La poétesse cubaine Nancy Morejón embarrasse le Marché de la Poésie
Le 40e Marché de la Poésie ouvrira ses portes Place Saint-Sulpice, à Paris, le 7 juin prochain. Cette édition, centrée sur les nations des Caraïbes, avait confié sa présidence d'honneur à la poétesse cubaine Nancy Morejón, officière de l'ordre des Arts et des Lettres depuis 2013. Mais les prises de position de cette dernière, notamment son soutien de la dictature cubaine, ont obligé l'organisation à revoir son programme.
Le 02/06/2023 à 16:17 par Antoine Oury
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02/06/2023 à 16:17
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Poète, essayiste et traductrice née en 1944 à La Havane, Nancy Morejón a étudié la littérature française à l'université de La Havane, et a traduit vers l'espagnol de nombreux auteurs caraïbéens, dont Aimé Césaire et Édouard Glissant.
Autant dire que son choix en tant que présidente d'honneur du 40e Marché de la Poésie n'était pas un hasard. Officière de l'ordre des Arts et des Lettres depuis 2013, elle incarnait un trait d'union entre l'événement littéraire et les nations des Caraïbes qu'il voulait mettre en avant.
Une « complicité » avec la dictature ?
Lorsqu'il apprend la participation particulière de Nancy Morejón au Marché de la Poésie, l'universitaire, écrivain et journaliste cubain Jacobo Machover, né à La Havane en 1954 mais exilé en France depuis 1963, se dit « consterné ».
Je préfère attribuer cette décision à l’ignorance des responsables plutôt qu’à une complicité affichée avec les autorités culturelles du régime dictatorial de Cuba, le pays où je suis né et dont je suis exilé.
– Jacobo Machover, Lettre ouverte au Marché de la Poésie
L'auteur poursuit, dans une lettre ouverte, la qualifiant de « complice et [...] propagandiste active du régime castriste, en place depuis plus de 64 ans ». « Il est parfaitement incongru de lui attribuer la présidence d’honneur du Marché, une manifestation culturelle qui est aussi une affirmation de la liberté d’expression dans le monde. Sa réputation et son image en seraient considérablement ternies », souligne-t-il encore.
Révolution et liberté d'expression
Pays longtemps isolé — et marqué par un embargo américain de grande envergure —, Cuba se caractérise notamment par son régime à parti unique, où le président Miguel Díaz-Canel, élu pour en 2019, a été réélu en avril dernier avec 97,66 % des voix de l'Assemblée nationale du pays.
Dans ce contexte, Nancy Morejón est présentée par Jacobo Machover comme une autrice consensuelle avec le régime, « directrice de la revue Unión, l’organe de la très officielle Union des écrivains et artistes de Cuba, qui n’admet dans ses rangs que les intellectuels qui font allégeance au pouvoir et dont tous les dissidents et éléments critiques sont impitoyablement exclus ». La poétesse présida elle-même l'Union, de 2008 à 2012.
Le PEN Club français a emboîté le pas à l'auteur cubain, dans un message du président, Antoine Spire, adressé aux organisateurs du Marché de la Poésie.
De tous côtés les Cubains que nous avons consultés nous confirment que depuis des années [Nancy Morejón] soutient avec force non seulement la politique des autorités de son pays qu’elle a même signé à Cuba plusieurs textes que nous avons en mains qui affirment qu’il n’y a pas de répression dans l’île. Elle stigmatise même nombre de ceux qui au nom de la liberté d’expression ont pris parti contre le gouvernement cubain.
– Antoine Spire, président du PEN Club français
Rappelons que, depuis 1997, il existe un PEN Club des écrivains cubains en exil, dont le siège se trouve à Miami, point d'entrée historique des Cubains exilés aux États-Unis. Le poète Luis de La Paz, président de l'organisation, expliquait en 2022 : « Notre organisation répond aux statuts du PEN international des écrivains, mais ces 25 dernières années, nous avons dû lutter contre une agressive campagne du gouvernement cubain : il nous qualifie d’écrivains de “seconde classe”, d’organisation politique et d’être financé par la CIA ainsi que le gouvernement américain. »
Pressions et rumeurs
Dans un message diffusé ce mercredi 31 mai, les organisateurs du Marché de la Poésie annoncent renoncer à l'attribution de la présidence d'honneur à Nancy Morejón, « [a]fin de couper court aux pressions, rumeurs et tentatives exercées à ce jour — de part et d'autre [...] ».
