question de moyens », réplique Olivier Bron, qui préside la structure depuis 2020. « Depuis janvier, nous avons une personne à mi-temps, et, normalement, la situation devrait changer. » Il ne se fait toutefois pas d'illusion : les éditeurs membres du SEA, une cinquantaine, ne pèsent économiquement pas grand-chose face aux monstres du secteur.
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« Politiquement, on s'insère tous dans un modèle industriel du livre dicté par les mastodontes. À partir de ce moment-là, il faut travailler avec un diffuseur qui, même petit, est soumis au même fonctionnement que les autres, dicté par Hachette, en gros », résume-t-il. Une fois que les constats sur la concentration du secteur, la surproduction, la paupérisation des auteurs sont réalisés par les professions et le ministère de la Culture, que faire ?
Dans les faits, assure-t-il, « nous avons l'oreille du ministère de la Culture, qui a un bureau du livre pointu, très au fait, bien conscient des problèmes et des enjeux. Mais quelles que puissent être leurs bonnes idées, il faut ensuite convaincre leur ministre derrière, qui doit établir le plan d'attaque, et puis Bercy dit : “Non, on s'en fout.” » Le passage de Françoise Nyssen (Actes Sud) au ministère de la Culture a été l'illustration parfaite de cette difficulté à agir sur un modèle qui, en fait de compte, arrange les plus gros acteurs du secteur : « Nyssen n'a rien remis en cause, parce qu'elle était elle-même sortie du moule de la “grande édition”. »
Découragé, Olivier Bron ? Pas encore : le SEA, d'une part, est aussi le lieu d'échanges interprofessionnels précieux, et, d'autre part, 2024 peut agir à son niveau, en adoptant des comportements jugés vertueux.
À l'instar des éditions MeMo, 2024 a construit une partie de sa réputation en même temps que des expositions autour des œuvres des auteurs à son catalogue. « Tout est parti du fait qu'on aimait bien bricoler », se rappelle Olivier Bron en décrivant des locaux où les ordinateurs se disputaient la place avec des scies à chantourner, où des couches de poussières de bois encrassaient les touches des claviers.
À l'origine, cette activité de création d'expositions a même fait tenir la maison 2024, en apportant des ressources bienvenues ou un supplément de visibilité pour des œuvres passées sous le radar. Pour Les derniers dinosaures, le premier livre au catalogue, l'équipe de 2024 se lance dans la reconstitution de l'appartement du narrateur, afin d'animer un peu l'accrochage.
« Quand tu exposes des œuvres, si tu te contentes de les suspendre sur des grilles caddie, c'est chiant et assez nul. Si le public est déjà conquis avant d'aller à l'expo, cela peut marcher, mais quand il faut faire découvrir, cette réflexion autour de l'accrochage est importante. C'est un peu le même enjeu que la parution d'un livre », explique-t-il.
Remarquée, l'inventivité de la maison s'exprime pleinement avec Jim Curious — Voyage au cœur de l'océan, de Mathias Picard (2012) — une des meilleures ventes de la maison, qui a dépassé les 20.000 exemplaires aujourd'hui. Pour le Sismic Festival, l'équipe imagine un dispositif à base de lumière UV, qui fait apparaitre des dizaines de poissons et créatures sous-marines dans l'obscurité. L'exposition vogue encore, augmentée d'une impressionnante structure de bateau pour l'accrochage, et revenait tout juste de l'Internationaler Comic-Salon d'Erlangen, en Allemagne.
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« Au fil du temps, nous nous sommes constitué un réseau de festivals, qui nous permettait de concevoir des expositions, puis de les louer à d'autres lieux. En années 6, 7, 8 de la maison, les locations d'expositions nous ont vraiment permis de faire rentrer de l'argent, surtout que nous faisions tout nous-mêmes », se souvient Olivier Bron.
Des ouvrages de Tom Gauld, Sophie Guerrive, Léa Murawiec, Gustave Doré et d'autres se sont retrouvés changés en autant d'événements. « C'est vertueux, car nous sommes libérés du calendrier de la librairie, et cela permet de garder les œuvres vivantes. Certains de nos livres ont été des fours en librairies, mais les expositions ont ensuite bien tourné », conclut Olivier Bron. « Pour les auteurs, c'est en quelque sorte compensatoire. »
Depuis quelques années, les ventes de droits à l'étranger et les récompenses se multiplient également, offrant d'autres perspectives aux titres. Le FIBD d'Angoulême apporte régulièrement une livraison de « Fauves » à 2024, quand Le grand vide, de Léa Murawiec, a été cité dans la dernière sélection des prestigieux Eisner Awards.
Après l'entretien, Olivier Bron part rejoindre Guillaume Chauchat, qui dédicace Je suis un Américain au sein de la librairie indépendante spécialisée Ça Va Buller, membre du réseau Canal BD, un soutien de la première heure pour la maison. Il échange quelques mots avec les libraires, revient auprès de l'auteur en s'assurant que tout va bien.
Lorsqu'il s'éloigne, Chauchat, interrogé, loue « la confiance » dans sa relation avec Simon Liberman et Olivier Bron. De ce dernier, Sophie Guerrive ne dit pas autre chose : « Je le vois comme quelqu'un de solide et sérieux, bosseur, carré. Dans le milieu artistique, il est assez rare de rencontrer des gens comme lui qui ont, en plus d'une sensibilité artistique, un vrai esprit pratique. » Difficile de n'y lire qu'une simple coïncidence.
Photographie : Olivier Bron, à Strasbourg, le 14 juin 2024 (ActuaLitté, CC BY SA 2.0)
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