L’épuration linguistique se poursuit chez Mattel : l’éditeur du Scrabble nettoie une fois de plus le lexique autorisé dans son jeu, lors des tournois francophones. S’il est toujours possible de tenter la combinaison chicano associé à tarlouze chez soi, en famille ou entre amis, ces termes et d’autres sont désormais bannis des compétitions.
Le 24/12/2022 à 13:03 par Nicolas Gary
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24/12/2022 à 13:03
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L’Express dévoile ainsi une liste frappée d'interdiction — du moins que l’éditeur Mattel souhaite éradiquer. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le champ lexical ne laisse aucun doute : il s’agit de rendre le Scrabble plus soyeux à l’usage et moins enclin à utiliser des réponses péjoratives, racistes, homophobes ou sexistes.
En 2023, une soixantaine disparaîtra des ceux officiellement acceptés, ainsi que la neuvième édition de l’Officiel du Scrabble — publié par la maison Larousse (filiale de Hachette) — le conforme. À l’initiative de la Fédération internationale de Scrabble francophone, ce livret n’a logiquement pas de liens directs avec l’éditeur du jeu. Et ce, bien que Mattel ait cherché à mettre son grain de sable.
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Sauf que là, ce sont les points validés par l’éditeur lui-même dans le cadre de tournois — et que l’on ne s’y trompe pas, la tentative de Vincent Bolloré d’acquérir Lagardère n’y est cette fois pour rien. En effet, par le passé, les termes injurieux et racistes ont déjà été frappés d’ostracisme scrabbelien. Et l’an passé, lors d’une refonte globale, apparut une règle inédite : « Sont exclus tous les mots constituant une incitation à la haine et à la discrimination. »
Il est vrai que les occurrences sanctionnées ne comptent pas non plus par parmi les fleurons de la langue française ni ses plus beaux motifs d’orgueil : tarlouze, poufiasse, nègre, sidaïque, boche, goudou, gouine, enculeur, travelo… pour ne citer que ceux-là. En revanche, difficile de parler de soulagement, mais enculé, grognasse et salope ont été préservés.
En remontant le temps, l’exercice de nettoyage printanier a quelques fondements sociaux : en 2020, l’éditeur décide de censurer près de 200 entrées pour des raisons similaires. La mort de George Floyd, tué étouffé par un policier blanc avait motivé Mattel à écarter tout vocable raciste ou insultant. Malégré les protestations des joueurs, l’éditeur tient bon et parvient à faire évoluer son jeu – et accepte toujours les noms des sorts d'Harry Potter.
Pour la francophonie, un linguiste indépendant fut mandaté afin de procéder à cette révision globale. « Lorsque l’on joue au Scrabble — comme dans la vie — les mots que nous choisissons sont importants. Les mots ont le pouvoir de renforcer, d’encourager et d’honorer, mais ils peuvent aussi être utilisés pour affaiblir, décourager et manquer de respect », conclut-il. Moralité : rital, bimbo, keuf, cagole et d’autres sont épinglés… dans un premier temps.
La liste était d’ailleurs longue, mais leur présence dans les dictionnaires posaient problème. Et que penser de ces termes à double sens, qui font hurler ou sourire selon l’acception : bamboula, donc, est-ce faire la fête ou une injure raciale ? Bicot, le petit de la chèvre ou, là encore, une injure raciste en vogue dans les années 60 en France ? Si goudou est principalement humiliant, nabot devient injurieux et l’on n’est pas prêt de s’arrêter…
Évidemment, la levée de boucliers n’a pas manqué : on reproche, une fois de plus, l’invasion américaine et le puritanisme de sévir — vantant la richesse de la langue française, ses origines rabelaisiennes et son bon vivantisme. Argument des plus fades, mais faciles à faire entrer dans les cranes.
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Un Académicien, Jean-Marie Rouart, déplore même cette privation de liberté : « Je crois que le langage, y compris les insultes, les injures, font partie de l’invention extraordinaire du peuple français. Il y a une richesse extraordinaire du langage. »
Et d’ajouter, sur BFMTV : « Il y aura toujours des équivalences d’insultes. Il ne faut pas confondre l’insulte et en même temps le racisme, le sexisme. Ce sont deux choses différentes. Il faut apprendre la tolérance, mais ça ne s’apprend pas en éliminant des mots. »
Certes oui. D’ailleurs, l’appauvrissement de la langue, frappée sous la ceinture de la sorte, devrait inciter à monter des barricades. Un dictionnaire compte quelque 60.000 motifs de réjouissances : le Scrabble serait dépossédé de deux cents d'entre eux : aux armes, citoyens, aux armes ! Si l’on adjoint les éléments de la francophonie, c’est un génocide que l’omnipotent Américain s’apprête à commettre.