Vincent Gimeno-Pons, délégué général du Marché de la Poésie, cite auprès d'ActuaLitté la signature de Nancy Morejón au bas d'une pétition datant de 2003. Cette dernière s'adressait à des auteurs et artistes cubains exilés, qui s'étaient manifestés contre une vague de condamnations visant 75 dissidents, et l'exécution de 3 jeunes Cubains après une prise d'otage ratée afin de quitter l'île.
Par ce texte, les auteurs déploraient que les positions servaient « la grande campagne qui cherche à nous isoler et à préparer le terrain pour une agression militaire de Cuba par les États-Unis ».
« On ne peut pas être contre la peine de mort chez nous, sans l’être partout dans le monde, quel que soit le régime », souligne le délégué général de l'événement poétique français. Le Marché de la Poésie envisage malgré tout de maintenir une intervention autour de la poésie de Nancy Morejón, mais reste sans nouvelles de sa part.
Une « haine maladive »
Côté cubain, l'annulation de la présidence d'honneur est copieusement critiquée, en premier lieu par l'Union des écrivains et artistes de Cuba. « Ceux qui se rangent aux côtés de la haine et de la répression ont fait pression sur les organisateurs du Marché de la Poésie afin que Nancy perde son statut de présidente d'honneur, un rôle qui rendait justice à une œuvre poétique de dimension internationale », a ainsi souligné Alberto Marrero, président de l'Union.
Plusieurs membres de l'organisation ont fait part de leur soutien à la poétesse, et le ministère des Affaires étrangères cubain lui-même s'est exprimé sur le sujet, dénonçant « les actions fascistes menées contre les représentants de la culture nationale ».
La culture cubaine, qui subit l'impact du blocus économique inhumain et illégal, est porteuse de messages de paix, de dialogue et de tolérance. Elle rejette la barbarie, la haine et la violence que les intérêts monopolistes impérialistes tentent d'imposer, depuis les États-Unis et par certains de leurs alliés.
– Le ministère des Affaires étrangères cubain, le 1er juin 2023
Interrogés, les organisateurs du Marché ne souhaitent pas entretenir une « polémique inutile, face à des accusations qui n’ont aucun sens ».
Photographie : Unión de Escritores y Artistas de Cuba-UNEAC, via YouTube
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21 Commentaires
Jacobo Machover
02/06/2023 à 17:54
Aux responsables du 40e Marché de la Poésie
À tous les éditeurs participants
À tous les poètes libres
Paris, le 24 mai 2023
J’ai appris avec consternation que la poétesse cubaine Nancy Morejón allait occuper la présidence d’honneur de l’édition 2023 du Marché de la Poésie, qui se déroulera du 7 au 12 juin, place Saint-Sulpice à Paris.
Je préfère attribuer cette décision à l’ignorance des responsables plutôt qu’à une complicité affichée avec les autorités culturelles du régime dictatorial de Cuba, le pays où je suis né et dont je suis exilé.
J’aimerais simplement vous rappeler que cette poétesse est actuellement la directrice de la revue Unión, l’organe de la très officielle Union des écrivains et artistes de Cuba, qui n’admet dans ses rangs que les intellectuels qui font allégeance au pouvoir et dont tous les dissidents et éléments critiques sont impitoyablement exclus.
À ce titre, elle figure parmi les premiers signataires d’un « Message » d’éducateurs, journalistes, professeurs, écrivains, artistes et scientifiques cubains, résidant encore dans l’île (pour combien de temps ? : nombre d’entre eux s’en échappent dès qu’ils en ont l’opportunité), épaulés par leurs « collègues » étrangers, parmi lesquels figure en première place le journaliste Ignacio Ramonet, biographe officiel de Fidel Castro et du Vénézuélien Hugo Chávez, daté du 5 octobre 2022 et signé à La Havane.
