Big Ben, le carillon le plus populaire du Royaume-Uni, et bâtiment le plus photographié de la Grande-Bretagne, a fêté ses 157 ans. Quelques travaux entamés voilà quatre ans n’ont pas affecté la bonne santé de ce bébé de 13 tonnes. Pour mémoire, la tour Eiffel n’en pèse que 10.100 (de tonnes). Et depuis maintenant un an que le Gros Ben a quitté l’Union européenne, avec ses administrés, il intéresse l’artiste argentine Marta Minjujín. Elle projette de reproduire à Manchester cette majestueuse tour.
Marta Minujín est une performeuse de 78 ans, pas en manque d’idées : fortement inspirée par les 93 mètres d’histoire de Big Ben, elle prendra part au Manchester International Festival, qui se tient du 1 au 18 juillet. Pour l’occasion, elle souhaite réaliser une copie de “Notorious” B.I.G Ben, mais sur 42 mètres seulement. Et sa sculpture sera allongée dans les Piccadilly Gardens : quitter Westminster pour Manchester, voilà bien un projet de délocalisation audacieux.
Bon, avant que les indignés ne s'indignent, il s'agit bien de toute la Elizabeth Tower qui sera reproduite, et pas uniquement l'horloge qui trône à son sommet. Mais on connaît bien mieux Big Ben que la Tour Elisabeth. Vive l'art, et vive les métonymies !
Mais l’artiste ne s’arrête pas à ces détails : elle a surtout décidé de reproduire Big Ben en recouvrant l’œuvre de 20.000 ouvrages politiques, qui ont façonné le monde britannique. Un ensemble de marqueurs temporels, mais également un moteur de conversations, qui reflètent une nécessité de mouvement, assure-t-elle. « Les gens en ont besoin ! Nous avons besoin de nouvelles idées et de nouveaux lieux de rencontre. Les symboles mondiaux comme Big Ben se tiennent tout droits et ne changent jamais — or, le monde est en constante évolution », clame Marta Minujín.
FORÊT: un livre publié sur des arbres vivants
Big Ben Lying Down with Political Books représente une continuité dans sa carrière, puisque la performeuse s’est spécialisée dans les œuvres d’art à grande échelle, et les performances participatives, où l’art devient objet social, engagé au cœur de la vie quotidienne.
En couchant Big Ben, le symbole résonne déjà fortement : mis au niveau du public, il n’est plus le monument érectile (ou érigé, plutôt…) inaccessible. Une réinvention autant qu’une appropriation à hauteur des femmes et des hommes qui passeront à côté, pour repenser les symboles nationaux.
D’autant qu’elle n’en est pas à son coup d’essai en la matière : en 1983, elle avait conçu The Parthenon of Books, réplique du temple situé à Athènes. Cette fois, c’était avec des livres censurés que le travail avait été opéré. Et le projet fut d’ailleurs reconstruit en 2017 à Cassel (Allemagne), à l’occasion du Documenta 14, l’exposition quinquennale d’art contemporain.
« Les Anglais seront très étonnés. Certains trouveront beaucoup d’humour dans cette œuvre », assure Marta Minujín en évoquant son Big Ben… Notons également que Patti Smith est prévue pour une intervention à l'occasion du MIF21, plutôt chantée, elle.
Crédit illustration et photo : Big Ben, Eva Dang/ Unsplash ; Big Ben Lying Down With Political Books © Marta Minujín ; The Parthenon of Books, Domaine public
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