Ou pas ?
Le philosophe néerlandais Spinoza et des années après lui, le linguiste Ferdinand de Saussure, nous l’avaient pourtant bien dit : le mot n’est pas la chose, et le concept “chien” n’a jamais mordu ni aboyé. L’usage de ces grossieretés, haineuses et racistes, dans le cadre d’un jeu bien connu mérite-t-il que l’on parte en guerre ?
Qu’adviendrait-il, alors, si Mattel décidait d’accepter les termes avec un point médian, pour qu’enfin les plateaux puissent exposer animateur•trices ? En outre, l’Académie française estime que chaque décennées 500 entrées sont supprimées, à chaque refonte de dictionnaire, 150 nouvelles font leur apparition. Manque-t-on donc à ce point de vocabulaire pour défendre bec et ongle tafiole, tantouse, schleu et boche, entre autres ?
La persistance d'injures découle de pratiques sociales, mais leur dissimulation ne changera pas les esprits. Tartuffe nous l’a pourtant bien dit : Cacher n’est pas jouer.
« Objectivement dire “Salope” c’est insupportable, c’est insultant, c’est une injure même au regard du droit et il ne me paraît pas incroyable que le Scrabble, qui a la maîtrise de ses règles, soit avant-gardiste et dise “Ces mots-là, on n’en veut pas dans notre jeu” », assure Bertrand Perier, enseignant, auprès de FranceTV Info. Bien entendu.
Mais accepte-t-on de se faire manipuler aussi bêtement qu’une marque, dans un exercice de greenwashing linguistique, s’achète une virginité de la sorte ? Voilà qui donne des envies de galettes…
Crédits photo : ActuaLitté, CC BY SA 2.0
38 Commentaires
Rieg Davan
25/12/2022 à 05:02
sigh
Griesmar Denis
25/12/2022 à 09:59
Il faut rejouer au DIAMINO,équivalent français du Scrabeule franglais.
Kayl
25/12/2022 à 10:08
J'allais dire que notre monde ressemble de plus en plus à celui d'Orwell, mais dans ce cas précis, c'est plutôt de la "virtue signaling". Cette forme d'hypocrisie importée des USA fait son chemin en France.
Aradigme
26/12/2022 à 18:41
Bonjour Kayl,
On retrouve cependant dans cette approche le concept de la novlangue décrite par Orwell dans son roman 1984, la seule langue où l'on enlevait régulièrement des mots afin de limiter les possibilités d'expression des citoyens. Bien entendu, comme dans toutes les idéologies totalitaires, la suppression de modes d'expression s'effectue au nom du Bien, dans l'intérêt des populations visées. Ce prétexte éculé revient régulièrement.
Il s'agit donc bien, comme vous l'indiquez justement, d'un puritanisme hypocrite, mais à mon avis pas seulement. Cette approche est la marque d'une idéologie totalitaire.
Salutations
Aradigme
Arthur Ténor
27/12/2022 à 09:40
Félicitations pour ce commentaire qui résume parfaitement les dangers de l’inquisition wokiste.
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:31
D'accord, Aradigme.
Vincent Krebs
30/10/2023 à 09:00
Cette tentative de prise de contrôle des esprits par le langage est inquiétante, et quotidiennement j'engage les gens à ne pas se laisser faire, et d'abord à avoir ne serait-ce que conscience du problème. Par exemple, ma chef d'établissement et mon inspecteur savent pourquoi je n'emploierai jamais l'expression de propagande "devoirs faits", mais toujours l'expression "aide aux devoirs". On est bien sûr dans la droite ligne de 1984 et de la définition du totalitarisme par Hannah Arendt. Cela me fait penser à ce roman de Lowry, The Giver, dans lequel le mot "death" est supprimé pour laisser place au terme "released", lequel désigne en réalité ni plus ni moins qu'une euthanasie...
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:31
Oui hélas, trois fois hélas...
Aurelien Terrassier
25/12/2022 à 10:14
Je trouve très raisonnable la décision de Mattel de mieux faire face au racisme, au sexisme et à l'homophobie d'interdire des insultes ou mots vulgaires qui certes peuvent être tolérés dans certaines blagues et rôles de cinéma mais au jour d'aujourd'hui vu l'ampleur de certains débats décomplexés sur certains médias très droitiers, il y a des mots qu'il vaut mieux éviter surtout dans un jeu aussi conviviable que le Scrabble où l'on apprend beaucoup tout en s'amusant.