Que dit ce message ?
« Nous sommes partie intégrante des millions de Cubaines et de Cubains qui avons été formés par la Révolution et qui défendent ses valeurs. »
« Nous nous identifions avec l’effort et l’abnégation des autorités cubaines. Conscients des difficultés et des erreurs, le Parti et le gouvernement dirigent la récupération et y participent directement. »
« La répression n’existe que dans les messages qui incitent à la violence (…) »
« Nous condamnons les discours de haine, la diffamation, les déformations de la réalité. »
« (…) Nous défendons la vérité de Cuba. »
La vérité ? Elle n’est pas de ce côté-là, mais de celui des plus d’un millier de prisonniers politiques, arrêtés au cours ou en marge des manifestations pacifiques qui ont eu lieu les 11 et 12 juillet 2021 dans tout le pays et ont été durement réprimées. Les messages « qui incitent à la violence » et les discours « de haine » proviennent en réalité de ceux qui, dans l’ile et en exil, réclament leur libération et l’arrêt de la répression, y compris contre d’autres manifestants pacifiques arrêtés le 7 mai 2023 à Caimanera, une ville de l’est de Cuba. Parmi les personnes détenues et condamnées à des peines démentielles de prison, figurent plusieurs courageux artistes, écrivains et poètes, qui refusent de se plier à l’obligation pour tous, intellectuels et gens du peuple, de se livrer en permanence à l’éloge du régime.
La poétesse Nancy Morejón est coutumière de ce genre de pétitions, visant à justifier les plus abominables crimes gouvernementaux. Ainsi, au cours du « printemps noir » 2003, il y a tout juste vingt ans, elle avait déjà paraphé un autre « Message » adressé aux « peuples du monde » pour appuyer l’exécution par les autorités de trois jeunes Cubains qui avaient tenté de détourner un bateau pour s’échapper de la prison que représentait Cuba pour eux et pour des millions d’exilés. Cette missive appuyait également l’emprisonnement et la condamnation de 75 dissidents à des peines allant jusqu’à vingt-huit ans.
Parmi ces opposants figuraient d’innombrables poètes. Le plus connu d’entre eux était Raúl Rivero, décédé en exil en 2021, que j’avais eu l’honneur de traduire et de faire publier dans un volume intitulé Mandat de perquisition aux éditions Al Dante, l’une des maisons d’édition qui participent régulièrement au Marché de la Poésie. D’autres écrits de ce grand intellectuel ont paru chez Gallimard.
Nancy Morejón, que le grand poète Reinaldo Arenas, mort en exil en 1990, critiquait déjà ouvertement il y a des décennies, est une complice et une propagandiste active du régime castriste, en place depuis plus de 64 ans !
Il est parfaitement incongru de lui attribuer la présidence d’honneur du Marché, une manifestation culturelle qui est aussi une affirmation de la liberté d’expression dans le monde. Sa réputation et son image en seraient considérablement ternies.
Je vous demande instamment de corriger cette faute et de retirer à Nancy Morejón l’honneur qui lui a été malencontreusement attribué. Cela ne pourrait que contribuer à la liberté de Cuba, et bien sûr de sa poésie et de sa littérature, qui constituent le patrimoine commun de tous les écrivains et poètes à travers le monde.
Jacobo Machover, écrivain et universitaire cubain en exil en France
A los responsables del 40° Mercado de la Poesía
A todos los editores participantes
A todos los poetas libres
París, 24 de mayo de 2023
Me enteré con asombro de que la poetisa cubana Nancy Morejón va a ocupar la presidencia de honor de la edición de 2023 del Mercado de la Poesía, que tendrá lugar del 7 al 12 de junio en la plaza Saint-Sulpice en París.
