Une correctrice aux Prud'Hommes pour obtenir la requalification de son emploi
Ce 16 septembre, le Conseil des Prud’Hommes devra trancher dans une affaire qui oppose les éditions Robert Laffont à une correctrice. Selon les informations communiquées par la CGT Livre, cette dernière aurait travaillé de nombreuses années sous le statut d’autoentrepreneur. Or, la convention collective dans sa célèbre Annexe IV impose un salariat.
Le 14/09/2021 à 14:45 par Clément Solym
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Publié le :
14/09/2021 à 14:45
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L’Ubérisation dans l’industrie du livre est dénoncée depuis des années : le Collectif des correcteurs précaires a tenté de faire entendre sa voix jusque sous les fenêtres du Syndicat national de l’édition — à l’occasion d’une vibrante manifestation en janvier 2017. Depuis, les négociations interprofessionnelles ont abouti à quelques compromis et autres grincements de dents.
CORRECTEURS: “Nous, les Deliveroo de l'édition”
En décembre 2018, la révision de l’Annexe IV de la convention collective de l’édition finissait par une petite musique façon accords et désaccords, en moins jazzy, pour trois années. « Il y a toujours un risque que l’accord soit détourné, et que l’amélioration de la situation des travailleurs à domicile pousse les entreprises à préférer l’autoentreprise. Nous vérifierons tout cela », assurait Martine Prosper, de la CGT.
L’accord était juridiquement plus contraignant, estimaient les correcteurs — et plus globalement les Travailleurs à Domicile. C’était une époque pré-Covid.
« Salariat déguisé »
Or, la CGT Correcteurs, interrogée par ActuaLitté, pousse le volume, à l’occasion de ce jugement. Selon leurs propos, « Editis est probablement le groupe d’édition qui dévoie le plus le statut d’autoentrepreneur ». Pas de chiffres permettant de comparer les situations dans les autres entreprises, mais un constat : « La coexistence des deux statuts (salarié et « indépendant ») prouve bien que l’autoentrepreneuriat n’y a pas sa place, sinon pour déguiser du salariat. »
Et d’ajouter que dans plusieurs maisons, à travers toute l’édition française, des salariés âgés sont poussés à la retraite, « pour ensuite être remplacés par des autoentrepreneurs. Certaines exigent même de leurs salariés qu’ils prennent le statut d’autoentrepreneur s’ils veulent continuer à travailler — quand elles les paient à la tâche, le chantage n’est pas qu’une menace ».
ENQUÊTE: Plus indépendants et polyvalents, les professionnels de la correction
Manifestement, le cas de cette correctrice serait cependant unique — probablement parce qu’il existe un risque de ne « plus avoir de boulot ailleurs. Le monde de l’édition est un petit monde où les noms circulent, notamment ceux de celles et ceux qui n’acceptent pas la précarité qui s’est durablement installée dans cette branche professionnelle ».
Selon les informations communiquées, Editis emploierait 70 correcteurs en CDI. Pour la CGT, le problème se retrouve, globalement identique : « Ces salariés ne travaillent peut-être que quelques heures par mois, voire parfois aucune, c’est tout le problème aussi du statut salarié de travailleur à domicile, dans lequel l’employeur n’a aucune obligation de fournir du travail. »
Et de conclure : « Dans beaucoup de maisons, les TAD salariés voient leurs volumes de travail diminuer au fil des années, car le boulot est externalisé auprès d’autoentrepreneurs, travailleurs encore plus précaires ! »
La CGT Livre appelle pour sa part ses membres et les sympathisants à se retrouver ce 16 septembre devant le Conseil des Prud’hommes. Non sans souligner : « L’autoentrepreneuriat fait des ravages, il précarise à outrance, fragilise les statuts salariés et, à terme, menace même les métiers. Car qui voudra se former à la correction s’il n’a comme perspective qu’un statut de faux indépendant, mais vrai précaire, celui d’un travailleur payé à la tâche, éjectable à tout moment sans indemnité, sans la protection du Code du travail et des accords collectifs, sans représentation syndicale officielle ? »
Sollicité, le groupe Editis n'a pas souhaité faire de commentaires.
Par Clément Solym
Contact : clements@actualitte.com
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6 Commentaires
NAUWELAERS
14/09/2021 à 23:19
Et pour la nouvelle mode des livres autoédités, même à un très haut niveau commercial...
On a découvert que le nouveau de Zemmour, en congé forcé d'Albin Michel, «La France N'a Pas Dit Son Dernier Mot»commence, ô ironie d'un sort malin, par un mot mal orthographié: j'ai vu la page 1 en question exposée sur le web.