Polo
30/12/2022 à 15:28
"droitier" "décomplexé". On voit bien que votre argumentaire est politique.
Vous prétendez "tolérer" l''expression . De quel droit ?
Et pourquoi être "complexé" de ne pas partager vos opinions ?
Vos "idées" portent les germes du totalitarisme.
Aurelien Terrassier
30/12/2022 à 15:40
Vous avez droit de pas être d'accord avec moi sans pour autant me blamer et apporter vos arguments sur le sujet. En effet, si de telles mots vulgaires et stigmatisants, vous devriez vous interroger sans pour autant être d'accord avec moi. Si de tels mots ne seraient pas interdits dans le Scrabble, est-ce que la parole raciste, antisémite, homophobe et sexiste continuerait à se banaliser encore plus? Au point où on en est notamment sur les chaines d'un célèbre milliardaire dont la ligne éditoriale est clairement d'extrême droite, je pense que oui ne vous en déplaise!
Polo
30/12/2022 à 16:03
Croyez -vous vraiment qu'en supprimant des paroles, on supprimera une idée ?
Croyez -vous les peuples si peu capables à s'adapter ?
Maintenant, remplacez "extrême droite" dans votre discours, par "satanique" ou "hérétique " et vous verrez de qui vous êtes les héritiers. Bien à vous.
Aurelien Terrassier
30/12/2022 à 16:51
Vous jouez sur les mots. Que vous ne soyez pas d'accord avec la décision du Scrabble est une chose mais que vous affirmez que si l'on ne fait rien pour nommer certains mots haineux relève soi de la naïveté soi de la mauvaise foi. Je dis cela tout en sachanf que si Mattel a pris cette décision c'est bien qu'il y ait des raisons légitimes comme j'ai pu le dire plus haut. Alors évidemment que dans le cinema ou au théâtre ou dans la littérature, ces mots seront encore employés dans certains contextes mais ça sera pour mieux denoncer l'horreur que ces insultes peuvent engendrer.
Polo
30/12/2022 à 17:01
Au train où vont les choses, même la culture sera censurée. Ça commence d'ailleurs dans les universités où des groupes militants parfois violents, empêchent la tenue de conférences si les invités expriment des idées qui leur déplaisent.
Remplacez aussi "haine" par "hérésie".
Je ne doute pas de vos bonnes intentions.
Mais vous dansez avec le Diable au bord d'un gouffre.
Aurelien Terrassier
30/12/2022 à 17:28
Certes c'est injuste que certains invités aient pu être bannis de quelques universités. Mais en même temps, avaient-ils des contradicteurs de poids lorsqu'il s'agit des intellectuels issus de la mouvance réactionnaire voir d'extrême droite? Pas forcément selon les cas. Pour la culture, les catholiques integristes et même certains islamistes ont déjà voulu interdire des pièces et des expositions critiquant un dogme religieux. Au niveau de l'humour, parlons-en de ces humoristes virés d'une radio publique sous Sarkozy et même d'autres après car ils déplaisaient à la direction. Comme ces animateurs du service public dont je ne suis pas fan mais tout de même de là à les éjecter, je trouve ça honteux et inquiétant pour le Paf.
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:34
D'accord avec Polo !
Les censeurs de tout poil ont toujours été convaincus d'avoir raison et d'agir pour le bien du peuple, cette masse de benêts à rééduquer par des esprits supérieurs dictant le Bien et croyant améliorer la vie en censurant des mots.
CHRISTIAN NAUWELAERS
Number 6
25/12/2022 à 17:06
Du coup, quand on joue en famille, il y a une brigade Mattel qui peut débarquer chez moi et m'annuler des mots malgré un bon tirage? Voilà qui sera désobligeant surtout si papy mène de 50 points devant moi.
ATENOR
26/12/2022 à 09:13
Est-ce que " wokiste ” sera aussi censuré, puisque c’est une appellation injurieuse désignant un crétin idéologique de haut vol ?
Multifas97
27/12/2022 à 13:45
Tant qu'à faire interdisons aussi cons connards imbéciles idiots
Tout à fait ce que je pense de Mattel
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:35
Moi de même !