Prefiero atribuirle esa decisión a la ignorancia de los responsables más que a una complicidad con las autoridades culturales del régimen dictatorial imperante en Cuba, país donde nací y del cual estoy exiliado.
Quiero recordarles que esa poetisa es actualmente la directora de la revista Unión, órgano de la muy oficialista Unión de escritores y artistas de Cuba, que sólo admite en sus filas a los intelectuales allegados al poder y de la que todos los disidentes o críticos son excluidos sin piedad.
Con ese título, ella figura entre los primeros firmantes de un « Mensaje » de educadores, periodistas, profesores, escritores, artistas, científicos que aún residen en la isla (¿por cuánto tiempo?: innumerables son los que se escapan a la menor oportunidad), respaldados por sus « colegas » extranjeros, encabezados por el periodista Ignacio Ramonet, biógrafo oficial de Fidel Castro y del venezolano Hugo Chávez, fechado el 5 de octubre de 2022 en La Habana.
¿Qué dice ese texto?
« Somos parte de los millones de cubanas y cubanos formados por la Revolución y defensores de sus valores. »
« Nos identificamos con el esfuerzo y la abnegación de las autoridades cubanas. Conscientes de dificultades y errores, el Partido y el Gobierno conducen y participan directamente en la recuperación. »
« La represión sólo existe en los mensajes que incitan a la violencia y respaldan el bloqueo, contrarios a los intereses y anhelos de la Patria. »
« Condenamos los discursos de odio, la difamación, las distorsiones de nuestra realidad (…) »
« (…) Se defiende la verdad de Cuba. »
¿La verdad? No está de ese lado sino del de los más de mil presos políticos detenidos a raíz o al margen de las manifestaciones pacíficas que se produjeron los días 11 y 12 de julio de 2021 a lo largo del país y que fueron duramente reprimidas. Los « mensajes que incitan a la violencia » y los « discursos de odio » provienen en realidad de los que, en la isla y en el exilio, reclaman el fin de la represión y su liberación, así como la de los manifestantes pacíficos arrestados el 7 de mayo de 2023 en Caimanera, en el oriente del país. Entre las personas encarceladas y condenadas a penas demenciales figuran varios valientes artistas, escritores y poetas, que se niegan a acatar la obligación de todos, intelectuales o gente del pueblo, de dedicarse a alabar permanentemente al régimen.
La poetisa Nancy Morejón tiene por costumbre firmar ese tipo de peticiones, que tienen como objetivo justificar los peores crímenes gubernamentales. Así, durante la « primavera negra » de 2003, hace exactamente veinte años, ella había puesto su firma debajo de otro « Mensaje » dirigido a « los pueblos del mundo » para apoyar la ejecución de tres jóvenes cubanos que habían secuestrado una lancha para escapar de la prisión que representa Cuba para ellos y para millones de exiliados. Esa carta apoyaba también la detención y la condena de 75 disidentes a sentencias que llegaban hasta los veintiocho años.
Había numerosos poetas entre los 75. El más famoso era Raúl Rivero, fellecido en exilio en 2021, a quien yo había tenido el honor de traducir y de hacer publicar, mientras estaba encarcelado, su libro Mandat de perquisition (« Orden de registro ») en la editorial Al Dante, que participa regularmente en el Mercado de la Poesía. Otros escritos suyos han sido publicados por la editorial Gallimard.
Nancy Morejón, a quien nuestro gran escritor Reinaldo Arenas, muerto en exilio en 1990, criticaba ya hace décadas en forma irónica y sarcástica, no es más que una cómplice y propagandista del régimen castrista, imperante desde hace más de 64 años.
Es perfectamente delirante atribuirle la presidencia de honor del Mercado de la Poesía, una muestra cultural que es también una afirmación de la libertad de expresión a través del mundo. Su reputación y su imagen resultarían irremediablemente afectadas.
Exijo que se corrija ese error y que se le retire a la poetisa Nancy Morejón el título honorífico que le ha sido indebidamente atribuido. Ese acto contribuiría a la libertad de Cuba y, por supuesto, de su poesía y de su literatura, que constituyen el patrimonio común de todos los escritores y poetas a través del mundo.