On y brocardait assez gentiment le polémiste qui se prend les pieds dans le tapis de l'orthographe -sans commenter le fond de ses idées, certes l'essentiel mais hors sujet ici !
«J'ai pêché» au sens de «j'ai péché», aucune pêche au gros ici !
Mais un mot pris pour un autre; il me semble même que la page contient deux occurrences pour cette regrettable méprise qui entache la forme du début de l'ouvrage.
Ô traîtres paronymes qui piégèrent la plume ou le clavier de ce penseur et polémiste se rêvant décideur (au fait...une autre confusion mais d'un tout autre ordre pour cet autre élément ? Je ne me prononcerai pas !).
Un peu gênant tout de même...
Ses indemnités sont encore pendantes je crois mais Zemmour n'avait-il pas les moyens de s'offrir les services d'une correctrice ou d'un correcteur fiable ?
Ce métier qui m'est cher est honteusement dévalué voire martyrisé et ce site nous tient très bien informés de cette triste réalité.
Arrivera-t-on enfin à une amélioration indispensable ?
Les livres non relus ou mal relus sont dévalorisés selon moi.
À moins que l'auteur ou autrice maîtrise parfaitement l'orthographe, la syntaxe, l'orthotypographie, la conjugaison, les accents, le style etc.
Sans compter les noms propres !
Cela existe encore mais ce n'est pas ou plus la tendance majoritaire.
La correction ou relecture vraiment pro peut encore rendre de fieffés services !
Il serait temps de revaloriser ce métier spécialisé en déshérence.
Si cette correctrice obtient gain de cause, ce sera un signal positif.
Lapalissade mais cela va mieux en le disant (ou l'écrivant) !
CHRISTIAN NAUWELAERS
CHRISTIAN NAUWELAERS
SamSam
15/09/2021 à 10:38
La Justice, la CGT, les journalistes se réveillent...J'ai eu l'occasion de faire un passage chez Nathan en 99, les correctrices y étaient nombreuses, sur-diplomées, free-lance...
"Editis n'a pas souhaité commenter"...
Thelx
15/09/2021 à 11:47
Et quid des correctrices et des correcteurs qui débutent et à qui l'on propose une rémunération différée... en droits d'auteur ?
SamSam
15/09/2021 à 12:03
C'est-à-dire que leur rémunération est prélevée sur les droits d'auteurs des livres qu'elles corrigent ?... Déjà que les éditeurs payent les auteurs au lance-pierre, quand ils les payent (cf L'Harmattan)....
NAUWELAERS
15/09/2021 à 19:33
Thelx,
Payer le travail de correction en droits d'auteur ?
Pourquoi pas en monnaie de singe ou en roubles ?
Honte à celles et ceux qui tirent le métier encore plus vers le bas en acceptant une (promesse de ou possible éventualité de) rémunération en droits d'auteur !
De vraies et vrais pros n'accepteront pas de plomber encore plus cette profession qui se porte déjà si mal.
En acceptant ce type de contrat léonin, et en exerçant une concurrence on ne peut plus déloyale contre des collègues fiables quant à leurs compétences !
Pourquoi pas de la correction automatique dans ce cas ?
Pour le nouvel essai de Zemmour que j'évoquais dans un autre post: «La France N'a Pas Dit Son Dernier Mot», j'ai pu lire le début de la première page dans un exemplaire physique en vente à Bruxelles, ce 15 septembre.
Ci-dessous, les deux phrases initiales entre guillemets.
«J'ai pêché (sic), je le confesse.
Pêché (resic) d'orgueil,pêché (encore) de vanité, pêché (stop) d'arrogance.»
Quatre fois cette bourde...
Relu ou pas, cet ouvrage ?
Tout de même aucun...sabotage possible, j'imagine ?
On me rétorquera que si quelqu'un est payé en droits d'auteur pour la relecture de cet essai-là (un cas particulier) promis à un énorme succès commercial -ce qui divisera plus que jamais: on s'en réjouit ou on s'en afflige mais on constate (sauf très grosse surprise et fiasco...)-ce sera un jackpot, si tout est effectué de façon réglo au bout du compte.
Mais je ne sais pas si quiconque s'est attelé à la correction de ce livre...
CHRISTIAN NAUWELAERS
SamSam
15/09/2021 à 12:00
Très fatiguant ce bandeau pub à gauche. Pas possible, au moins, de le rendre immobile ?