CHRISTIAN NAUWELAERS
Salopiot
28/12/2022 à 10:58
Par pitié, relisez-vous, vos articles n'en seront que plus crédibles. Je cite: "La liste était d’ailleurs longue, mais leur présence dans les dictionnaires posaient problème." Quel est le sujet ?
Quoi qu'il en soit l'article est intéressant et démontre l'esprit munichois qui semble habiter la boîte du Scrabble. En poussant la logique plus loin, il faudrait sans doute interdire le langage. Le langage dans sa totalité. Parce que sans utiliser le moindre juron, on peut commettre un texte ignoble. Et accuser le langage serait, du point de vue logique, le même phénomène que d'accuser certains mots du mauvais usage qu'on leur réserverait. Quand bien même ces mots n'auraient qu'une signification et qu'une portée, à savoir l'injure.
Amazone
29/12/2022 à 03:52
Scrabbleuse, je trouve ça complétement ridicule ! Mais où va t on? Bientôt seront supprimés les mots d argot, de verlan...... Mais c'est quoi cet appauvrissement ??? Censure digne d une dictature, inconcevable !!!!
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:36
Bravo Amazone !
CHRISTIAN NAUWELAERS
Polo
30/12/2022 à 15:23
Cette nouvelle quête de pureté a toujours existé : "ça ne se fait pas ! Ça ne se dit pas !".
La pseudo supériorité morale et intellectuelle, exprimée par cet argument convenu "Argument des plus fades, mais faciles à faire entrer dans les cranes." par les sectaires autocomplaisants, en est une preuve des plus limpides.
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:40
Argument juste et éclairé, désolé Nicolas Gary.
Un argument est juste ou faux, honnête ou malhonnête, pertinent ou non.
«Fade», dans ce cas, cela ne veut rien dire; c'est une tentative de noyer le poisson, mais il nage, le petit bougre et elles frétillent, ses petites nageoires argentées brillant de lucidité !
(C'était la minute du poète, maudit car censuré svp -c'est prestigieux !)
CHRISTIAN NAUWELAERS
Polo
30/12/2022 à 17:48
"...mais en même temps". ?
Je ne sais pas si vous avez pris conscience du fait que vous acceptez déjà la censure dès lors qu'elle vous paraît "raisonnable".
Ça commence comme ça...
Désolé, mais entre crier au "facho" et agir comme eux, vous avez déjà admis que franchir la ligne rouge (pour ainsi dire) était faisable.
Dirhavel le Conteur
31/12/2022 à 06:59
Monsieur Gary, je suis bouche bée devant votre maîtrise incroyable du double sens. D'une ligne à l'autre, c'est la douche écossaise. Attaque ironique contre les censeurs puritains, crois-je en commençant une phrase ? Mais non, car celle-ci s'achève en attaque ironique contre ceux qui prétendraient sauvegarder des tas de bouse au nom de la défense de la langue française. Je m'imagine lire le début d'une virulente critique de Vincent Bolloré et de son rêve sournois de théocratie autoritaire ? Non, c'est pour mieux l'écarter du sujet. Arrivent en jolies cascades des arguments d'une sagesse voltairienne sur l'importance de ne pas faire porter aux mots les maux de notre société (vous l'avez ?) mais c'est pour mieux tolérer les autodafés de tous ces vocables qui blessent les âmes sensibles. Vraiment, si vous n'écrivez pas encore pour les "politiques" (j'écris cela entre guillemets, car j'ai un grand respect pour la politique, la vraie), dépêchez-vous de déposer votre CV, ils auraient tort de se priver de votre talent ! Il n'y a qu'à voir les commentaires. Chacun voit midi à sa porte, vous félicite pour ce qu'il croit être le fond de votre pensée, puis s'empresse de s'écharper avec les autres commentateurs sur l'air connu de l'amalgame entre tous les sujets sensibles, pour mieux les vider de leur substance et empêcher tout débat objectif. Si l'enfer est pavé de bonnes intentions, le Diable devrait garder les coordonnées de votre entreprise de carrelage sur la porte de son frigo... Bonne année 2023 à vous, puisqu'elle s'annonce pleine de bruit, de fureur, d'intolérance et de désinformation !
Aurelien Terrassier
31/12/2022 à 11:42
Heureusement que vous êtes là, je me sentais un peu seul face à certaines personnes qui cautionnent l'injustifiable par des arguments pathétiques et ne s'indigne guère en effet de la cancel culture et des fake-news propagées par le milliardaire Bollore proche de l'extrême droite sur ses chaînes.
CHRISTIAN NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:43
Pathétique, la glorification de la censure injustifiable...y compris wokiste et non bolloréenne !