Jacobo Machover, escritor y académico cubano exiliado en Francia
Mazon
03/06/2023 à 12:47
vous pouvez être contre le régime cubain mais ce n'est une raison pour exclure tous les cubains qui sont en accord avec ou alors vous êtes pire que le régime cubain que vous condamnez.
pour avoir été de nombreuses fois à Cuba je ne reconnais pas dans votre le pays que j'ai découvert et je n'ai pas vu la "dictature" non plus mais je peux le dire le contraire.
Vos propos sur Ignacio Ramonet montre que vous êtes très certainement un homme droite nostalgique de l'époque de Batista, c'est votre droit mais pas plus.
Mazon
03/06/2023 à 05:55
Remerciés dans le monde entier pour la solidarité du peuple cubain dans l'action de lutte contre le COVID (https://www.investigaction.net/fr/cuba-ses-brigades-de-medecins-au-chevet-du-monde-depuis-60-ans/)
Le marché de la poésie ne respecte pas Cuba en ne respectant pas ses écrivains et se joint ainsi à la politique d'embargo des USA qui essaye de détruire depuis plus de 60 ans le régime politique dont s'est doté Cuba.
Et pour les grincheux juste un rappel à consulter ( mais que la marché de la poésie ne semble pas savoir ) : https://www.france24.com/fr/vid%C3%A9o/20221104-cuba-une-fois-de-plus-les-nations-unies-votent-la-fin-de-l-embargo-am%C3%A9ricain
Marie
03/06/2023 à 16:55
Bravo, j'
Marie
03/06/2023 à 17:04
Bravo, j'adore ce pays, comme toutes les personnes qui y sont allées et qui souhaitent y retourner tout comme moi. Un peuple solidaire, débrouillard, champion du non gaspillage, cultivé et en bonne santé. Le travail de sape de maints médias a réussi à coller aux Cubains l'image de la révolution qui, en tant que telle, a fait des ravages, tout comme en ...1789, où déjà? L'embargo étatsunien n'a pas réussi à mettre à genoux ce peuple adorable, qui chante et danse même aux heures tristes.
Mazon
03/06/2023 à 06:07
Monsieur Antoine Oury de quel droit vous écrivez "dictature cubaine" ?
Vous en connaissez beaucoup de dictature ou le dirigeant démissionne (Fidel Castro), le suivant (Raoul Castro) aussi et lui succède un autre dirigeant élu par l'assemblée du pays.
C'est vous qui décidez que tel ou tel pays est ou pas une dictature ?
Que dire d'un pays ou le gouvernement impose des lois rejetées par plus de 75% des habitants et matraque les opposants qui osent descendre dans la rue pour clamer leur opposition ?
C'est pas de Cuba dont je parle mais de la France et de son président élue par à peine 25% des électeurs
Marie
03/06/2023 à 17:06
Bravo encore, le rédacteur de l'article n'est pas (encore) au courant !!!
Antoine Oury
05/06/2023 à 08:35
Bonjour et merci pour votre commentaire,
L'utilisation du terme "dictature" pour qualifier Cuba est certes controversée, mais rappelons que l'État reste à parti unique et que le recours à la force est fréquent, en réponse à l'opposition ou lors de manifestations, comme en 2021.
Cordialement,
Antoine Oury
Mazon
05/06/2023 à 11:04
Il est vrais que Cuba a choisi le parti unique, mais pour autant en quoi la prolifération de parti est un gage d'un pays non dictatorial ? J'ai vérifié que lors des consultations électorales, il n'y a pas besoin d'être membre du parti pour participer et même pour être candidat. Et pourquoi notre modèle serair supérieur à celui de Cuba mais peut être un leurre pour faire croire à la pluralité ?