Il ne faut pas rendre le progressisme imbuvable en favorisant ses ennemis.
Mais quand on ne veut pas comprendre...!
CHRISTIAN NAUWELAERS
jujube
02/01/2023 à 05:06
Chic, on n'a pas largué les mots laineux!
Donc, à bas "bicot" mais vive "mouton". Donc, "Bic foutu" permis. Et quid de "vieille bique"?
Elodie Bredin
09/01/2023 à 14:41
Permettez-moi de vous rappeler que Spinoza était néerlandais, et non pas allemand comme indiqué par erreur dans l'article.
Dirhavel le Conteur
10/01/2023 à 01:14
Tiens oui, j'avais zappé... Tiens non, je relis et je vois écrit "néerlandais"... Monsieur Gary aurait-il réagi à la vitesse de l'éclair pour corriger cette erreur ? Il peut y retourner, alors, parce qu'on écrit "pas près de" (dans le sens "loin de") et non "pas prêt de". Contresens devenu monnaie courante depuis des années déjà, et ceux qui le commettent ont oublié que "prêt" se construit avec "à" et non avec "de" : "prêt à tout".
scrabbleur
23/01/2023 à 16:55
L'intégralité des articles sur le sujet ne l'aborde que sous l'angle de la langue. Or, ce qui est en jeu ici c'est précisément d'imposer des règles de langage à un jeu de lettres, dont l'objectif est de former des mots pour faire des points.
C'est là que la décision de Mattel n'a aucun sens pour les joueurs de Scrabble, puisque nous construisons des mots par combinaisons de lettres dans le seul but de le placer sur une grille en le raccordant à d'autres mots. La signification des mots n'a aucun impact sur le déroulement du jeu, et la plupart des joueurs de compétition connaissent des milliers de mots sans en connaître le sens. Il est notoirement connu que les meilleurs joueurs de scrabbles sont matheux plutôt que littéraires, la connaissance encyclopédique de la signification des mots étant pratiquement inutile, la preuve éclatante ayant été donnée par Nigel Richards, joueurs néozélandais qui ne parle pas français mais a "ingéré" l'ouvrage de référence en 3 mois et devenu champion du monde francophone !
Jusqu'à récemment, le travail lexicographique mené pour faire évoluer l'ouvrage de référence était un travail scientifique, argumenté, collégial. mais depuis la version actuelle, l'ingérence de règles éditoriales et irrationnelles se sont immiscées dans le processus, aboutissant à la décision unilatérale (et on se demande à quel point elle est légale) de décider de quel mot serait bon ou non pour des motifs sociétaux et non linguistiques. C'est pour cela que les joueurs de scrabbles s'indignent et non quelque ombre bolloresque qui les manipulerait ! Quelle population plus hétéroclite et représentative socialement que les 20000 compétiteurs francophones de Scrabble, qui depuis des dizaines d'années posent des milliers de mots, dont certains à caractère racistes ou injurieux sur leur grille sans ni se sentir offensés ni en tirer de plaisir sadique. Car là est le point crucial : le mot au scrabble n'est que le vecteur du score à inscrire. à aucun moment il n'est mis dans un contexte littéraire. Merci de laisser les scrabbleurs scrabbler, et merci de les croire suffisamment intelligents pour distinguer les mots qu'ils jouent de ceux qu'ils emploient.
Dirhavel le Conteur
23/01/2023 à 21:59
Cher Scrabbleur,
Entièrement d'accord avec toi, sauf sur un point : selon toi, l'intégralité des articles concernerait uniquement l'aspect linguistique. Je ne trouve pas que ce soit le cas de celui-là, ni de bien d'autres sur ce sujet. Cela transparaît d'ailleurs dans les commentaires, y compris le mien qui critique uniquement la duplicité de l'auteur de l'article, car il me semble à moi qu'il y a essentiellement débat entre les différents commentateurs sur l'opportunité d'opérer ou non cette censure, les uns fustigeant les tenants du politiquement correct et du wokisme, les autres exprimant leur compréhension d'un point de vue qui viserait à éviter de blesser les autres. Visiblement, tu es contre cette "réforme" (comme ce mot est mal utilisé, ces temps-ci), même si tu tentes d'éviter le point de vue politico-sociétal. Je dis "tentes", parce que tu n'y échappes pas, comme tout le monde.
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:50
Supprimer des mots «qui peuvent blesser les autres», c'est de la dictature, c'est monstrueux !