Et en ce qui concerne , je vous site / le recours à la force est fréquent, en réponse à l'opposition ou lors de manifestations, comme en 2021, alors en France c'est en permanence face au très nombreux mouvements sociaux qui sont violemment réprimés, je vous ferais grâce ici à la longue liste des victimes ou alors consulter le travail du journaliste David Dufresne qui en a fait le fastidieux recensement
Marie
05/06/2023 à 12:34
Il y a quelques semaines, l'émission "Echappées belles" consacrée à Cuba a ,-c'est une première à souligner- mis l'accent (relayé par Télérama) sur "les Cubains" de La Havane, Vinales er Trinidad. C'est-à-dire leur accueil, leur solidarité, leur débrouillardise, leur gaité , leur souci de l'environnement bref, l'amour de leur pays....Combien de Français voteraient aujourd'hui pour la réintroduction de la peine capitale? Quant aux dialogues de Ignace Ramonet avec Fidel, ceux qui critiquent ne les ont certainement pas lus, moi si.
Mazon
05/06/2023 à 14:18
je ne peux que soutenir à 100/100 votre propos. Mais beaucoup des journalistes qui critiquent Cuba n'ont jamais eu la curiosité de passer une quinzaine de jours dans l'ile de peur de changer d'opinion;
Oui Cuba, malgré la répression des USA résiste avec son peuple : chapeau l'artiste;
Mazon
08/06/2023 à 06:34
Chers amis,
Vous avez sans doute appris la « déprogrammation » de dernière minute de Nancy Morejón du Marché de la poésie qui doit se tenir la semaine prochaine. Son crime ? Ses sympathies pour le Révolution cubaine et Fidel Castro…
Alors que nous sommes entrés dans la 10ème édition des « Semaines de l’Amérique latine en France », à l’initiative du Sénat, cette affaire, totalement scandaleuse, est grave. Au-delà d’une atteinte aux relations culturelles franco-cubaines, cet incident s’inscrit dans une dérive inquiétante de la société française et la passivité des Pouvoirs Publics face à de tels faits, quand bien même le Marché de la Poésie doit probablement relever d’un statut associatif. Mais cette décision devrait relever, pour le moins, d’une réprobation morale.
Les signes d’intolérance, d’exclusion et d’interdictions de la liberté d’expression se répandent dans notre pays, dans une totale impunité.
Qu’on puisse s’en prendre à une intellectuelle de renom, une des grandes voix féminines de la poésie latino-américaine, descendante d’afro-cubains, Officier des arts et des lettres et grande amie de la France est déjà scandaleux !
On la sait engagée depuis des années dans le combat pour la paix, contre le racisme et les inégalités sociales, de race, de genre, et pour la liberté des peuples.
Que des organisateurs de cette manifestation culturelle, cédant aux « pressions » ou à « l’air du temps », prennent le temps de rédiger un « communiqué de presse » pour justifier leur geste est encore plus consternant.
Mais qu’on puisse l’humilier publiquement en toute connaissance de cause – en la « déprogrammant » alors que son nom circulait déjà depuis plusieurs jours au programme – est une goujaterie sans nom ! Une véritable ignominie dans une quasi indifférence politico-médiatique !
Je tenais simplement à vous faire part de ma totale solidarité avec cette intellectuelle caribéenne de grande qualité, mon admiration pour son œuvre, ma sympathie personnelle, le respect pour la force de sa personnalité et les combats qu’elle symbolise avec talent.
Pour mémoire, Jean Mendelson, alors ambassadeur de France à Cuba, avait fait son éloge (PJ) en 2013 en lui remettant les insignes d’Officier des Arts et Lettres, au nom de la République française. Nancy Morejón avait aussi participé à la dernière AG de Cuba Coopération à l’automne dernier, pour notre plus grand bonheur.
Amitiés consternées !
Stéphane
message que nous a fait parvenir Stéphane Witkowski, Président du conseil de gestion,
Président du conseil d’orientation stratégique, de l’Institut des Hautes Etudes de l’Amérique latine,
Jacobo Machover
10/06/2023 à 10:28
Post de blog de Floréal Melgar (florealanar)
Fin mars et début avril 2003, période connue sous le nom de « Printemps noir », 75 personnes, intellectuels, journalistes indépendants, bibliothécaires, militants pour les droits humains, étaient arrêtées à Cuba et condamnées en moyenne à des peines de 15 à 20 de prison. C’est durant cette période particulièrement répressive qu’une dizaine de jeunes Cubains décidèrent, le 2 avril 2003, de fuir leur pays en s’emparant d’une embarcation faisant la navette dans la baie de La Havane entre la vieille ville et le quartier de Regla*. Rattrapé par la marine cubaine, ces jeunes gens finiront par se rendre après être entrés en communication radio avec Fidel Castro en personne, qui leur promit qu’aucune répression ne serait exercée contre eux. Neuf jours plus tard, le 11 avril 2003, trois de ces jeunes gens, Lorenzo Copello, Bárbaro Sevilla et Jorge Martínez, étaient fusillés à La Havane, sur ordre du « Comandante ».
Victimes du « Printemps noir » de 2003.
Ces affaires firent grand bruit, au point que même certains intellectuels occidentaux qui soutenaient le régime castriste s’en émurent et firent connaître leur inquiétude face à cette extrême violence répressive mise en œuvre par la dictature cubaine. En réaction, Castro fit alors diffuser un texte de soutien à sa politique, signé par des artistes et intellectuels cubains apprivoisés, justifiant les lourdes peines de prison et l’exécution de ces trois jeunes hommes. Parmi les signataires de cette horreur figurait le nom de Nancy Morejón, une poétesse cubaine.
Des naïfs pourront s’étonner que des individus évoluant dans les hautes sphères de la poésie puissent être dépourvus à ce point de tout sentiment humain pour apposer leur nom au bas de pareil document. Nous qui avons eu nos éluards et nos aragons savons qu’entre l’écriture de deux vers, admirables ou non, des poètes peuvent parfois faire preuve d’une bassesse morale qui les rend aptes à dire, écrire ou justifier d’impardonnables ignominies.
Plus récemment, cette voix de son maître s’était encore distinguée en barbotant dans la fange du discours policier, approuvant la terrible répression qui a frappé les manifestants du 11 juillet 2021 dans toute l’île, calomniant ces derniers sans vergogne.
Mais pourquoi évoquer cette vieille dame indigne, Nancy Morejón ? Eh bien, parce que les organisateurs du Marché de la poésie, qui se tient à Paris, place Saint-Sulpice, jusqu’au 11 juin, avaient décidé d’en faire cette année la présidente d’honneur. Apprenant cela, l’écrivain exilé cubain Jacobo Machover adressait alors un courrier, rendu public, auxdits organisateurs, protestant contre cette distinction accordée à une personne ayant affirmé jusqu’à l’écœurement son soutien à un régime qui n’a cessé, depuis plus de soixante ans, de réprimer en particulier nombre d’intellectuels, artistes, écrivains et poètes ayant exprimé la moindre critique envers la politique de leur gouvernement. Ce qui s’est traduit pour eux non seulement par des peines de prison ou l’exil, mais aussi par la censure complète de leurs œuvres et l’impossibilité dès lors d’exercer leur activité dans leur pays. Très vite, Jacobo Machover, initiateur de la protestation, s’est vu rejoindre par nombre d’intellectuels et d’exilés cubains pour appuyer son initiative. Si bien que les organisateurs du Marché de la poésie ont dû faire marche arrière et, tout en permettant à Nancy Morejón de participer à l’événement, ont renoncé à lui accorder ce titre de présidente d’honneur.
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REPORT THIS ADCONFIDENTIALITÉ
Cette décision a été vécue comme un camouflet par le régime cubain et ses laquais ici en France. Et c’en est un, en effet, particulièrement savoureux, la dictature cubaine étant friande de cette reconnaissance internationale qui permet de faire oublier ses nombreux méfaits.