Tous ceux qui se sentent blessés par tels ou tels mots exigeront une interdiction de ceux-ci ?
Et puis quoi encore ?
On peut dénoncer des mots affreux, comme «bougnoule» ou «bicot» (dans le sens d'Arabe) mais pas les supprimer.
Car ils ont existé et on ne réécrit pas le passé: on le raconte, on l'explique, on ne l'efface pas, on ne le modifie pas sauf dans les dictatures !
Non mais arrêtez ces délires absolument nauséabonds !
Ou continuez si vous voulez ouvrir un boulevard à l'extrême droite...
Le progressisme, ce n'est pas cela !
Moi je crois cauchemarder...
Heureusement que l'opposition à ces dérives est forte.
Et pas du seul fait de l'extrême droite, loin s'en faut et heureusement -n'en déplaise aux imbéciles.
CHRISTIAN NAUWELAERS
scrabbleur
31/01/2023 à 14:03
Merci pour Dirhavel le Conteur pour ta réponse. Je me suis peut-être mal exprimé, ce que je voulais dire, c'est que tous les articles et commentaires associés n'abordent jamais l'angle du jeu de scrabble lui-même. tu as bien compris en effet que j'étais fondamentalement opposé sur le principe même de censuré des mots au sein d'un dictionnaire, au nom d'une idéologie ou morale. Mais mon propos était de sortir de ce débat largement illustrés pour éclairer les lecteurs sur l'absurdité supplémentaire de cette décision en voulant appliquer cette censure à un jeu qui se fout, par essence, de la signification des mots. et ce point de vue, qui s'appuie sur l'esprit, la compétition du scrabble, n'est jamais étayée dans les articles.
En résumé, indépendamment de mon avis global sur le sujet, une distinction doit être faite entre une liste des mots autorisés de jouer à un jeu qui a pour objectif de faire des points, et les mots que les dictionnaires usuels choisissent de faire entrer ou sortir de leur publication. La première n'a pour sens que les règles du jeu de Scrabble, la seconde est étroitement liée à la politique éditoriale de la maison d'édition.
NAUWELAERS
27/01/2023 à 03:30
Et nom d'un chien (censurons le «clebs», un terme qui semble disparaître), le mot «nègre» est parfaitement honorable lorsqu'il s'agit d'une plume non créditée dans l'édition !
Non mais quelle inculture...
Si on censure ce mot, voici des artistes qui employèrent ce mot dans au moins une de leurs chansons, soit le titre soit au sein de celle-ci: Piaf, Ferré, Gainsbourg et Nicoletta !
On censure ?
Désolé mais là je cale et non, mille fois non, je ne suis pas raciste !
Nicolas Gary, rien à faire, mais votre article est trop complaisant envers ces épurations.
Qui n'améliorent en rien les réalités concrètes mais instaurent un climat de wokisme qui n'est qu'une minable caricature du vrai progressisme, un label de bonne conscience.
Et si on veut aller dans ce sens, il y a de très nombreux mots qui sont alors menacés !
La vedette belge de la télévision Jérôme de Warzée, également un champion de scrabble, a flingué dans une interview -dans le quotidien «La Dernière Heure» -la profonde bêtise hypocrite de ce genre de démarche.
Et non, il n'est pas du tout d'extrême droite !
Un vent de rébellion contre cette bêtise moralisante...
SVP...arrêtons d'infantiliser les gens !
On censure alors les films, romans et pièces de théâtre contenant des mots «problématiques» ?
Je n'attends pas de soutien à ce type de dérive de la part d'un grand site culturel réputé !
Merci...
CHRISTIAN NAUWELAERS
CHRISTIAN NAUWELAERS
jujube
30/10/2023 à 18:31
Ravi de rencontrer à nouveau le thème scrabbleu (ou rouge, selon les goûts et couleurs dont on ne discute pas, c'est bien connu) et les habitués de la guerrilla commentatrice.
Mattel a fait son possible pour épurer le langage, mais il pourrait aller plus loin.
Il devrait prohiber l'usage de toutes les voyelles qui envahissent les mots, parce qu'elles puent l'ail, sont vomitives, cancérigènes et responsables des méningites du lecteur. Donc, quittons-les une fois pour toutes et, pour se protéger d'une récidive, mettons les consonnes restantes à l'envers pour purger les mots de leur poison possible. Les mots ainsi traités deviendraient incompréhensibles et leurs usagers s'épargneraient le doute d'avoir péché, tant en parlant qu'en écrivant.