A Cuba même, la très domestiquée Union des écrivains et artistes (UNEAC), par la voix de son vice-président à échine souple Pedro de la Hoz González, s’est fendue d’une déclaration tout entière destinée, en bonne tradition stalinienne, à s’en prendre à la personne de Jacobo Machover, « coupable », entre autres, d’être l’auteur d’un ouvrage essentiel** déboulonnant la figure sacrée de « Che » Guevara, ce que les idolâtres ne lui pardonneront jamais.
En France, les valets de pied du régime castriste sont également montés au créneau. Le premier d’entre eux fut le sinistre Maxime Vivas qui, sur son site conspirationniste nauséabond « Le grand soir », n’a trouvé pour seul argument que de rappeler sa détestation de Jacobo Machover, ce dont ce dernier peut à juste titre s’enorgueillir. Puis est arrivée une sorte de communiqué de soutien à Nancy Morejón, signé par quelques intellectuels de troisième zone enrôlés par l’impayable Ignacio Ramonet***, qui servit naguère de brosse à reluire à Fidel Castro dans un livre d’entretien avec le « Líder Maximo » qui demeurera à jamais comme un sommet de servilité journalistique.
Enfin, le chapitre des bassesses ne pouvait être clos sans l’intervention du quotidien qui reste à ce jour la publication qui aura le plus injurié et calomnié dans l’histoire de la presse française, L’Humanité, qui y est allée elle aussi de son petit jet de venin stalinien sur Jacobo Machover.
Ces réactions minables, outre qu’elles n’ont servi à rien, ajoutent à l’honneur de cet opposant infatigable à la dictature cubaine, qui aura su, par son initiative, infliger une défaite cinglante, sur le plan culturel, à un régime qui ne tolère, chez les artistes et les écrivains, que soumission et exaltation de sa politique.
Yves Castel
03/06/2023 à 09:29
Quoi que l'on pense du régime cubain et de ses soutiens, ou ennemis, la question est de savoir si cette poétesse en est une et si elle représente quelque chose parmi "les nations des Caraïbes". Tout le reste, ce n'est pas de la littérature mais de la politicaillerie. Amis de la poésie, bonjour !
Marie
03/06/2023 à 17:27
Quels sont vos critères pour distinguer un(e) poète(sse) d'un(e) faiseur(se) de rimes, de vers ou de non vers etc...J'ai compris ma souffrance quand j'ai eu la sotte idée d'adhérer à un club de "poésies"...
Vincent Gimeno
03/06/2023 à 10:56
La seule raison pour laquelle nous avons retiré la présidence d'honneur, c'est cette approbation de la peine de mort par Nancy Morejón.
Vincent Gimeno-Pons, délégué général du Marché de la Poésie
Nahnawt
03/06/2023 à 13:41
Céder à la pression et réduire au silence une intellectuelle tout en utilisant le prétexte de la liberté d'expression ? Les organisateurs du Marché de la Poésie manquent soit de courage, soit de jugeote.
Marie
04/06/2023 à 10:58
La poésie, me semble-t-il, respire l'ouverture, alors pourquoi cet "embarras"?Même les poètes dits "maudits" ont été ovationnés, et ne sont pas tombés dans l'oubli. La pensée recule, quel désastre à venir !
Aurelien Terrassier
06/06/2023 à 16:50
Même si Nancy Morejon a des positions déplorables car soutien du régime cubain, vouloir l'exclure est un non sens. Peut-être que le marché de la poésie n'a pas fait le meilleur choix mais les gens qui aiment vraiment la poésie ne vont pas trop se soucier de cela je pense.
Laurent Muller
10/06/2023 à 13:16
Cuba, au dela de la dictature, est un regime totalitaire failli que seuls ses partisans et soutiens cyniques, défendent. Un Cubain s'exprimant a l'etranger est avant tout un agent de representation. Il n'y a aucun debat possible avec les nazis, les talibans et autres criminels islamistes, sans oublier les communistes lorsqu'ils sont au pouvoir...
Tia K
19/06/2023 à 11:39
Le Marché de la poésie a perdu tout intérêt et toute crédibilité pour moi après cette attitude